24 septembre 2016

Le pays sage.


Pour Les impromptus littéraires de la semaine. La consigne voulait que dans le texte soient inclus les dix mots: boutoué, bât, bégayer, expansible, haï, motoculter, paradoxal, ponctionner, réoccitaniser, tubulaire…


C’est là que je viens réfléchir.
Je m’installe, me pose et regarde. Ça m’apaise, me distrait, me comble et m’inspire. Au début je fixe droit devant moi. Petit à petit apparaissent, au loin, au dessous du bleu souvent traversé de coton blanc immaculé, les courbes des montagnes du Semnoz, puis des Bauges, et du Roc des Bœufs. Alors le regard descend le long de la vallée d’Entrevernes, où je vois les colonnes montantes des fumées de cheminées de quelques fermes perdues sous le col de la Frasse, jusqu’au château Dhéré d’abord, si massif puis celui de Duingt qui trempe ses douves dans les bleus profonds du lac parcourus par les traces blanches des bateaux déchirant la surface miroitante, plane et tranquille…
Je me pose et je suis assis sur le ponton de Talloires, les pieds dans le bleu, un cygne blanc glissant à quelques mètres de moi sans me voir.
Je me pose et je ne suis plus là où je suis, je suis ailleurs, dans le cadre choisi, dans le paysage élu, je ne suis plus en moi, plus ici…
À chaque fois que j’en ai besoin, j’y reviens. Regarder, penser, attendre qu’une ampoule s’allume, qu’une voie s’ouvre, qu’une solution se dessine. Dès que j’ai une décision à prendre, un choix à faire, je viens là, je m’installe, je regarde et je suis rarement déçu.
Excepté ce matin là. Nous étions lundi, la veille le site des impromptus littéraires avaient publié leur thème pour la semaine, il fallait insérer dans le texte ces dix  mots : boutoué, bât, bégayer, expansible, haï, motoculter, paradoxal, ponctionner, réoccitaniser, tubulaire…
Et franchement cette semaine je ne savais pas par quel bout la prendre, la consigne…


Oups, done... Et dans l'ordre, en plus. Well done...


15 septembre 2016

Soixante quatorze.

Pour Les impromptus littéraires. Le thème était: A partir de cette citation de Henri-Frédéric Amiel "Chaque paysage est un état d'âme", j'aimerais que vous parliez de votre paysage et ou de vos paysages/état(s) d'âme.

À chaque fois que j’en ai besoin, je reviens là.
Je m’installe, me pose et regarde. Ça m’apaise, me distrait et me comble. Au début je fixe droit devant moi. Petit à petit apparaissent, au loin, au dessous du bleu, souvent parcouru de balles de coton blanc immaculé, les courbes des montagnes du Semnoz, puis du massif des Bauges, et, là-haut le sommet du Roc des Bœufs. Alors le regard descend le long de la vallée d’Entrevernes, où, par temps clair, je vois les colonnes montantes des fumées de cheminées de quelques fermes perdues sous le col de la Frasse, jusqu’au château Dhéré d’abord, si massif puis celui de Duingt qui trempe ses douves dans les bleus profonds du lac parcouru par les traces blanches des bateaux …
Alors, je passe des heures au dessus des alpages et des forêts sous mon aile orange,  à voler dans le jardin des buses et des choucas, dans les chuchotements chéris du vent sous la toile.
Je me pose et je suis assis sur le ponton de Talloires, les pieds dans le bleu, un cygne blanc glissant à quelques mètres de moi sans me voir.
Je me pose et je ne suis plus là où je suis, je suis ailleurs, dans le cadre choisi, dans le paysage élu, je ne suis plus en moi, plus ici…
Les planches de Talloires sont un ponton d’embarquement pour ailleurs, pour plus tard, juste pour rendre ici et maintenant supportable.
J’en ai besoin assez souvent en ce moment puisque je vais devoir passer deux ans là, sans espoir de sortir ailleurs que dans la cour de promenade où les murs sont si hauts, si gris.

Deux années entières, une peinture glauque, écaillée pour tout paysage, couloir B, deuxième étage, cellule 74.


Bang big.

Hier, je me suis désolé que le petit texte posté avant-hier "Présentable" n'ait reçu qu'UN seul commentaire. J'en ai été chagriné, grincheux, j'ai pesté, râlé, UN seul tu te rends compte, sur le milliers de lecteurs potentiels une seule a pris le temps de t'écrire un truc, c'est dire l'effet que tu leur a fait, t'es qu'un mauvais, t'es le dernier trou de la flute mon pauvre garçon... 
Et puis j'ai lu ça:


Comment l’Univers va-t-il mourir ?
LES COSMOLOGISTES sont comme des mages fascinants qui détiendraient les clés de l’Univers. Dans le monde scientifique, ils font partie des rares chercheurs qui, avec les paléoanthropologues et les archéologues, peuvent répondre aux nombreuses interrogations du grand public sur les origines de l’humanité. « D’où venons-nous ? », « Qu’est-ce que le Big Bang ? », « Y a-t-il eu quelque chose avant ? » font partie des questions qu’on leur pose le plus fréquemment. Mais, par rapport aux paléoanthropologues et aux archéologues qui, par définition, ont les pieds ancrés dans le passé, les cosmologistes peuvent répondre à une autre question tout aussi fascinante, celle de notre destin. De la même manière qu’ils ont calculé le passé de l’Univers en écrivant le scénario du Big Bang, ils peuvent déterminer son avenir. Que se passe-t-il si l’on applique les lois de la physique aux prochains milliards d’années ?

Il faut commencer par s’intéresser au plus fragile, notre petit coin d’Univers. D’ici 2 à 3 milliards d’années, notre galaxie, la Voie lactée, fusionnera ou commencera à fusionner avec ses voisines, les Petit et Grand Nuages de Magellan et surtout la galaxie d’Andromède. Etant donné les distances énormes qui séparent les étoiles les unes des autres, avec un peu de chance cela ne devrait pas avoir trop de conséquences sur notre Soleil et son cortège de planètes.
En revanche, dans 4 ou 5 milliards d’années, notre étoile entrera dans le dernier stade de son évolution. En ayant consommé l’hydrogène situé dans son cœur, l’astre de nos jours sera agité d’une courte série de soubresauts destinée à trouver d’autres sources de « carburant » pour ses réactions thermonucléaires. Il gonflera tel un ballon de baudruche pour se transformer en géante rouge, avalant Mercure et Vénus au passage. Tout à coup proche de la surface solaire, la Terre deviendra une fournaise infernale puisque la température à sa surface s’y élèvera de plus de 1 700°C. Puis le Soleil éjectera une partie de sa substance dans l’espace pour se transformer en une naine blanche, un cadavre d’étoile inactif mais encore chaud.
Trois scénarios
Mais le cosmos ne mourra pas avec cette minuscule poussière qu’est la Terre. Les cosmologistes savent bien que 5 milliards d’années, ce n’est en réalité que… du court terme. L’avenir de l’Univers se jouera avec beaucoup plus de zéros au compteur des années. Pour ce qui est de la suite, les chercheurs ont longtemps hésité entre trois scénarios, ne sachant pas trop comment l’expansion de l’Univers risquait de se comporter. Soit – premier cas de figure – la gravité l’emportait et l’expansion se transformait en contraction. Au bout du compte, le cosmos se ratatinait de plus en plus vite et tout se terminait dans l’inverse du Big Bang, un Big Crunch, un effondrement total de l’espace, de la matière et du temps en un point. Soit, deuxième possibilité, la gravité ralentissait l’expansion de l’Univers de plus en plus, mais sans jamais pouvoir inverser le mouvement et le cosmos connaissait une vieillesse longue et tranquille, dans un paysage quasi-inchangé, attendant simplement que toutes ses ressources s’épuisent. Soit, troisième et dernier scénario, la gravité perdait le combat et l’expansion de l’Univers s’accélérait.
On sait, depuis 1998, que ce scénario est en train de se produire, sous l’action d’une mystérieuse énergie sombre à effet répulsif. Comment cela va-t-il se traduire ? Dans un premier temps, il ne se passera rien de particulier. Les galaxies du Groupe local (qui inclut la Voie lactée et la galaxie d’Andromède) continueront à fusionner doucement, les unes après les autres. Les nuages de gaz présents dans les galaxies, réensemencés en éléments lourds par les explosions d’étoiles mourantes, continueront de se contracter pour donner de nouvelles étoiles et de nouveaux systèmes planétaires. Les plus petites des étoiles ne nécessitant pas de grandes quantités de matière pour se former et ayant des durées de vie de plusieurs milliers de milliards d’années, il se passera environ 100 000 milliards d’années avant d’arriver au bout de ce que les astrophysiciens appellent l’ère stellaire, dans laquelle nous sommes entrés environ 100 millions d’années après le Big Bang.
Petit à petit, le ciel s’assombrira. Cela se fera d’abord de manière insidieuse. En raison de l’expansion accélérée du cosmos, toutes les galaxies avec lesquelles la future super-Voie lactée n’entretiendra aucun lien gravitationnel sortiront une à une de notre champ de vision, tombant hors de l’Univers observable. Puis, les étoiles de la galaxie mourront les unes après les autres et s’éteindront comme si l’on soufflait lentement toutes les bougies d’un gigantesque gateau d’anniversaire. Si l’on fait exception des naines brunes, ces étoiles avortées qui n’ont pas atteint la masse critique pour déclencher en elles le feu thermonucléaire, tous les autres objets massifs de la galaxie seront des cadavres d’étoiles : naines blanches pour les plus chauds, naines noires pour les plus froids, étoiles à neutrons, trous noirs.
Les trous noirs s’évaporent
On pourrait croire qu’il n’y a plus guère d’évolution possible mais, comme c’est le cas avec les cadavres d’animaux, il existe des charognards cosmiques : ce sont les trous noirs. Dans les galaxies, les étoiles, mêmes mortes, continuent de se mouvoir, de se croiser et de perturber les trajectoires de leurs voisines. Certaines finissent par être éjectées tandis que d’autres se rapprochent du centre galactique, où trône généralement un trou noir supermassif. Plus le temps passe, plus ce phénomène s’accélère. De plus en plus d’astres errent dans le vide intergalactique et les trous noirs centraux grossissent.
Selon certains chercheurs, tout cela n’aura qu’un temps car ni la matière ni les trous noirs ne sont immortels. Dans environ 10 millions de milliards de milliards de milliards d’années (un 1 suivi de 34 zéros, qui se note 1034), les protons situés dans les noyaux atomiques commenceront à se désintégrer en particules plus petites. Comme les neutrons solitaires ont une espérance de vie d’environ dix minutes, la matière des étoiles à neutrons, des naines brunes, blanches ou noires se désagrégera. Il ne restera plus que les trous noirs.
On a coutume de dire que rien n’en sort, pas même la lumière. En réalité, un rayonnement extraordinairement faible, né de fluctuations microscopiques, s’en échappe. Il porte le nom du cosmologiste britannique Stephen Hawking qui l’a prédit. En temps normal, ce phénomène ne peut se voir car le trou noir absorbe beaucoup plus qu’il n’émet. Mais, une fois entouré par le vide, le trou noir ne pourra rien faire d’autre que s’évaporer très lentement. Si lentement qu’il faudra probablement plus de 10100 ans (un 1 suivi de 100 zéros !) à tous les trous noirs de l’Univers pour restituer leur masse sous forme de rayonnement Hawking.
La grande déchirure
Le cosmos entrera alors dans l’âge des ténèbres. A partir de ce moment très lointain, il ne contiendra rien d’autre que la matière noire – qui compte actuellement pour 27 % du contenu de l’Univers et dont on ignore la nature –, des particules immortelles comme les électrons et leurs antiparticules et des photons, des grains d’énergie. Cet état est celui de la mort thermique de l’Univers, imaginé par Lord Kelvin, physicien britannique, dès le milieu du XIXe siècle.
Un scénario alternatif à cette longue agonie a été imaginé en 2003 par trois chercheurs américains, Robert Caldwell, Marc Kamionkowski et Nevin Weiberg. Il n’est pas moins dramatique mais a le mérite d’abréger les souffrances cosmiques. Cette hypothèse du « big rip » (la grande déchirure en français) s’appuie sur l’idée que l’énergie noire augmente au cours du temps et que l’accélération de l’expansion de l’Univers… s’accélère. Comme le résume le cosmologiste français Jean-Pierre Luminet dans Le destin de l’Univers, « toute la matière de l’Univers, même les atomes, sera déchirée par la dilatation de l’espace. D’après le scénario le plus pessimiste, cet événement se produirait dans 22 milliards d’années. (…) Environ 60 millions d’années avant le big rip, la gravité sera trop faible pour maintenir la cohésion de notre galaxie, qui se dispersera ; trois mois avant le big rip, le système solaire sera déchiré ; dans les dernières minutes, étoiles et planètes seront déchiquetées, et 10-19 seconde avant, les atomes et les noyaux seront détruits, laissant un Univers vide et sans aucune structure. »

Pour l’heure, rien ne laisse supposer que l’énergie noire augmentera ainsi et ce scénario demeure spéculatif. Néanmoins, tout comme celui de la mort thermique de l’Univers, il a le mérite de montrer que la matière et l’espace ne sont pas les notions intangibles auxquelles la vie à notre échelle d’humains nous a habitués.

Alors, je me suis senti de suite  un peu mieux...

10 septembre 2016

Présentable.

Chaque matin et chaque soir on perdait un peu de lumière, Août n'était plus qu'une grappe déjà lointaine de jolis souvenirs, les vacances étaient redevenues une attente, bref, on s’avançait gentiment vers l’automne.
Il fallait n’avoir jamais quitté de sa vie le centre ville pour ne pas s’en apercevoir. Même ceux qui habitaient en banlieue s’en étaient fait la remarque. Alors, vers chez nous...
Si, au beau milieu du jour, la chaleur était encore écrasante, davantage qu’en Août, puisque même les lézards cherchaient l'ombre pour s'ensiester, désormais les petits matins pouvaient être noyés dans les bancs d’une brume légère, à peine posée sur les terres labourées de près. Maintenant, enfin rassasiées, comblées, satisfaites, la plupart des cigales avaient tiré le rideau rouge, le cœur des nuits flirtait à la limite du frais, obligeant à se couvrir les jambes au premier réveil, certaines feuilles du figuier, qui avait tant donné, étaient devenues jaunes en une nuit. Dans les champs poussiéreux du manque d’eau, où les tournesols avaient été coupés, la terre se fendait de longue,  à cause du sec, sur les étagères de la cave les bocaux de confitures étaient à nouveau pleins, les écorchures des bras,  traces vives de la récolte de mûres des ronciers du bord des routes, commençaient à guérir. Le soir, au dessert, sur la terrasse, si tu voulais encore pouvoir trier dans ton assiette,  il fallait se mettre à table un peu plus tôt.  La nuit, si les filantes avaient fini de laisser leurs traces dans le noir, les étoiles brillaient comme des souvenirs heureux. Le jour, dans les rues, les rires encartablés passaient, en bandes, à heures fixes, dans les ruelles du village endormi, on pouvait entendre la cloche de l’école sonner les heures des récréations et libérer les cris des enfants, qui s'ennuyaient assis, contraints, de trop  longues heures. Dans les maisons, aux volets fermés, on n’avait pas encore vraiment rangé les serviettes de bains aux fonds des placards, elles restaient là, sur une chaise, lavées, pliées mais à portée de dos au cas où un dernier jour à la mer s’organiserait sans crier gare. Dans les vignes, si les rangées, comme les grappes, devenaient noires c’était aussi de monde, tous avec un sécateur à la main attendant le début des vendanges. Au marché du samedi, malgré le desséchant manque de pluie, on commençait à voir les premiers champignons débarquer d’Italie, de Roumanie enfin de ces pays où, là-bas, peuchère, il avait enfin plu…

On allait entrer dans l’automne et, d’après ce que m'avait laissé entendre mon petit doigt, ce n’était pas encore pour bientôt que tu poserais tes valises devant de la porte de la maison, avant d’appuyer sur la sonnette,  ni que je vienne t'ouvrir avec un large sourire…
Il avait même ajouté, ne mâchant pas ses mots, ce salopard, qu'en vrai je pouvais toujours me brosser.
Ce que dans le fond...  j'allais faire.  
On ne peut raisonnablement pas prévoir ce que l'avenir nous réserve:  AVC ou coup de foudre? 
Dans les deux cas, Il faut penser à rester... présentable.








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