Marthe avait attendu ce
moment des picotements dans le fin fond du ventre tout au long de cette sainte
journée. Elle allait revoir Paul ce soir.
Ils s’étaient rencontrés
voilà quinze jours dans la file d’un cinéma. Ils n’allaient pas voir le même
film et ils s’en sont parlés. Après dix minutes d’attente et d’échanges ils ont
fini dans la même salle assis l’un à côté de l’autre. Et bien sûr, c’est lui
qui s’est rallié au choix de Marthe. A leur grande surprise, enfin surtout à
celle de Marthe, ils ont bu un verre à la sortie, Marthe un thé, puis ils ont mangé ensemble dans un chinois pas loin.
C’était finalement comme s’ils se connaissaient depuis des années et des
années. Parfois même, ils se taisaient et le silence ne pesait pas. C’était
juste un silence de plumes entre ces deux là qui, pourtant, se découvraient.
Elle était seule depuis bientôt trois mois après sa dernière rupture avec
Antoine. Antoine et sa peur panique de s’engager, alors qu’elle se sentait
prête. Maintenant, elle était un peu refroidie mais au fond d’elle cette idée
qu’il se pourrait quand même qu’il soit temps…
Lui, il avait dit qu’il
était libre comme l’air et pourquoi ne pas le croire, surtout quand on le
désire, ça facilite les choses.
C’est huit jours après
qu’ils se sont retrouvés au creux du chaud d’une couette qui ne les avait pas
couverts très longtemps.
Pas trop vite, ne vas pas
trop vite, ne t’enflamme pas se disait-elle en lui disant oui, oui et re oui…
Au matin, il lui avait
préparé un thé et lui avait apporté une tasse brûlante sur un plateau d’or et
de cristal de Carrare, une paire d’angelots velus voletait autour de son aura nimbée de diamants... Il était, dans cet
instant du réveil, beau comme un rêve de Prince… Ne t’emballe pas, ne t’emballe
pas se disait-elle en lui souriant: Viens.
Depuis, entre eux c’était comme
dans tous les débuts depuis le début. Quand ils étaient ensemble, le temps
accélérait quand ils s’attendaient le temps s’alanguissait.
Elle ne savait encore rien
de lui mais elle s’en moquait pas mal, elle voulait juste tomber amoureuse et c’était
en train d’arriver.
Cette journée avait été
interminable. Les minutes duraient des heures et les heures des siècles. Ils
devaient se retrouver après son travail. Ils iraient boire un verre dans le bar Sibo, près de la place et pour après, ils n’avaient encore rien décidé. Ils
verraient, ils improviseraient et ce serait merveilleux…
Elle est sortie en même
temps que Lou sa voisine de bureau. Lou lui a dit en souriant : Tu
ne coiffes pas Sainte Catherine ? C’est ce soir !
C’est quand elle a mis le
pied dehors que son portable a vibré. C’est lui s’est-elle dit. C’était
lui. C’est lui, a-t-elle dit les yeux mouillés de bonheur.
Ce qu’elle a lu lui a moins
plu :
J’ai réfléchit, tu est une si belle personn ke te
mérite pas, désolé, je ne viendrai pas ce soir, ni les zautre. Ne m’apel pas. Biz.
Elle était terrassée.
Lou, légère a insisté: Dis, et Sainte
Catherine, alors ?
Marthe s'est tournée vers elle, l’air mauvais, la colère glaciale et en détachant toutes les syllabes, elle lui a adressé :
Lou chérie, j’ai vingt cinq balais, pas de mari, pas d’enfant, je viens de me faire larguer par sms, par sms tu te rends compte, et par un ringard analphabète... Comme une vieille serpillère usée alors, ma grande, tu sais où tu vas te le mettre ton chapeau de catherinette?
Lou chérie, j’ai vingt cinq balais, pas de mari, pas d’enfant, je viens de me faire larguer par sms, par sms tu te rends compte, et par un ringard analphabète... Comme une vieille serpillère usée alors, ma grande, tu sais où tu vas te le mettre ton chapeau de catherinette?