Je n’arrivais pas à croire qu’elle ait pu avoir une telle idée.
Surtout sans me demander mon avis. Savait-elle que j’aurais refusé tout net si elle m’avait prévenu ? Je déteste qu’on m’oblige. Si on devait m’enlever un bras, il faudrait me jurer que je peux le garder. Était-elle devenue subitement cinglée ? Quelle mouche avait bien pu la piquer ? Comment ne s’était-elle pas arrêtée en route en se disant que, simplement, cela ne se faisait pas ? La ligne me semblait pourtant claire, évidente, tracée, nette. Même entre deux personnes si souvent complices, si proches, si liées.
Surtout sans me demander mon avis. Savait-elle que j’aurais refusé tout net si elle m’avait prévenu ? Je déteste qu’on m’oblige. Si on devait m’enlever un bras, il faudrait me jurer que je peux le garder. Était-elle devenue subitement cinglée ? Quelle mouche avait bien pu la piquer ? Comment ne s’était-elle pas arrêtée en route en se disant que, simplement, cela ne se faisait pas ? La ligne me semblait pourtant claire, évidente, tracée, nette. Même entre deux personnes si souvent complices, si proches, si liées.
J’ai su ce qu’elle avait fait quand j’ai reçu une convocation à la
première séance. Je ne sais encore pas ce qui lui a pris ! En avait-elle
assez de me voir déambuler dans le salon, plié en deux, en vieillard, une main
sur les reins comme une femme enceinte désormais sans eaux? Etait-elle fatiguée
qu’il me faille la demi-heure bien tapée pour grimper d’un malheureux étage ?
Que je me réjouisse à admirer les publicités pour les monte-escaliers, les baignoires sécurisées et les douches à portes? Pensait-elle avec cette
inscription m’éloigner de la maison au moins une heure ? Hors de sa
vue ? Avait-elle encore un soupçon de rancœur à cause de ma réflexion
acide sur sa nouvelle coupe de cheveux du mois passé ? Le saurai-je
vraiment un jour ? Ce qui était certain c’est que depuis plusieurs
semaines, déjà j’avais droit à des : t’es chiant envoyés dans un
souffle long. Le message avait fini par passer, je l’étais devenu.
Si fait, j’étais convoqué pour le lendemain. J’avais la journée pour
en apprendre un peu. Alors quand j’ai su que cette pratique, brûlait autant de
calories que de faire du surf et à peu près autant que de faire une descente à
ski, malgré mes réticences légitimes, j’ai souri. L’océan houleux et la
montagne enneigée à portée de salon. Hum
alléchant. Financièrement déjà, on était
gagnant, vu le prix d’un vieux survêtement comparé à celui d’un séjour dans les
landes ou en station. Oui parce qu’il
fallait s’habiller en clochard pour être à son aise. C’était dit dans toutes
les présentations du Taï chi chuan ou, tenez vous bien en français ça
signifie Boxe de la polarité suprême
(les bi polaires taï taï ? T’es chiant !) C’est un art martial au service de l’harmonie universelle des polarités Yin le
négatif et Yang le positif, un savant rééquilibrage des énergies pour une plus
grande vitalité. Une alternative douce à la morosité molle ?
Ainsi donc, elle trouvait que j’étais
devenu mou. Mou du genou ? De l’âme, du corps entier si ça se trouve. En
gros, dans sa lubie, pas mal de choses se passaient dans la respiration et les
postures et leurs enchainements. Ça semblait d’une simplicité évidente et
c’était donc extrêmement complexe. Comme la plupart des arts et philosophies
venues d’Asie. Ils avaient eu plusieurs millénaires pour peaufiner le bazar. Ce
qui m’avait le plus réjoui c’était, bien sûr les noms des postures à enchaîner.
La ferme et la basse–cour étaient convoquées. Il fallait ouvrir puis repousser le singe, brosser le genou, séparer la crinière du
cheval, mouvoir les
mains comme des nuages,
que le coq d’or se tienne sur une
patte, donner un coup
de talon, saisir la
queue de l’oiseau, se
croiser les mains et fermer
le tout.
Et ranger la planche après l’avoir
rincée.
Cette fois j’étais vaincu ! J’apercevais
déjà la crinière flamboyante du héron, la queue tortueuse du serpent, ou les
oreilles effarouchées du lapin nain. Je voyais venir le chi comme une sorte de
colonne verticale d’oxygène cosmique me ramonant le corps de la narine jusqu’à
l’Achille tendon où je ressentais, depuis peu, une légère pointe douloureuse
mais qui n’allait pas tarder, grâce au Taï Chi,
à disparaître corps et bien.
La remercierai-je jamais assez ?
Deviendrai-je pour elle, enfin, un peu moins chiant ? Regrimperai-je dans
son estime ? Regagnerai-je sa considération ?
8 commentaires:
Il est sans doute chiant,mais elle aussi.Je vois le genre. C'est genre :"mange moins de fromage, fais-toi de la truite fumée bio avec du fenouil ou de la mache! Ou bien choucroute et cornichons." J'en ai connu une qui avait même imposé du Bion 3 Senior et avait fait livrer sans prévenir un fauteuil Ikéa pour être bien installée avec chien et chats et du foin pour son mulet dans le jardin ! Là c'est vraiment le pompon !
Toutes des chipies je te dis !
Papy René
@ Papy Dieu m'préserve!
Il est chiant peut-être, mais de la à l'inscrire pour un cours sans lui demander son avis !Bah elle aurait bien du se douter qu'il n'irait pas ...
Et pis c'est tout . Non mais elle doit être chiante aussi ...
@ Brigitte Ne serait-on pas toujours le chiant de quelqu'un.e?
Elle accepte les équerres, la pulpeuse ?
@ M Bien longtemps que perso je ne les tiens plus, les équerres! Mais parle-t-on des mêmes?
Je ne sais pas ! Moi quand j'ai mal au dos, quand je mets une plombe pour monter une volée d'escaliers j'ai parfois l'impression d'en être une ! Loin de celle des gymnastes !
@M Donc c'est quand tu n'est pas d'équerre que tu en es une?
Allez comprendre...
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