08 octobre 2022

Quel problème

Tous ceux qui étaient dans le wagon, ils n’étaient pas demeurés,  avaient compris qu’il y avait un problème. Les voisins avaient commencé à se regarder d’un air entendu qui disait on est dans la merde. Mais ce qu’ils ne savaient pas c’était le temps que ça allait durer. Ils étaient arrêtés depuis un bon quart d’heure maintenant à Lyon  alors que c’était un train sans arrêt jusqu’à Aix. Et puis une voix a fait : Mesdames Messieurs désolés pour cette arrêt qui n’était pas prévu, panne électrique qui affecte les aiguillages vers Marseille, gna gna gna, ils essaient de réparer (sans blague !) on ne sait pas quand le trafic pourra reprendre mais dès qu’on en sait davantage on revient vers vous pour le dire (vous êtes trop bon !). 

On est resté bloqué une heure trente. C'était bien ma veine! Un karma de frelon asiatique: Tout le monde lui tombe dessus.

C'était la fin d’après midi. Donc on aurait une heure trente dans le nez à Avignon… Bien entendu, j’allais manquer le dernier TER pour Fontaine où j’avais laissé ma voiture…  Il n’y avait pas non plus de service de bus et le taxi coûtait un bras et demi. Heureusement qu’avant de partir, j’avais fabriqué un petit carton sur lequel j’avais écrit: L’Isle sur la Sorgue, la gare où j’avais laissé ma voiture quelques jours auparavant. Je m’étais donné jusqu’au dernier TER pour tenter de faire du stop et puis, si personne ne m’avait embarqué,  je me serais rabattu sur le train de 18h30… Celui que  je venais de manquer…Ce retour de la capitale où j’avais passé quelques jours avait désormais un parfum d’embrouille et de galère. Et ça ne sentait pas si bon que ça.

À cette période de l’année  tu as encore une heure de jour pour montrer ton carton. Après ce serait plus difficile. La nuit les gens deviennent méfiants alors que si on regarde bien les statistiques, il y a autant de crime le jour que la nuit. Il fallait y croire. Hardi le pouce ! Montre le fièrement ton carton !

Ce que j’ai fait. Après un petit quart d’heure d’inquiétude, un gars s’est arrêté. Une jolie bagnole allemande confortable. Il m’a dit qu’il n’allait pas là où j'allais mais que là où il en était il pouvait bien faire un détour. Intérieurement je hurlais de joie mais extérieurement je n’ai presque rien laissé voir comme si c’était normal qu’il me prenne dans son engin et qu’il me dépose au bon endroit. Mes chakras étaient ouverts en grand et l’air circulait comme à l'intérieur comme dans une pompe géante. On a passé le trajet à se raconter nos vies enfin surtout la sienne parce que moi je ne suis pas trop du genre à me répandre. Pas la première heure.  Il venait de manquer son train pour paris à cause d’un problème électrique sur les voies (un compagnon de galère), lui y habitait et il revenait dans la maison de campagne qu’il avait dans un joli village du coin. Juste pour y passer la nuit puisqu’il reprendrait le train de sept heures le lendemain. Il fallait bien qu’il rentre, il était attendu. Sa maison était dans un village que je connaissais bien. On a donc papoté agréablement lui et moi. J’ai posé quelques couches de remerciements sur le fait de m’avoir évité une sacrée tannée, j’étais content de le connaître, il était agréable. Pas ramenard, simple et il aimait une belle région, comme moi.

Quand il m’a déposé à une centaine de mètres de la gare, je n’ai  pas voulu lui faire faire un détour supplémentaire, il faisait nuit. Je l’ai salué et remercié encore une fois. Je suis descendu et j’ai regardé les feux de sa bagnole s’éloigner. J’ai épaulé mon sac et me suis dirigé vers ma voiture. Une fois assis, j’ai voulu remettre mon portable à charger… J’ai  nettement ressenti le frisson glacial me parcourir l’échine 

… Non pas ça… Hé ben si il m’est arrivé ça. J’avais laissé mon portable dans la bagnole de mon sauveur… Un karma de moule de bouchot...

Je vais me presser je devrais bien arriver à le rattraper… Je mets le contact… Ah oui mince, évidemment j'avais oublié, le réservoir est vide et le témoin allumé… Je dois donc  absolument remettre du carburant sous peine de tomber en rade. Il ne faut pas ajouter de la poisse à la poisse, ça ne se fait pas. Je me suis vu en panne dans la nuit dans la campagne sans portable pour prévenir. J’ai filé à la première pompe venue. Pendant ce temps là mon portable fonçait, lui, se perdre dans la nuit...

Une fois le réservoir plein, j’ai quand même pris la route pour tenter de le rattraper. Bien sur malgré la petite cinquantaine de kilomètres parcourue au hasard dans la nuit d’Octobre je n’ai jamais remis les yeux sur lui ni sur sa bagnole et encore moins sur mon portable..

Aussi, j’ai fait demi tour. Il fallait que je prévienne les miens maintenant sinon ils finiraient par s'inquiéter. Ils en étaient restés à l'arrêt panne.  Avant il y avait des cabines téléphoniques dans tous les coins mais elles avaient toutes été transformées en cubes de métal. Et je n’avais plus de fixe chez moi depuis belle lurette…

Je suis allé dans un restaurant où j’avais mes habitudes pour téléphoner et... manger un morceau. Si ces bêtises m'avaient  fermé les chakras, elles m'avaient ouvert l'appétit.

J’ai pu appeler et dire où on pouvait me joindre pendant une heure et raconter mes aventures.

Là où j’en étais, je n'avais plus qu'à juste récupérer mon portable qui pour tout arranger était en silencieux, je n'aime pas qu'il sonne dans le TGV et donc si on m'appelait mon nouvel ami ne pourrait pas l'entendre... 

Je ne savais qu’un truc de mon chauffeur. Il prenait un train le lendemain matin à sept heures pour Paris... J'ai envoyé valdinguer l'image qui m'est venue du karma d'un taureau de combat...

J’avais une nuit devant moi pour trouver son horaire, me reposer et tenter de savoir, si c'était possible, comment régler ce problème… 


Un problème? Quel problème?




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