La guerre.
C'était la guerre. Ça bardait ferme dans les parages depuis trois jours déjà.
C'était la guerre. Ça bardait ferme dans les parages depuis trois jours déjà.
Pour être
plus proche de la vérité, ceux qui les connaissaient bien, ceux qui les fréquentaient régulièrement, auraient volontiers dit que cela
faisait quatorze ans et trois jours qu'ils se regardaient de travers la bouche
tordue, qu'ils s'assassinaient des yeux en coin, qu'ils s'envoyaient des
missiles sol sol à qui mieux mieux. Y volaient des: Cherche un peu! Tu ne
trouverais pas un oeil aux Quinze vingt! Les: Avec ta manie de tout
ranger tu devrais être Général en chef chez Ivar! et les: Elle est dure, la
vie, épouser un ange et se réveiller avec Galabru!
Et tout à l'avenant... Enfin avenant, c'est vite écrit. Quatorze très longues années qu'ils s'affrontaient, qu'ils se jugeaient, se dénigraient, se chargeaient de reproches, s'invectivaient, s'insultaient, même parfois... Manquaient d'en venir aux mains, quelques fois, mais jamais quand ils étaient seuls. Il leur fallait toujours un témoin vers qui ils se tournaient tout à tour et qu'ils prenaient à partie: Tu vois ce qu'il me fait vivre? Entends-tu ce que je dois supporter? Ce type est un cintré ! Cette femme va me rendre fou!
À vrai dire, ils avaient de plus en plus de mal à trouver des arbitres bénévols! Il n'y en avait plus guère pour aller se fourrer au coeur du chaudron, dans l’œil du cyclone, au beau milieu du champ. Batailler était leur langage, leur lien, leur façon d'être ensemble. L'un contre l'autre, très contre. Pourtant ils avaient tout tenté pour ne pas en arriver là: Ils avaient dévoré tout Salomé... ce gourou poussif qui avait fait fortune sur le malheur des gens et des jeux de mots en bois...Heureux qui comme unique... T'es toi que je m'écoute! Impayable! Ils avaient écouté Dubranche presque toutes les nuits, ils s'étaient ruiné avec des stages de massages tantriques et reconstruction de couples dans le Limousin profond, ils avaient consulté Pierre, Chamane Aigle blanc "retour d'affection" qui avait sacrifié trois poules, deux hamsters et quelques centaines d'euros pour tenter de les sauver, mais sans plus de résultat que tout le reste.
Et tout à l'avenant... Enfin avenant, c'est vite écrit. Quatorze très longues années qu'ils s'affrontaient, qu'ils se jugeaient, se dénigraient, se chargeaient de reproches, s'invectivaient, s'insultaient, même parfois... Manquaient d'en venir aux mains, quelques fois, mais jamais quand ils étaient seuls. Il leur fallait toujours un témoin vers qui ils se tournaient tout à tour et qu'ils prenaient à partie: Tu vois ce qu'il me fait vivre? Entends-tu ce que je dois supporter? Ce type est un cintré ! Cette femme va me rendre fou!
À vrai dire, ils avaient de plus en plus de mal à trouver des arbitres bénévols! Il n'y en avait plus guère pour aller se fourrer au coeur du chaudron, dans l’œil du cyclone, au beau milieu du champ. Batailler était leur langage, leur lien, leur façon d'être ensemble. L'un contre l'autre, très contre. Pourtant ils avaient tout tenté pour ne pas en arriver là: Ils avaient dévoré tout Salomé... ce gourou poussif qui avait fait fortune sur le malheur des gens et des jeux de mots en bois...Heureux qui comme unique... T'es toi que je m'écoute! Impayable! Ils avaient écouté Dubranche presque toutes les nuits, ils s'étaient ruiné avec des stages de massages tantriques et reconstruction de couples dans le Limousin profond, ils avaient consulté Pierre, Chamane Aigle blanc "retour d'affection" qui avait sacrifié trois poules, deux hamsters et quelques centaines d'euros pour tenter de les sauver, mais sans plus de résultat que tout le reste.
Si, en amour il y en a, comme disait l'autre, avec beaucoup de nuances,
toujours un qui souffre et un qui s'ennuie, eux deux s'ennuyaient de souffrir ou l'inverse!
On avait même oublié s'ils s'étaient bien entendus, un jour? Au tout début? La
première semaine? La première heure? Certains dans leur entourage, avaient fini par se demander:
Mais que font-ils encore ensemble, ces deux là? Que ne se sont-ils séparés? Que
n'ont-ils mis enfin fin à cette mascarade? Que ne cessent-ils cet affrontement
destructeur? Que ne brandissent-ils pas les drapeaux blancs? Que
n'arpentent-ils pas les bois de Rethondes? Bien entendu, ils ne le disaient pas
de cette manière un tantinet raffinée, mais c'est bien ce que ça voulait dire.
On avait même été tenté de croire que c'est une musique qui leur allait,
que dans le fond, ils n'étaient pas si aux créneaux qu'ils en donnaient
l'impression, qu'ils ne chauffaient pas de l'huile TOUS les jours, qu'il leur
arrivaient de se retrouver... Et là les oeillades s'appuyaient d'un air entendu,
pour des réconciliations festives, sur l'oreiller... que c'était même le but de
toutes ces engueulades, qu'il leur fallait ça pour une paix active... Hé bien
non. Entre eux, de ce côté là, c'était dimanche de pluie à Châteauroux ou la plage en Novembre à Knokke-le- zoute...
S'ils n'arrivaient pas à être bien ensemble, ils n'arrivaient pas non plus à se séparer. Ils s'accrochaient à ce qui les faisait souffrir et ils s'en voulaient de plus belle. Ils étaient comme deux terrassiers qui creusaient chaque heure davantage le fossé qui les séparaient. Allait-il les engloutir? Comme ils n'avaient plus grand chose à échanger, ils n'arrêtaient pas de s'en parler... Viendrait un moment où à force de ne plus s'entendre ils ne s'écouteraient plus... Ce jour est venu. Un matin. Un matin banal avec son visage froissé de matin blême banal. Pendant le petit déjeuner, qu'elle avait pris avant lui, sans l'attendre... Comme toujours, ça a tourné vinaigre, l'air s'est très vite apesanti...
S'ils n'arrivaient pas à être bien ensemble, ils n'arrivaient pas non plus à se séparer. Ils s'accrochaient à ce qui les faisait souffrir et ils s'en voulaient de plus belle. Ils étaient comme deux terrassiers qui creusaient chaque heure davantage le fossé qui les séparaient. Allait-il les engloutir? Comme ils n'avaient plus grand chose à échanger, ils n'arrêtaient pas de s'en parler... Viendrait un moment où à force de ne plus s'entendre ils ne s'écouteraient plus... Ce jour est venu. Un matin. Un matin banal avec son visage froissé de matin blême banal. Pendant le petit déjeuner, qu'elle avait pris avant lui, sans l'attendre... Comme toujours, ça a tourné vinaigre, l'air s'est très vite apesanti...
Un moment, elle lui a demandé: Et Bon Dieu, qui crois-tu que ce
soit? Comme il n'était pas trop du
genre à livrer ses impressions, il s'est entendu répondre: Je ne suis pas tout
à fait incertain que ce ne soit pas toi...
Elle
avait l'habitude des ses phrases alambiquées, elle ne lui en tenait plus rigueur
depuis longtemps, je crois même que désormais, elle s'en foutait royalement.
Et, pour tout dire, si ça ne la faisait pas encore sourire, ça avait fini
par ne plus l'agacer. Elle s'en battait l'oeil, faut voir comme... se
disait-elle à elle même... Ce qu'il venait de lui servir
n'était évidemment pas ce qu'elle attendait, mais il pariait qu'elle s'en
contenterait... Comme d'habitude. Il avait somme toute complètement tort, mais
il n'aurait pas d'autre occasion de préciser sa pensée. Leurs deux sourires ont alors définitivement
disparu dans la lourdeur de l'air. Avant de claquer la porte dans
son dos, elle lui a lancé d'un trait:
Et puisque tu tiens tant à le savoir, c'est moi qui ait fini le pot de
Nutella!!! Et non, je ne t'en ai pas laissé. Pas même une virgule.
Si ça n'était pas d'une terrifiante tristesse... C'est sur ce mot là,, c'est sur elle, "VIRGULE" que leur histoire commune s'est arrêtée. Net.