26 février 2012

Onzième fin de semaine.

Cette semaine, comme tous les matins je me suis, au réviel, comme un jus de vitamine C, régalé à la lecture des trois "phrases" d'Eric Chevillard qui sont à chaque fois des perles d'humour profond. Ainsi, la 1499:

– C’est qu’il faut en coudre, des paupières, pour se faire un bon pyjama !
Voilà tout ce que le tueur en série Frankie Pâtisson, dit le Dormeur, a trouvé à dire pour justifier ses six cent vingt-trois meurtres.

bêtement cloué sur la piste
l’avaleur de sabre
contorsionniste

(Nous apprenons à l’instant l’évasion de Frankie Pâtisson, dit le Dormeur. L’homme est dangereux. Il lui reste à faire les manches.)

Cette semaine je me suis réjoui de n'avoir pas croisé la vie de Carole Bouquet. Ainsi nous n'avons pas eu à nous abîmer dans les reproches...

J'ai eu une illumination. Je me suis dit que l'affaire DSK à new York était en fait un sauvetage de la gauche comme un comportement sacrificiel de Dominique. En effet, sachant qu'il serait impliqué un jour ou l'autre pour ses moeurs, disons volages, il a souhaité se faire prendre bien avant que la campagne démarre de manière à ce que la gauche ait le temps de se reprendre puis de proposer un autre candidat et de n'être pas, ainsi, mêlée à ce bazar. Finalement, il aurait sacrément réussi son coup. 
Si l'on peut dire...
Cette semaine, je suis allé voir La taupe... A-t-on jamais vu une taupe? Des taupinières oui, comme de petits terrils dérangeant le vert d'une pelouse mais des taupes? Autant vous dire de suite que je n'ai absolument rien compris à cette histoire d'agents troubles, où tout le monde craint tout le monde, où chacun est une menace pour chacun, mais dès que j'ai absolument renoncé à comprendre quoi que ce soit, je me suis laissé emmener par l'ambiance extrêmement poussiéreuse et cette caméra qui n'est JAMAIS immobile mais qui avance toujours à chaque plan comme une cuillère s'enfonce doucettement dans un pot de mélasse... Ça doit vouloir dire quelque chose...


Je suis allé m'entrister au spectacle du film: Les nouveaux chiens de garde. J'ai eu honte pour eux, les cités. Honte pour leurs connivences, leurs entre soi, leurs complicités, leurs triplicités. Je ne peux plus les voir sans avoir honte de ce qu'ils sont, de ce qu'ils disent, de ce qu'ils véhiculent, de ce qu'ils transmettent. C'est sans doute excessif, mais c'est.
J'ai la honte facile, il m'arrive de ne pas regarder certains humoristes jusqu'au bout de leurs sketches: J'ai tellement peur pour eux qu'ils ne soient pas drôles...


J'ai pleuré dans ma voiture en écoutant la voix et les dires  de Marceline Loridan Ivens témoignant sur ce qu'elle a survécu dans les quatre Camps où elle a été déportée... Je vais lire le livre qu'elle venait présenter au grand entretien de France Inter: Ma vie balagan.
Le balagan c'est le bazar, le désordre, le bordel quoi...

Et pour les syriens? On fait quelque chose? Ou pas.

Ce samedi, bien que je sorte de chez le carrossier avec une bagnole flambant neuve, bien que le type soit au volant d'un quatre quatre baleinien, bien que je me sois arrêté au carrefour, bien qu'il se soit arrêté lui aussi, bien qu'il ait redémarré, bien qu'il soit venu encastrer mon engin tout neuf, bien qu'il m'ait semblé qu'il n'avait pas bu que de l'eau, je n'en ai pas trop voulu au très vieux monsieur... Envie de lui bouffer son permis oui, mais j'avais un train à prendre pour venir fêter la déjà première année sur terre de Samuel le Magnifique et donc pas de temps à perdre, ni dans la colère, ni dans le ressentiment... D'un seul morceau, son permis...

Et voilà, elle est désormais, cette semaine comme les autres, passée, racontée, rangée et partagée...

23 février 2012

Garder la main sur son sac de voyage.

Seul dans cette île, voilà trois jours qu’il se gavait de couchants à tomber, en voilà quatre qu’il se régalait d’aubes magnifiques, qu'il se payait des bleus de nuages pavés, des cieux d’outre envie et des landes décoiffées par les vents… Enfin, il prenait d'elle comme à chaque fois qu'il y amenait son âme, il s'offrait un avant goût de paradis. Entre les merveilles du matin, du midi et du soir, il passait le temps à arpenter de longs en larges les miroirs des marais, à se repaître du spectacle des hérons dansant dans les douces  lumières d'un été finissant….
Les autres étaient rentrés au chagrin, pas lui. Il avait joué les prolongations, pour quelques jours. Il s’était offert l’illusion qu’il allait rester là tout un hiver… On était en Septembre et l’idée de poursuivre la vie ici jusqu’à Noël le plongeait dans un bain soyeux de bulles douces. La solitude ne lui faisait pas peur. Il s’entendait plutôt bien avec elle. Il finissait après quelques jours par parler tout seul mais à voix basse. Il avait toujours un livre à portée de main qu’il lisait, cette fois à voix haute mais surtout il y avait ces paysages comme des compagnons. Alors, quand il s’ennuyait un peu, il allait leur rendre visite comme on débarque à l’improviste chez des amis, pour partager un verre,  une conversation ou mieux : des silences.
Ici, dans certains endroits de l’île, on pouvait tourner la tête sur trois cent soixante degrés et découvrir encore des choses à voir. Il fallait ne pas craindre les torticolis… voilà tout. Ici, le ciel était une partie du paysage, Il changeait à la vitesse des vents. Tu regardais cinq minutes tes lacets défaits, tu levais la tête et, clic,  tu en avais un autre sous les yeux. Tu partais sous une pluie battante, tu arrivais au plein dessous d’un arc en ciel. Un ciel de surprises et d’étonnements. Clac, à cette allure là !
Le ciel variait comme des vols de papillons. Ce matin là, il était venu rôder au levant près des marais de la Houssière. Il était sorti de la bagnole malgré les lancers de couteaux d’un force cinq venant droit d’Amérique. Il avait posé ses regards sur le ciel de traîne qui dessinait dans le bleu des balles de cotons comme des trains de cargos blancs. Il était émerveillé. Mais le froid a vite eu raison de son plaisir. Il est rentré dans son engin et a tourné le bouton de la radio. Un type s’est mis à chanter. C’est ça qui l’a décidé.
Le temps de la chanson, il était à la maison. Il a attrapé vite fait quelques affaires qu’il a enfouies dans son sac de voyage, il a fermé l’eau, le gaz,  les portes et les volets. Il a balancé le sac poubelle dans la poubelle et refermé le portail.
Il a calculé que s’il se démerdait bien, s’il n’avait pas trop d’embouteillages ce soir en arrivant vers la capitale, il pourrait  être à la sortie de son boulot.
Il allait lui faire la surprise de venir la chercher. Ils iraient ensuite manger ensemble dans un restaurant du quartier. Ensemble, ils seraient juste ensemble. Et ça n'aurait pas été prévu. 
Aucun paysage au monde ne console d’y être seul. Voilà ce qu’il s’est dit tout le temps du trajet. Il a passé une journée magnifique parce que cette fois, il était pile à l’endroit où il voulait être. En route vers celle qu’il aimait. Il est arrivé à la bonne heure, il a garé l’engin près de la sortie. Il est sorti s’en fumer une. Puis il l’a vue. Puis il a vu son sourire le voyant. Qu’est-ce-que tu fais là, toi ? C’est tout ce qu’elle lui a dit ce soir là en le serrant dans ses bras. Elle semblait heureuse de le voir et l’embrasser. Heureuse et à peine surprise.
Ce qu’il ne savait pas encore, c’est que c’est à l'instant de cette embrassade précisément, qu’il l’a perdue. Comme souvent, le fluide s'est mis à fuir quand elle a compris qu’il lui était profondément attaché, quand elle a su comme on dit qu'il lui appartenait... En créant l'évènement de sa présence, en ayant abandonné l'île pour elle, il lui en avait  apporté la preuve... Il avait creusé de ses propres impatiences le gouffre qui allait l'ensevelir...
Alors, ami explorateur qui voudrait t’engager sur la voie, somme toute, délicate de la vie de couple, accepte de lire sans loucher ces quelques conseils de base si tu veux pouvoir espérer que votre balade à deux dure un peu, un peu plus que les six mois à venir. 
Si tu veux te donner une chance de rester ensemble, toi, garde une main, un oeil, une pensée sur ton sac de voyage. Tant que tu y es, ne  t’effondre jamais dans le canapé, ne mets jamais tes pieds sur la table basse, encore moins dans des pantoufles de laine, n'enfile jamais un vieux survêtement pour bricoler, du reste évite le bricolage, ferme la porte des toilettes quand tu y vas, regarde si tu n’as rien laissé au fond de la baignoire, ne fais jamais comme si tu étais chez toi, surtout si tu es chez toi, pense à toujours avoir le réservoir plein dans ta bagnole, lave ta tasse après avoir bu ton café, fais, à chaque fois que tu sors comme si tu n’allais pas revenir, emporte toujours tes papiers, sors chercher le pain comme si tu déménageais. Dis toi que quand tu reviens, les serrures ont peut-être été changées...
Si tu fais tout ça tu as une chance de n’être pas surpris le jour où …
Laisse toujours planer un petit doute... Le doute est un ciment...
Et enfin, le dernier conseil, il est de Claude Roy et c’est le meilleur :
"Si tu dois aimer, essaie d’aimer toujours qui tu aimeras quand tu ne l’aimeras plus…"
___ Dis donc, Il y en a qui ne manquent pas d'air! Tu fais drôlement  bien de vaporiser  des conseils, toi! Vrai que t'es super balèze en vie de couple, cousin. Tu en connais un rayon, un expert, une pointure, à ce qu'on dit!  Tu devrais monter un cabinet de thérapie de couple, tiens! Dis, rappelle moi un peu depuis combien de temps tu vis seul, qu'on s'amuse?
___ Oh ça va le rabat-joie, on t'a rien demandé! Tu sais, quand même, qu'il n'y a pas de meilleur prof qu'un ancien cancre, tu le sais ça?



19 février 2012

Fin de semaine . Dix.

Cette semaine je suis allé voir Louise Wimmer et j'ai aimé ce film surtout parce que Louise n'y est pas une aimable mielleuse mais plutôt un femme à fleur de manque de pot qui se bat, résiste et surtout reste intègre et digne... Un personnage de feu incarné fiévreusement par Corinne Masiero!
Et, cerise, sur le générique de fin, une version de The day of Pearly Spencer de Rodolphe Burger qui vaut le déplacement...


Cette semaine, j'ai été profondément heureux de n'avoir jamais rencontré Juliette Binoche. Ainsi, nous n'avons pas eu à prendre la décision de nous séparer... 
Cette semaine, j'ai encore vérifié une chose. On dit que les mots peuvent tuer mais les chiffres aussi. Notre encore président qui semble être arrivé de ce matin, est au pouvoir (ministères compris) depuis... 1993. Cela fait dix neuf ans qu'il influe au plus haut niveau sur la politique française, que ses décisions ont des répercussions sur la société française, sur ce que nous vivons aujourd'hui... Dix neuf ans...
Ca n'appelle pas un petit bilan riquiqui ça, DIX NEUF ANS. Et le voilà maintenant qu'il se pose en candidat anti-système. S'il n'existait pas, lui, il ne faudrait pas l'inventer!
C'est pour cette raison que j'ai beaucoup aimé cette image:


Image prise, parait-il en mer Egée qui décidément ne porte pas chance en ce moment puisqu'un yacht appartenant à un loup d'affaire français (qui doit une partie de sa fortune à l'autorisation sur les paris en ligne en 2007...) y a coulé cette semaine... (Si jamais vous étiez intéressé, le prix de la location est de  378.OOO euros par semaine. Une paille!) Certains, comme Louise dorment dans leurs voitures et d'autres voient leurs yachts couler... Chacun sa mer.

Maintenant qu'elle nous fond la paix, on peut lire avec plaisir un poème de Claude Roy qui lui est dédié...

Au loin.

Très attentivement la neige fait ton lit
et borde tes soucis dans des draps de silence,
dans leur creux de sommeil où tu vogues la nuit
en comptant les flocons de la neige d'absence.

Ma navigante enfant plus loin que cette neige,
au jeu de ciel et blanc je te donne la main.
Les anges de la glace ont des mains qui allègent
le long chemin neigeux qui conduit à demain.

Comme elle n'aurait pas été complète, cette semaine, sans un vague emmerdement. Il s'est dépêché d'arriver vers la fin, comme pour couronner, le dimanche, quand je revenais du marché: Je n'ai pas levé assez haute la jambe. J'ai manqué une bordure de trottoir, perdu l'équilibre, tenté de le récupérer, échoué... Je me suis étalé de tout mon long comme une bouse bien flasque. En plein milieu de la foule... Bien sûr que j'ai, en arrivant au sol, écrasé comme des galettes bretonnes quatre pauvres nems aux légumes et la barquette plastique de riz cantonais que je venais d'acheter. Oui, les deux petits sachets de sauce soja que j'avais au bout du bras dans un sac plastique ont évidemment éclaté sous le choc et... ma polaire. Je me suis également ruiné les deux paumes des mains puisqu'elles m'ont piteusement servi de train d'atterrissage et un genou qui, lui, n'avait rien compris à toute l'histoire mais s'était contenté de suivre le mouvement... Est-il bien utile de préciser que mon dos n'a pas aimé du tout le traitement?
Non, rien au col du fémur. Merci de vous inquiéter.
Ce dimanche, avec le marché, j'aurais mieux fait de faire:


Elle est désormais, cette semaine, comme les autres puisque vécue, racontée, passée, rangée et franchement, celle-là non plus, je ne la fleurirai pas.

18 février 2012

Bientôt, la course...

Ce qui est grand et fort décline
Ce qui est tendre et faible prospère.
Lao Tseu.

Franchement quand l’autre s’est mis à claironner partout qu’il allait gagner, on a commencé par sourire...

Oh pas bien longtemps, juste après on s’est dit : Ce n’est pas seulement lui qui risque de la gagner, cette course, le certain c’est que nous tous nous allons y perdre. Il y avait des risques, ça nous a coincé le sourire.
L’hiver s’était pourtant passé dans un calme relatif. Les tenues de compétition étaient restées gentiment baignées dans les senteurs de naphtaline et de talc mêlés, les marchands de cravates bleues avaient très peu battu leur beurre, les coiffeurs avaient patiemment aiguisé leurs ciseaux et dans les arrières cours, les pom pom boys avaient avait sagement poli les slogans qui allaient servir. Bien sûr, il y avait eu,  dans le courant tranquille des ces temps paisibles, de ci, de là, quelques escarmouches, une ou deux piques réservées aux initiés, de légers galops d’essais mais juste pour débourrer les bêtes, qu’elles ne restent pas inactives, pour occuper le terrain. Rien de bien tranchant, rien encore de bien affirmé. Eviter l’ankylose, l’inaction, le repos. Une routine, un entraînement de demi-saison, histoire de garder la ligne, d’entretenir les musculatures, de souffler sur les braises avec délicatesse, que le feu ne meure pas étouffé par les chintz soyeux des molles indolences.
Mais là, avec ces affiches dont la colle était à peine sèche, on pénétrait dans le vif du sujet, on commençait à grignoter le gras du jambon, on se remettait à effiler les lames, on dégrippait les boites à gifles, on lustrait les peaux de banane, on minait les sentiers, on s’affûtait les biceps, on se remettait les insultes en bouche, on affinait les dossiers accablants, bref on se préparait gentiment à en découdre... Bientôt la course.
Dès maintenant, on commençait à avoir une idée assez précise des équipes qui allaient s’affronter, la période des transferts étant presque terminée. On devinait déjà les forces en présence, les ambitions et les moyens de chacun (le chic étant bien sûr de se donner les moyens de ses ambitions quitte à arranger un peu les comptes). Il y aurait quelques ralliements de dernière heure, quelques virements de bords surprenants, quelques trahisons de dernières secondes mais pour le gros des armées on savait à quoi s’en tenir. Les participants étaient ils engagés sérieusement dans les équipes correspondant à leurs choix profonds ? Que nenni, il eût fallu pour cela qu’ils aient des choix profonds et pas des vagues idées de surface. Et puis penser que cela avait une importance c’était croire naïvement à la droiture, à la fidélité, à la rigueur, au sens moral enfin à un de ces trucs dans le genre... Pour ce qui était de ces valeurs, il fallait se résigner. C’était bel et bien oublié. Tout ça c’était bon pour les zozos naïfs. Tordu était l’épithète en vogue.
Finies, les lignes droites, les chemins rectilignes, on était dans le monde des zig zags, des courbes et des lacets.
Alors, bien entendu, toutes les équipes ou presque étaient sincères, mais était-ce vraiment un certificat ? N’a-t-on jamais connu de crapules sincères ?
On s’était donc bien, ici ou là, sincèrement appuyé sur quelques mensonges, on avait bien drapé quelques filouteries dans la soie doucereuse des enthousiasmes, on avait dissimulé de mignonnes entourloupes sous l’or flamboyant des intentions, on avait sans vergogne aucune trouvé les moyens de justifier allégrement l’injustifiable.
Alors bien sûr, presque toutes les équipes étaient vertueuses et poussaient devant elles des tombereaux farcis d’idéals valeureux, mais brandir UNE valeur donne quel droit ?
Cela suffisait-il pour s’autoriser à courir ? Il fallait croire que oui, elles étaient si nombreuses à lorgner le blanc de la ligne.
D’où, donc venait cette impérieuse nécessité ? Les premières réponses qu’on pouvait entendre n’étaient pas tout à fait convaincantes... Elles disaient : «  C’est pas pour nous qu’on veut galoper, c’est pour les autres, pour le pays, pour ceux qui n’ont pas la parole... » Tu parles Charles. Une chose était certaine, une seule, ce n’est pas pour le bonheur du taureau qu’on le jette dans l’arène et finalement, il n’y aurait rien de choquant là-dedans tant il est vrai que TOUT ce qu’on fait on le fait d’abord pour soi-même. Encore faudrait-il l’annoncer clairement. Ah ! Ah ! Un coureur qui dirait en préambule : Je cours d’abord pour mon égo, parce que j’ai le cœur chaviré de monter aux créneaux, l’étendard brandi, poussé par les souffles puissants de mes fans ébahis, parce que je suis convaincu de mon national destin gnin gnin gnin, parce que je le vaux bien, gnin gnin, celui là commencerait par une vérité.
Ca ne le rendrait pas davantage sympathique mais ça aurait le mérite d’être clair, de mettre un peu de lumière dans tout ce bazar.
Malheureusement tous ou presque se cachaient derrière le bien commun et, au fond cette course n’intéressait plus que les coureurs eux-mêmes et peut-être leurs mères dont on ne disait pas assez de quels aveuglements elles étaient capable quand ils s’agissait de la chair de leur chair... C’est aussi pour cette raison que les spectateurs étaient de moins en moins nombreux. Les plus lucides dressaient ce constat terrible la voix blanche de colère. Mais dans ce pays, une voix blanche n’était pas comptée. Une d’accord, mais cent, mille cent dix mille, si on se mettait à les rassembler ? Tout ce silence finirait peut-être par devenir un léger murmure, non?
Et puis, le plus teigneux d’entre tous avait fini par se déclarer candidat…
Alors, cette course allait avoir lieu et quoi faire qui soit à peu près juste ?
Peut-être fallait-il ne pas en être ? Qu’ils se dépatouillent entre eux... Ne jamais oublier que dans un combat chaque coup que tu portes, c’est à toi que tu l’assènes et qu’à tirer dans tous les coins on finit forcément par se tirer dans les fesses. Préférer toujours la modestie à l’arrogance, la raison au magique, la sérénité à l’affrontement, la droiture à la fourberie, la fidélité à l’inconstance, le juste à l’inique et ainsi s’espérer digne face à l’indigne. Perdant, peut-être, mais digne. Digne.
Peut-il y avoir quelconque honte à ne pas courir quand la course semble douteuse ?
Alors, on regarderait de loin les coups échangés, on compterait les points, on prierait sans doute pour le salut des blessés, mais on ne serait pas éclaboussés, salis par les manœuvres vachardes, les annonces tapageuses, les cris d’orfraie, les filouteries glauques, les promesses impossibles, les revirements de veste. Sans espoir, aucun. Tout ça, on le laisserait à la horde des coureurs, aux escouades des entraîneurs, aux équipes de leurs fans beuglant. Et c’est la voix blanchie d’une colère légitime qu’on n’y participerait peut-être pas.
Mais il y avait une chose, une seule à ne jamais laisser de côté et qui, bien entendu, le serait:
Le seul enjeu véritable de cette course était l’existence de tous ceux qui n’avaient même plus de quoi se payer une place au stade…




12 février 2012

Fin de semaine. La neuf.

Cette semaine j'ai vérifié que vivre dans un petit village vaut mieux qu'habiter en capitale. Dix neuf heures... Mardi, un bain chaud se prépare et puis catastrophe le robinet pète. Je me retrouve avec une cascade dans la salle de bain. Après avoir tenté, sans réussir, de colmater tout ça, j'appelle au téléphone un plombier du village. Une demi heure plus tard, il était là, une clé anglaise à la main et posait des bouchons aux robinets. On verra demain pour payer...
Imaginez la scène à Paris...
Deux jours après j'avais récupéré l'eau chaude, le samedi matin, je l'avais reperdue... Mais le plombier n'y était pour rien... Le dégel est prévu pour quand? En attendant, ce dimanche, j'ai allumé un barbecue dans le garage, dans l'espoir de faire remonter un peu les températures... Ça a fait pas mal de fumée mais ça n'a rien dégelé...
Et l'autre secrétaire d'état qui, par ce froid, recommande aux SDF de rester chez eux...
SDF le texte d'Allain Leprest mis en musique par Romain Didier:


J'aim'rais qu'çà cesse – esse - esse
De s'dégrader – der – der
Sans un bénef – ef – ef
S.D.F.

Ce qui me blesse – esse - esse
C'est d'être soldé – dé – dé
Pour pas bézef – ef – ef
S.D.F.

J'ai pas d'adresse – esse - esse
Rien à garder – der – der
J'ai pas l'téleph – eph – eph
S.D.F.

Rien dans la caisse – aisse - aisse
Rien à fonder – der – der
J'ai pas d'sous-chef – ef – ef
S.D.F.

On me rabaisse – aisse - aisse
On veut m'céder – der – der
En bas-relief – ef – ef
S.D.F.

La politesse – esse - esse
Rien à glander – der – der
J'dis çà en bref – ef – ef
S.D.F.

M'am' la Comtesse – esse - esse
Ne m'en gardez – dez – dez
Aucun grief – ef – ef
S.D.F.

J'ai trop d'paresse – esse - esse
Pour musarder – der – der
Dans votre fief – ef – ef
S.D.F.

Chacun sa Messe – esse - esse
Et ses idées – dées – dées
Chacun sa nef – ef – ef
S.D.F.

C'est ainsi qu'naissent – aissent - aissent
Des Jésus, des – des – des
Marie-Joseph – eph – eph
S.D.F.

Pour qu'on s'redresse – esse - esse
C'est l'verbe aider – der – der
Qu'il faut qu'on s'greffe – effe – effe
S.D.F.

Allez, j'vous laisse – aisse - aisse
J'vai jouer aux dés – dés – dés
Chez l'père Youssef – ef – ef
S.D.F.

Allez, j'vous laisse – aisse - aisse
J'vai jouer aux dés – dés – dés
Chez l'père Youssef – ef – ef

S.D.F. ..

Nora Berra. C'est le nom de la secrétaire d'Etat... Dire qu'on ne se souviendra d'elle que par ce conseil... Et dans conseil il y a seil...

J'ai vu Millénium. C'est un film long mais qui tient éveillé. Le froid qui y règne sans doute... Et puis, je ne l'ai pas trouvé si bête l'idée de Lisbeth... Pour punir les violeurs...



J'ai mesuré le fossé entre la gendarmerie et la police nationale. Après le vol de mon appareil j'ai besoin d'une plainte déposée pour tenter de faire jouer mon assurance. Je téléphone donc à la gendarmerie du coin pour savoir où je dois m'adresser pour un dépôt de plainte. La réponse vient directe: "C'est à la police nationale. Insistez ils vont vous envoyer paître, il faut insister et s'ils ne veulent vraiment pas la prendre, venez nous voir. On le fera mais vous, insistez..."
Je vais insister, donc. Ils ont enfin pris ma plainte mais après m'avoir fait patienter trois bonnes heures. Trois...
Une forme de lutte contre la délinquance: Pas de plainte pas de délinquance. CQFD. Une idée d'une civilisation supérieure, sans doute...

Cette semaine, outre-atlantique, une voix s'est noyée dans une baignoire: "Whitney, Whitney... you ave a problem..."

Je n'ai trouvé que ça pour détendre l'atmosphère... puisqu'il parait que les douches froides resserrent les tissus...


Bref une semaine désormais comme les autres puisque terminée, racontée, rangée, passée...

05 février 2012

Fin de semaine. Huit.

Cette semaine, une petite crapule a volé l'appareil que je m'étais offert l'an passé... Avec huit cent photos dans la carte mémoire... J'en ai été attristé, je l'ai vécu comme une trahison, mais j'ai eu également la preuve de n'avoir pas perdu toute ma crétine naïveté... Ce n'est pas une consolation mais je sais, à mes dépens, que je ne suis pas dans la méfiance. Pas encore.
Voilà une des dernières qu'il a pris avant de disparaître dans la poche d'un autre. Sur les hauteurs de Saumane, du bleu après le blanc.


J'ai trouvé par hasard une image et oui, mon petit Samuel, que les choses soient bien claires entre nous: C'est bien cet engin que j'ai conduit de suite après avoir passé mon permis. Et oui, mon Samuel, je suis vieux à ce point là!
C'était la voiture de ton... arrière-grand mère. Quelques jours après, elle, la Dauphine, avait les DEUX côtés gauche et droit enfoncés, j'avais cru pouvoir passer entre DEUX bus... Je m'étais trompé dans les grandes largeurs.


J'ai trouvé comment occuper une matinée de repos. Vendredi matin, ma p....n de bagnole n'a pas supporté le froid: batterie à plat. En acheter une autre? De batterie, pas de voiture... Oui, mais aller la chercher comment puisque plus de véhicule? En motocyclette, évidemment. Hé bien ceux qui disent qu'il caille ces jours derniers ne mentent pas... Je vous laisse imaginer le retour. Vingt cinq kilomètres comme  un plongeon dans un congélateur venté avec une batterie de vingt kilos sur le porte bagage... Un extrait de film kirghize en noir et blanc, une métaphore douloureuse de la vie qui serait un combat contre les  éléments dans une steppe aride... Bref, cette petite ballade rafraîchissante m'a pris la matinée...
(Je n'évoquerais même pas le prix de la batterie...).
Heureusement qu'avec le froid qu'il fait que, comme l'avait promis le Président, depuis deux ans plus personne n'est obligé de dormir dehors...

J'ai aimé ces portraits comme des calligraphies, des souffles précis: Extrait:
Jean-René.
"Deux fois par jour, je le croise. 
Debout au bord de la route, planté en tronc d'arbre. 
Raide, comme un saint de bois. C'est un homme parce qu'il y a les jambes, les bras et même un prénom: 
Jean-René.
Autrement, rien pour le faire remarquer.
Tout du bâton vêtu."
Ce sont les phrases de Gilbert Léautier dans un livre au titre superbe: Pouvez vous prouver que vous n'êtes pas un escargot? Portraits cévenols. Editions Alcide.

J'ai encore lu avec effroi la tragique litanie des décomptes macabres venant de Syrie. Cent... Deux cent cinquante... Trois cent dix... Vingt dont onze enfants... Encore et toujours des morts et d'autres morts. 
Et deux NON pour signer la condamnation des prochains.

Cette semaine j'ai eu du nez. La scène se passe dans une boulangerie. Dehors il fait un froid d'au moins douze béries, deux fois six... J'ai une paire de gants à la main. Un tombe. Un type m'interpelle: "Vous avez laissé tomber un gant." Moi,  en souriant: "Avec ce froid, tant que c'est pas la main qui tombe..." Là, en me montrant au bout de son avant-bras droit une sorte de moignon d'où sort un seul pouce triomphant: "Oh! elle peut tomber, vous savez on vit bien quand même sans..."  
C'est en voyant le moignon que je me suis dit que j'avais eu le nez fin...
Ah on a bien ri tous les deux... Surtout lui!

Avec ça, je n'ai pas parlé du gel dans le tuyau d'évacuation de la machine à laver qui a fait verser toute l'eau d'une machine sur le sol du garage et le verglaçage  immédiat de toute cette eau répandue... Une patinoire dans le garage... C'est fait.  

Bref, une semaine comme les autres puisque désormais passée, finie, écoulée, racontée, rangée...

01 février 2012

Tout à l'envers.

Depuis que t'es plus tout à fait là
Puisqu’enfin t’as fini par t’enfuir
Ma vie va comme une pomme pourrir
Et ça depuis que si tu s’en vas.
Ce serait quand même gentil
Que t’attendes un peu, jusqu'à midi
Que je me prépare à ton absence
Qui, je le sens, va me brûler les sens...
Une heure c’est pas bien long
Le temps que j’avale le python…
Depuis que déjà tu n’es plus là,
Tout fiche le camp, plus rien n'est droit.

Les yeux doux je les ai durs
Les dessous deviennent  sur
Et le doute m’est incertain
Comme l'oeil au creux de la main.
Les œufs durs… je les fais mous,
Le pain rassis, je le cuis debout.
Celui de mie, je le grille entier,
                                         J’étais premier, me v'la  l'dernier.                                       
L’ami léger m'est enclume
Les balourds sont des plumes,
La nuit, c’est pire, je me crois le jour
Tout devient clair comme dans un four,
La mer se lèche, glace sucrée,
Et l’océan pend, goutte au nez.

Sans toi, je broie du blanc
En me serrant un petit noir.
Je dis bonjour pour au-revoir,
Quand je donne blanc, on prend noir.
Seul, j’ai peur de mon nombre
En guerre dans la pénombre.
Chui triste comme un cheval
Défait comme un journal,
J’ai plus le gout de plus rien
Et rien ça ne goûte rien de rien.
Je me dis que c’est un cauchemar
Que je vais rêver avant ce soir
Que c’est pas drôle mais pour de rire
Que c’est pas vrai que tu vas partir.

Depuis que tu n’es plus tout à fait là
Depuis qu’enfin t’as fini par t’enfuir
Ma vie va, comme une pomme, pourrir
Et ça depuis que si tu s’en vas.
Ce serait quand même gentil,
Que t’attendes, un peu, jusqu'à midi,
Que je me fasse à ton absence
Qui, je le sais, va me brûler les sens.
Une heure c’est pas bien long,
Le temps que j’avale le python …
Depuis que déjà tu n’es plus là, 
Tout fiche le camp, han, même moi.


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