On était parti dès la
sortie du boulot. Le matin on avait mis dans le coffre nos deux sacs de voyage
avec quelques fringues chaudes pour une fin de semaine qu’on allait passer à la
campagne mais qui s’annonçait pelante.
Il faut dire que c’était un
vendredi de fin Novembre. La nuit était tombée depuis longtemps quand on a pris
route. Il avait flotté toute la journée et ça tombait encore sur la banlieue et
sur tout le chemin. Vers l’arrivée, on a même rencontré du brouillard mais on
s’en foutait, on était ensemble, au chaud dans la voiture, on avait deux jours
devant nous, il y avait de la bonne musique et dehors une paire
d’essuie glaces presque neuve s'activait en rythme.
Le trajet n’avait pas été
si long. Deux bonnes heures, tout au plus. Une fois sortis de la banlieue, on
avait fait du Sud Ouest, puis attrapé un long bout d’autoroute et quelques
kilomètres après la sortie, on avait fini par trouver l’endroit qu’on avait
réservé par téléphone. Internet n'avait pas encore débarqué dans nos vies... Une grande ferme avec sur la partie droite, un gîte
aménagé dans une dépendance. Prévenus de l’heure de notre arrivée, ils avaient
allumé le chauffage, mis des bûches dans la cheminée et une bouteille de vin
(pas terrible) sur la table en cadeau d’arrivée. Posé sur elle, un petit mot
nous attendait. On se verrait demain, on nous souhaitait bonne nuit, vous
savez, à la campagne on ne traîne pas le soir. Il y a de la soupe dans le
frigo. Bienvenue et bonne nuit. Heureusement, on avait vidé nos frigos à nous
avant de partir et donc un festin rapide pouvait se préparer. On a mangé et on
n’a pas lambiné. Le trajet, la journée de travail, la fin de semaine on était
crevés. On a débarrassé la table et on est monté se coucher. Heureusement, il y
avait deux chambres, on s’est empressé des les occuper. On a sombré.
Dans l’après-midi, André
a démolli Guy mais Henri qui était soit disant perdu, fini, rincé, déclassé, rompu a atomisé Pete. Ils étaient à une victoire chacun. Tout
était encore possible.
Le lendemain matin, un
brouillard à couper au chalumeau envahissait la cour de la ferme. Après un
petit déjeuner de parisien on est pari au bourg, au marché, dont on nous
avait dit qu’il était à voir. Nous n’avons pas été déçu. On y a acheté des
huitres et du poisson pour le soir. Le début de l'entrainement pour les fêtes à venir. Le marché arpenté, nous avons mangé là-bas,
dans une brasserie. Un croque Monsieur chacun comme on avait forcé sur le petit
déjeuner, on n'avait pas une faim d'ours. En sortant de table, on a pris la
direction de la campagne et comme le brouillard s’était dissipé, on s'est offert une
longue virée dans les champs autour du gîte. C'est à la nuit tombée que nous sommes rentrés.
Nous avons fait couler un bain chaud dans lequel nous avons plongé ensemble. Un
verre de rouge à la main. Nous avons trinqué dans la mousse. On ne s’était pas
gêné pour monter le thermostat dans la salle de bain et c’est d’un hammam ou
presque que nous sommes sortis pour ouvrir les huitres, mettre la table et
ouvrir la deuxième bouteille. La soirée a été douce. Quand nous nous sommes
couchés, Henri et Guy avaient botté les fesses de Ken et Robert en quatre sets. Ça
avait rajouté à nos sourires.
Le dimanche, il pleuvait
comme Dieu qui pleure. On a pris notre temps pour faire griller les tartines et
chauffer le café. On a traîné. Ensuite nous nous sommes habillés comme il
fallait pour une longue balade sous la flotte. Un grand tour comme nous disions. On est rentré trempés, fourbus et
affamés. Des ogres se sont mis à table et se sont installés devant la télé, les
pieds au chaud des bûches rougissantes. On a aussi crié, sauté, chanté quand Guy a
giflé Pete et qu'il est tombé sur le court après avoir balancé sa raquette dans les cintres.
On a fermé la porte du gîte
Yannick n’avait pas fini son tour de piste avec les autres derrière. Ils
étaient tous en pleurs d'une joie indicible qui leur resterait quand ils seront vieux et forbus et leur immense
plaisir ce soir là faisait le nôtre.
Après ça se gâterait un peu quand ils iraient vivre ailleurs pour une vulgaire histoire de fric ce qui leur ferait oser quelques fausses notes en braillant la Marseillaise.
Il y a vingt six ans, une bande de potes avait battu la soit disant plus forte équipe du monde et nous, nous avions passé un joli week-end dans le Perche…
Vingt six ans... Déjà... Deux six, un score de tennis.
Moi, j'en suis déjà à six quatre. Un autre score de tennis. Décidément.
Il y a vingt six ans, une bande de potes avait battu la soit disant plus forte équipe du monde et nous, nous avions passé un joli week-end dans le Perche…
Vingt six ans... Déjà... Deux six, un score de tennis.
Moi, j'en suis déjà à six quatre. Un autre score de tennis. Décidément.