Le
vent s’était levé. D’un coup.
Fidèle à ses mauvaises manières, ça lui avait pris
comme une envie de souffler. Ça lui prenait très souvent comme ça.
Si, depuis le temps, on s'était un peu habitué à ses si soudaines sautes d’humeur, il arrivait encore qu'il nous étonne par son imprévisible brusquerie. À neuf heures il dormait d'un sommeil lourd, dans du calme plat, c'était une pétole à entendre les mouches voler, les cheveux pousser, à écouter les papiers se froisser seuls et à neuf heures deux, il hurlait, tempête impétueuse, ouragan batailleur. Tu sortais de chez toi bien peigné, tu rentrais les cheveux en bataille, la mise en vrac. Le tout sans signe avant coureur, sans le moindre préavis. J’étais couché, je me lève. Et je bastonne tout ce qui est sur mon chemin: Je pousse, je dégage, j’écarte, je renverse, j’éloigne, je bouscule, je chamboule. Puis, après son passage, après avoir tout bien chaviré, après avoir retourné le linge sur les fils, jeté à terres les branches les plus faibles, écorné quelques taureaux, déplacé en tas les mortes feuilles, les journaux oubliés, las sacs plastiques égarés, après avoir couché quelques noyers, plié certains roseaux, après avoir roulé des épaules comme un voyou en goguette, après avoir dévasté sur son passage comme un mammouth mal éduqué dérive dans une fabrique d’assiettes, il pouvait disparaitre aussi vite qu’il s’était montré. D’une seconde à l’autre, il n’était plus là, il avait disparu. Les chapeaux tenaient à nouveau sur les têtes, les nappes sur les tables, les foulards autour des cous. Dans les rues, on marchait désormais droit, on s'était redressé, on n'avançait plus l'échine courbée sous ses assauts…
Ici on disait qu’il avait calé. Il calait d’un moment à l’autre. Alors, on restait debout, si on avait eu de la chance, groggy, à genoux si on avait plié, en tous les cas sans force, les vêtements débraillés, les yeux empoussiérés, hébété comme un éméché soûlé de gifles, comme un baffé battu, comme un concassé. Noix minuscule et chétive broyée, brisée, en miettes, éparses
Si, depuis le temps, on s'était un peu habitué à ses si soudaines sautes d’humeur, il arrivait encore qu'il nous étonne par son imprévisible brusquerie. À neuf heures il dormait d'un sommeil lourd, dans du calme plat, c'était une pétole à entendre les mouches voler, les cheveux pousser, à écouter les papiers se froisser seuls et à neuf heures deux, il hurlait, tempête impétueuse, ouragan batailleur. Tu sortais de chez toi bien peigné, tu rentrais les cheveux en bataille, la mise en vrac. Le tout sans signe avant coureur, sans le moindre préavis. J’étais couché, je me lève. Et je bastonne tout ce qui est sur mon chemin: Je pousse, je dégage, j’écarte, je renverse, j’éloigne, je bouscule, je chamboule. Puis, après son passage, après avoir tout bien chaviré, après avoir retourné le linge sur les fils, jeté à terres les branches les plus faibles, écorné quelques taureaux, déplacé en tas les mortes feuilles, les journaux oubliés, las sacs plastiques égarés, après avoir couché quelques noyers, plié certains roseaux, après avoir roulé des épaules comme un voyou en goguette, après avoir dévasté sur son passage comme un mammouth mal éduqué dérive dans une fabrique d’assiettes, il pouvait disparaitre aussi vite qu’il s’était montré. D’une seconde à l’autre, il n’était plus là, il avait disparu. Les chapeaux tenaient à nouveau sur les têtes, les nappes sur les tables, les foulards autour des cous. Dans les rues, on marchait désormais droit, on s'était redressé, on n'avançait plus l'échine courbée sous ses assauts…
Ici on disait qu’il avait calé. Il calait d’un moment à l’autre. Alors, on restait debout, si on avait eu de la chance, groggy, à genoux si on avait plié, en tous les cas sans force, les vêtements débraillés, les yeux empoussiérés, hébété comme un éméché soûlé de gifles, comme un baffé battu, comme un concassé. Noix minuscule et chétive broyée, brisée, en miettes, éparses
Et lui ? Va
savoir où il s’en était allé, le versatile coléreux ?
Comme rentré dans une
tanière, dissimulé au fond d’une quelconque grotte, caché dans son antre à ruminer sa rougne contre sa soeur la pluie, contre les nuages, ses ennemis fidèles? (Ce qu'il déteste le plus au monde c'est de les voir, ceux là, se pavaner au plafond, alors il les balaye d'un revers de manche appuyé comme un instituteur intransigeant éliminerait les fautes à la craie blanche d'un tableau de classe. Toutes, jusqu'aux dernières, jusqu'au passage de l'éponge. Ce qu'il aime, à l'obsession, c'est l'uniforme. Le bleu sans tâche, sans erreur, les monochromes... purs.)
À fomenter les mauvais coups à venir? Jusqu’à sa prochaine colère, jusqu’à sa prochaine sortie.
À fomenter les mauvais coups à venir? Jusqu’à sa prochaine colère, jusqu’à sa prochaine sortie.
Jusqu'à notre prochain dénuement, celui qui nous attend après le dernier passage lissant d'une éponge humide.