Pour Les impromptus littéraires de la semaine. Il fallait débuter le texte par l'incipit:
Un étrange parfum flottait dans les
couloirs ...
___ C’est pas mal comme début, c’est
bien, même, mon chéri, on est plongé dans une ambiance, on a la curiosité
piquée, mais quel est donc ce parfum se dit-on. On a envie d’en savoir
davantage, c’est bien, tu as avancé…Bravo, je te félicite ! Du reste, si
tu me permets, puisque tu me demandes, je trouve qu’on a une indication un poil
trop précise si tu emploies parfum, tu nous guides vers un point plutôt désigné,
ne vaudrait-il pas mieux, pour commencer, parler d’odeur, ça reste plus diffus,
plus vaste. Un parfum déclenche toute une série d’images, on est dans le
plaisir, la finesse, le subtil alors qu’une odeur nous laisserait dans le
mystère, Non ? Qu’en penses-tu,
toi ?
___ Heu, je ne sais pas.
Et puis, cet « étrange », là
qui vient. Ce qui est étrange c’est ce qu’on ne connaît pas donc
« inconnu » me paraîtrait bien, aussi. Pourquoi étrange ?
Et, dis, excuse moi deux secondes, mon
amour, c’est bien « flottait » que tu as écrit ? Un parfum, une
vapeur qui « flotte » je ne sais pas pourquoi mais moi, ça freine, ça
me fait sortir du truc, toi, ça ne te dérange pas plus que ça ? C’est
peut-être moi. Qu’une odeur soit posée au-dessus de quelque chose et qu’elle ne
s’y enfonce pas, ça ne te semble pas bizarre ?
Le contraire de couler en somme ?
Un parfum ne coule pas, il flotte ?
___ Tu en es là ? C’est une façon
de parler, je veux dire qu’il se répand comme une trace d’huile sur une
surface.
___ Je me demande s’il ne vaudrait pas
mieux qu’elle plane, ton odeur… Elle
serait dans l’air, diffuse, presqu’imperceptible, elle volerait autour des
choses et des gens comme une nappe de brouillard, sans réelles limites, sans
début ni fin, elle serait là autour mais sans contours… À toi de voir, c’est
toi l’écrivain… Pendant que j’y suis, tu comprendras que je ne dise trop rien
des couloirs mais là encore ça nous entraîne vers quelque chose d’assez précis,
si tu parlais de pièce, de maison ou mieux de bâtisse tu resterais davantage
dans le vague, le suggéré, le mystérieux…
Aussi, écoute, ta première phrase
deviendrait :
Une odeur inconnue planait dans la
bâtisse…
___ Qu’en dis tu ?
___ J’en dis que c’est dans un couloir
que ça se passe, que ta phrase ne ressemble à rien, qu’elle est moche, qu’elle
ne sonne à rien. Pire qu’elle chante faux.
Avant de lui asséner le mot de grâce,
il l’a regardée droit dans les yeux et lui a envoyé :
___ Dis, Amour, tu joues à quel jeu?
Tu vas me disséquer tout le bouquin de cette manière ou bien je t’aurais étranglée avant ?
Tu vas me disséquer tout le bouquin de cette manière ou bien je t’aurais étranglée avant ?