31 décembre 2011

Deux mille... douce...

Quoiqu'on entende, un peu partout de ces menaces planant au-dessus de nos têtes comme d'impatientes buses, les mots, eux, annoncent:
Deux mille douze année du blues, de la bouse, de la loose, des bénouzes, des soyouz et des arbouses... Année de la pelouse, mais aussi des galletouses, du flouze, des bagouses, des perlouses, de Toulouse et des... binouses... 
(Oublions les barbouzes et autres "ouzes".)
En somme, une année bien mitigée. Comme toutes les autres, finalement.
Trinquons, puisque c'est ce qui nous est, en ce moment et avec insistance, promis.



Quand même, vous la souhaiter ici, douce... 
Deux mille douce... 
Voilà qui ne sonnerait pas si mal...

25 décembre 2011

Fin de semaine 3.

Cette semaine, je suis allé voir à reculons (les adaptations au cinéma de livres aimés sont la plupart du temps délicates)  Des vents contraires d'Olivier Adam que j'avais beaucoup aimé. J'ai aimé le film bien qu'il m'ait manqué un paysage, la Bretagne.  A défaut de la dernière image, je vous en propose la dernière phrase:
Dehors, le ciel se découpait en larges bandes contradictoires: des litres de lumière dorée se déversaient sur la cour, par l'Ouest les nuages noirs et violets déferlaient à toute vitesse, bientôt la pluie allait s'abattre sur les maisons au coude à coude, frottées les une aux autres, serrées en retrait de la mer, poussées à l'eau par le pays tout entier, suspendues juste au-dessus, en lisière, marginales et fragiles, menacées mais debout.
Un peu comme nous, quoi. Menacés mais debouts.

Je me suis amusé en mettant côte à côte deux images une de Nicolas de Staël (mon préféré peintre que j'ai):
Le parc de Sceaux...

Et une que j'ai faite un jour dans les carrières des Baux de Provence...

Je me suis aussi amusé benoitement en faisant le constat  qu'avec une image tout dépend du point de vue... Ainsi ce chêne imposant, majestueux, solitaire, cadré à la verticale:


Hé bien sa glorieuse solitude en prend un sacré coup si on le cadre à l'horizontale...


Je me suis dit: Nous sommes tous des De Fontenay, puisque comme elle nous n'avons pas digéré la dinde...
J'ai eu la chance de pouvoir photographier ça:

Et ça:


Sculpture Le nomade de Jaume Pensa installée au  port d'Antibes...

Je me suis réjoui: Bientôt l'année 2012 au joli mois de Mai qui s'avance avec l'occasion qui nous sera donnée de changer de paysage... En attendant vivre la dernière semaine de cette année...
Bref, une semaine comme les autres puisque désormais passée, finie, écoulée, rangée...

24 décembre 2011

De rire, les éclats perdus...

On ne savait pas exactement quand ça avait commencé mais c'était bel, bien et partout le bazar le plus complet. Je m'autorise à aller droit au coeur des choses sans fioriture en me servant de mots crus, directs tant la situation était carabinée: C'était la merde la plus absolue. Une merde noire. Comme une marée. Or, justement, en parlant de ça, la dernière mauvaise nouvelle que le pays ait eu à se mettre dans les poings c'était qu'ils ne savaient ou ne pouvaient, enfin, bref qu'ils ne riaient plus. Du tout. A rien. Dans le pays tout entier. De sa capitale à la plus profonde de ses provinces, plus d'éclats, plus de rire ni  de sourire. Rien. Que des faces atones dans le meilleur des cas, froncées pour les plus atteints. Et du sol au plafond. Du sommet de la hiérarchie à la France profonde, du chef de l'état au dernier citoyen de huitième zone, plus un petit rire de rien. Les émissions de fin d'année avec les bêtisiers redondants faisaient bides sur bides, les salles, qui avaient, en quelques années pullulées où les humoristes se vautraient refermaient une à une leurs portes et  les hordes de jeunes comiques poussifs  mais impayables, soit disant drôles à mourir, hier encore adulés comme des héros nationaux redevenaient les tristes sires qu'ils n'avaient jamais cessé d'être. Des pas marrants.  On avait beau se passer en boucle les interview de Nadine Morano, c'était fini, on ne se pliait plus en deux, on restait de marbre, on ne se poilait plus, on ne se tenait plus les côtes, comme si on avait épuisé son capital rigolade... On avait beau tenter de revenir aux fondamentaux, se relire en grimaçant les premières blagues de Toto, rien n'y faisait. On commençait à compter quelques suicides parmi les gens du stand-up, certains se dépêchaient d'annoncer leurs retraites voire leurs reconversions. Sur toute la surface du territoire, plus une seule mimique, plus une seule esquisse d'un début de mimique souriante. Rien ni personne ne riait plus de rien ni de personne...
On convoquait les spécialistes en tous genres, les ceux qui savent, les ceux qui ont un mot à dire sur tout, que ce soit à propos de la disparition du rire ou de fabrication de la gelée de groseille. C'était parfois les mêmes qui venaient dans les radios, les postes, les journaux pérorer, trancher, émettre, juger. Et tout ce savoir déballé ne débouchait sur rien. On ne savait pas pourquoi, pratiquement du jour au lendemain un pays tout entier et l'ensemble de ses habitants avait perdu son bien le plus précieux, celui qui lui avait permis de traverser les époques les plus sombres de son Histoire, celui qui l'avait aidé à  survivre aux catastrophes les plus épouvantables: son sens de l'humour.
Perdu, envolé, évanoui. On ne croisait dans la rue que des gens aux visages fermés, aux lippes boudeuses qui se regardaient de travers, en biais, en coin. C'était tellement éprouvant qu'ils finissaient par ne plus sortir de chez eux, pour ne pas ressentir ce malaise, pour ne pas voir ça. Les rues étaient vides, les centres vitaux des villes devenaient des déserts humains, les bars, les restaurants se vidaient, les gens ne se parlaient plus, pire, ils avaient peur les uns des autres, ils se craignaient. Les pauvres aboyaient sur les riches qui les méprisaient allègrement. Les nordistes en voulaient aux bretons qui bavassaient sur les alsaciens. Les députés se moquaient des sénateurs qui humiliaient les conseillers généraux. Les blonds détestaient les bruns, les catholiques haïssaient les bouddhistes, qui n'aimaient guère les musulmans qui, eux se mettaient à vomir les auvergnats... Les fonctionnaires regardaient de travers les chômeurs du privé et la police, elle, mordait tout le monde.  Le froid était descendu sur la nation comme une neige sale. Elle s'enfonçait dans une noirceur sinistre, grise, sombre et, pour tout dire, furieusement nord coréenne...
Et puis, un beau soir, tout est revenu, d'un coup. Ce fut, ça tombait bien, le soir de Noël, lors de la traditionnelle allocution des voeux du Président... Ce fut en fait, à la seconde même où celui-ci a appris au pays que oui, il s'était décidé, oui, il avait tranché, oui, il promettait de faire ce qu'il n'avait pas accompli dans les cinq ans passés à cause de la mondiale crise, des affreux banquiers, des méchants voisins, des vilains étrangers, oui, on allait voir ce qu'on allait voir, oui, on pouvait lui faire confiance puisqu'il nous restait quelques dents... OUI,  il allait se représenter aux prochaines élections...

Ainsi, ont commenté les habitants, dans des éclats de rire étincelants et réapparus:
Puisqu'il se représente, celui-là, on va, enfin, pouvoir le raccompagner chez lui...


En espérant que le plus grand nombre n'ait pas l'idée stupide de s'engager dans la marine...

18 décembre 2011

Fin de semaine 2.

Cette semaine, j'ai été attristé par la mort de Césaria Evora. La Saudade, la morna, la nostalgie de ce qui ne sera plus sont des états bien connus, elle les partageait profondément puisque dès qu'elle se mettait à chanter, sa voix les convoquait... 
J'ai en un élan de neuneuterie sirupeuse regroupé dans un même carré trois petits coeurs et j'en ai souri niaisement ému à l'écoeurement:


Ça n'a absolument aucun intérêt pour personne et peut-être même pas pour moi, mais j'ai su comment on écrivait mon nom en japonais: クリスチャン・コッタール.
J'ai joué avec une image de Nathalie d'Avignon in photos. Je l'ai inversée, j'ai exclu un canard de l'image, gardé les reflets et j'ai trouvé que ça faisait une jolie abstraction...


J'ai été content d'une phrase: "Il faut souvent se méfier de ce qu'un évident bonheur dissimule". 
J'en ai lu une autre qui m'a parlé. Elle a été écrite par Sylvain Tesson dans son très beau livre: Dans les forêts de Sibérie: "Pointillé des pas sur la neige, la marche couture le tissu blanc..." 
Je me suis régalé d'Horchata achetée dans un supermarché. Une gorgée de ce breuvage, j'ai illico douze ans, je suis assis les pieds dans l'eau envoyé direct: 38° 41'13.59" N; 0° O8'08.67" E. 
Moreira. Espagne. Un petit village pêcheurs de la Costa Blanca... C'est l'été, il fait chaud les bateaux reviennent de pêche... Enfin, un ex petit village de pêcheurs parce que maintenant, il semble que ce soit devenu un gigantesque lotissement au bord de mer pour vacanciers allemands... On ne devrait peut-être jamais retourner sur ses lieux d'enfance: S'ils n'ont pas changé la nostalgie risque d'être envahissante, s'ils sont méconnaissables s'y ajoutera la colère...


J'ai été handballé par ce qu'a réussi une équipe de filles heureuses de jouer, ensemble. Ensemble... Le doigt sur un des paradoxes humain: On est définitivement, irrémédiablement seul et pourtant rien n'est plus beau, plus émouvant que des instants vécus, partagés à plusieurs, à faire quelque chose, mais ensemble. Qu'on soit un groupe de rock, un choeur de moines dans une abbaye cistercienne, une troupe de théâtre, un équipage, un couple de trapéziste,  un quatuor à cordes, une bande de doux rêveurs, un groupe de leveurs de coude, une brigade de cuisine, une équipe de chercheurs, une escouade de charpentiers, un équipage de voilier, une cellule de parti... Pour la finale, allez, les filles... Des deux côtés!
Je me suis aussi, comme tout le monde demandé vaguement agacé: Bon on le perd quand notre A? Celui dont on nous reb.. les oreilles!
Ç commence bien fire, cette ffire, qu'on le perde qu'on soit dégrdé et qu'on en prle plus! Ou différemment! De toutes façons si on le perd maintenant ça ne changera rien: Il n'y a aucun A dans Fêtes de Noël!!! 


Mon dos m'a rappelé à l'ordre: Couché! m'a-t-il ordonné. J'ai obéi. Pour l'instant.
Mais, j'ai été consolé de me lever de bonne heure puisqu'un matin j'ai vu ça:


Et ce dimanche au marché, j'ai souri à la petite fille que je suivais en ramassant les clémentines qui s'échappaient une à une par un trou du sac plastique, l'entendant s'amuser avec un accent anglais charmant: "On diwait le petite poussett'"... 
Et j'ai souri encore davantage en croisant le regard vert sorgue de "Mademoiselle est tendance" l'héroïne Des cheveux d'ange.
Ainsi donc, vous êtes bien vivante...

Bref, une semaine comme les autres, désormais, puisque... vécue, écoulée,  passée, rangée...

16 décembre 2011

L'autre soir...

L’autre soir, en rangeant des vieux papiers, je suis tombé sur deux pages à l’encre estompée, écrites à la main d'une très belle écriture. Là, ému, j'ai fini par reconnaître l’écriture de mon grand-père. Je me suis assis et j’ai lu :

A cette période, j’avais été très heureux de  trouver un petit boulot dans un bar qui faisait aussi hôtel, rue du Faubourg Saint Honoré près des halles. J’y passais quatre à cinq heures par jour, au bar,  à nettoyer les verres, les essuyer et le soir, en fin de journée, après la fermeture, vers les onze heures j’y revenais pour nettoyer le sol. Je n’avais pas trop besoin de diplôme, juste d’un peu de bon sens et d’huile de coude.  Il arrivait qu’on me demande aussi de veiller la nuit quand le veilleur officiel était trop saoul pour arriver jusque là. Ainsi, tout le monde y trouvait son compte. Lui par ce qu’il restait dormir chez lui sans être viré, moi parce que je doublais ma journée. J’aimais bien ce boulot, on voyait du monde passer, on parlait un peu avec des tristesses. On entendait pas mal de conneries, aussi, mais certaines étaient à mourir de rire.
Et puis, une fois que tout se calmait, j’avais la nuit devant moi pour lire sans être dérangé. Je me calais dans un des fauteuils club du salon, je n’allumais que la petite lampe, je passais derrière le bar et je me servais un verre que je revenais siroter en plongeant dans mon livre en cours. Jamais de nouveautés, je profitais du calme de ces nuits pour relire des livres que j’avais aimé. Comme on réécoute une musique qui nous a bercé. Il m'arrivait d’interrompre ma lecture pour partager un autre verre avec un ou une qui rentrait à cheval sur une licorne, vaguement attaqué(e) ou bien stupidement défait. Il fallait à cet instant tenter de savoir si ça n’allait pas être le verre de trop et si l’on pensait que oui, plutôt convaincre de monter se coucher. Maintenant. Si, si je vous assure, c’est plus raisonnable, demain matin vous me remercierez… Allez vite filez, couchez vous et dormez…
Il était rare que ça se passe aussi bien. Très souvent, les gens se croient plus forts que l’alcool… S’ils savaient. Et comme la plupart du temps leur jugement est sévèrement entamé… Heureusement que j’étais assez costaud et que j’arrivais à les monter jusqu’à leurs chambres. Il m’est arrivé d’en coucher certains dans la baignoire, un oreiller sous la nuque…
Une nuit de Décembre, vers le plein milieu, vers deux ou trois heures du matin, c’est un jeune couple qui a sonné à l’entrée… Un tout jeune couple. Si jeune que j’ai failli leur demander leurs cartes d’identités et puis comme ils semblaient avoir froid et qu’ils avaient le prix d’une chambre en liquide, je les ai laissé entrer. Ils ne me voyaient pas, j’aurais pu être un ours qu’ils ne s’en seraient pas rendu compte. Ils se regardaient l’un l’autre comme aspirés. Ils se tenaient les mains ou plutôt ils s’enlaçaient les doigts et se les serraient si fort que les articulations en étaient devenues blanches… Je leur ai donné la vingt huit, bien qu’elle soit en attente de travaux de rénovation. Je me suis dit qu’ils se foutraient pas mal du papier jauni puisqu’ils se bouffaient des yeux… En même temps, un si grand bonheur c’était blessant pour les autres, pour ceux qui sont en attente, pour ceux qui espèrent, pour ceux qui ne voient rien venir, pour ceux qui sont seuls…
J’ai refermé la porte. Si j’avais su…
Et puis, on ne les a plus revu. Vivants, je veux dire. C’est trois jours après qu’on a attendu que les pompiers défoncent la porte. Derrière, on a trouvé que leurs deux corps encore habillés comme à leur arrivée, allongés sur le lit pas même défait, presque l’un dans l’autre et toute une ribambelle de cachets de couleurs à côté de la table de nuit renversée. Ils n’avaient pas tout avalé mais ce qu’ils avaient pris avaient suffi à les tuer...
On n'était pas très nombreux au carré des anonymes lors de l’enterrement. En tous les cas, il n'y avait personne de leurs familles, aucun ami, comme si ces deux là étaient seuls au monde.
Je repense à cette phrase lue: "Méfie-toi, toujours de ce qu'un apparent bonheur dissimule..." A chaque fois que je repense à eux, les larmes montent, montent.
Si j’avais su… Et en même temps, qu’y avait-il à faire ? En entrant, ils semblaient si profondément ensemble…
Quelques jours après la cérémonie, sur le palier du premier j’ai croisé ma voisine du dessus. J’ai pris un bon moment pour tout bien raconter à Madame Delécluse qui a eu l’air intéressé.
Elle, elle saura surement quoi en faire de cette histoire…

Tiens c’est vrai, maintenant que j'y repense, il ne m'a jamais dit  si elle en avait fait quelque chose…



Edith Piaf
LES AMANTS D'UN JOUR
Paroles: Claude Delécluse et Michèle Senlis, musique: Marguerite Monnot, enr. 8 février 1956


Moi, j'essuie les verres
Au fond du café
J'ai bien trop à faire
Pour pouvoir rêver
Et dans ce décor
Banal à pleurer
Il me semble encore
Les voir arriver...

Ils sont arrivés
Se tenant par la main
L'air émerveillé
De deux chérubins
Portant le soleil
Ils ont demandé
D'une voix tranquille
Un toit pour s'aimer
Au coeur de la ville
Et je me rappelle
Qu'ils ont regardé
D'un air attendri
La chambre d'hôtel
Au papier jauni
Et quand j'ai fermé
La porte sur eux
Y avait tant de soleil
Au fond de leurs yeux
Que ça m'a fait mal,
Que ça m'a fait mal...

Moi, j'essuie les verres
Au fond du café
J'ai bien trop à faire
Pour pouvoir rêver
Et dans ce décor
Banal à pleurer
C'est corps contre corps
Qu'on les a trouvés...

On les a trouvés
Se tenant par la main
Les yeux refermés
Vers d'autres matins
Remplis de soleil
On les a couchés
Unis et tranquilles
Dans un lit creusé
Au coeur de la ville
Et je me rappelle
Avoir refermé
Dans le petit jour
La chambre d'hôtel
Des amants d'un jour
Mais ils m'ont planté
Tout au fond du coeur
Un goût de leur soleil
Et tant de couleurs
Que ça me fait mal,
Que ça me fait mal...

Moi, j'essuie les verres
Au fond du café
J'ai bien trop à faire
Pour pouvoir rêver
Et dans ce décor
Banal à pleurer
Y a toujours dehors...
La chambre à louer...

11 décembre 2011

Fin de semaine.

Cette semaine, j'ai été attristé par la mort de Socratès, (occis mort brésilien puisque footballeur de génie ET démocrate!). Il y a des gens dont finit par penser qu'ils sont immortels... Et puis un jour on apprend que non.
Un tout nouveau venu a pris sa place sur le chemin de l'arche. Je l'ai trouvé amusant avec sa jolie trompe, son petit oeil émerveillé et ses grandes oreilles...


Lors d'une virée sur un de ces marchés de Noël du coin, qui, soit dit en passant, fleurissent comme des héllebores folles, j'ai trouvé et acquis ce porte-bougie fabriqué maison. Je l'ai installe puis allumé. Fête des lumières. Chez moi, un exploit! On fête ce qu'on peut...




J'ai partagé un de ses midis une table avec quelqu'un qui m'est cher. Il faisait doux, nous avons mangé en terrasse, parlé de tout et de rien, puis de rien et de tout et, mine de rien, tout ça, finit par en faire, des sujets de conversation... 
Ce fut un bel instant à vivre... Ils ne sont pas si fréquents.
Plus tard, dans les prés, pas loin, un canal s'est perdu...



J'ai été touché de la confrontation brutale entre l'Histoire, sa durée, ses lieux grandioses laissés par les hommes et le temps et nos craintes contemporaines justifiées... Puissions nous arriver à préserver ce qui peut encore l'être...

J'ai souri, souvent, à la projection de Carnage, le dernier film de Roman Polanski. Il m'a fait penser à la chanson "Dans ma rue" de Romain Didier et m'a vengé de toutes ces heures perdues dans la convenance, la politesse, la bienséance et... l'ennui. Là, les masques s'effritent, s'arrachent et ça décoiffe sévère!


En revenant du cinéma, j'ai croisé les pas d'une jolie danseuse...



Je suis monté un de ses soirs sur la butte de Thouzon d'où j'ai vu une lune bien ronde manquer de peu un rencard avec un soleil, par le froid, pressé de se couetter...


Bref, une semaine comme les autres, désormais, puisque... vécue, écoulée,  passée, rangée...

10 décembre 2011

La mousse, toujours l'amousse...

___ Tu ne dis rien ?
___ Parce qu’il faudrait que je dise quelque chose ?
___ Je suppose que tu as des choses à dire, non ?
___ Ecoute, ça part assez mal cette histoire… Tu supposes, tu supposes… mais tu te trompes ! Tu m’annonces de but en blanc, entre le fromage et la mousse que nous c’est fini… que nous allons nous quitter, enfin que TU vas me quitter… je veux croire que tu n’as pas pris cette décision sur un coup de tête, qu’elle est, comme on dit, mûrement réfléchie, que tu y as un peu pensé avant, que tu as, comme on dit «préparé ton coup», que tu ne changeras pas d’avis… C’est, il me semble, avant tout ça que nous aurions pu parler un peu. Là, j’entends ce que tu viens de me dire, je le reçois comme on reçoit un semi-remorque dans son salon... Hé bien, je n’en n’ai rien à dire. Que veux-tu que je dise du reste ?
___ Je ne sais pas, ce que tu ressens…
___ Tu voudrais donc qu’en plus d'encaisser cette gentille nouvelle je t’en dise quelque chose… Tu ne trouves pas que tu m’en demandes un peu trop ?
___ Tu ne ressens rien, alors ? Je le savais. Je m’en doutais. Je te quitte et ça t'est égal, calme plat, rien, le vide... Tu m'épouvantes, tu le sens ça?
___ Tu pousses un peu, là, si je peux me permettre. Que je n’ai rien à dire ne signifie pas que je n’en pense rien. Tu as de ces raccourcis… Tu aimerais, sans doute, me voir trépigner, me jeter à tes genoux, qui sait, recevoir une belle paire de gifles, une de celles qu’on sait mériter… 

Tu aimerais que je m’emporte, que je hurle, que je proteste, que je t’insulte, que je pleure? Si ça se trouve? Ou bien souhaiterais-tu m’en vouloir pour quelque chose et ainsi ne pas me quitter pour rien, comme ça, dans un souffle parce que les choses ont changé, c’est ça que tu désires ? Je suis désolé mon bel amour, tu n’auras droit à aucun de ces plaisirs. Je ne t’offrirais aucun de ces bonheurs. Je ne t'accorderais aucune de ces grâces. Tu vas devoir affronter ça toute seule. Je ne t'aiderais pas. Du reste, j’en ai déjà trop dit.
___ Voilà tu te tais, finalement c’est ce que tu fais le mieux… Depuis toujours. Elle me cherchait vraiment querelle et je n’avais rien vu venir. J’étais si éloigné de ça… J'avais passé une bonne partie de l'après-midi à courir dans toute la ville pour trouver les meilleures tablettes... Elle venait de plonger sa petite cuillère dans le brun du ramequin de mousse au chocolat que j’avais préparé. Comme d'habitude, avec amour et un zeste de citron. J'avais cavalé partout pour trouver des gaufres de chez Meert (celles à la vanille de Madagascar). J'en ai dégoté chez un épicier arabe qui avait vécu vingt ans à Lille et qui s'était installé plus au Sud pour se rapprocher de chez lui. Encore à Lille mais sur la Sorgue... C’était son dessert préféré. Nous avions dîné sur le canapé devant la télé qui était restée éteinte, en attendant le film du soir, un truc en noir et blanc que nous avions vu plusieurs fois, nous avions juste posé un CD de Weather Report (Black Market, Joe était au plus mal et cela nous attristait) sur la platine, en attendant la bonne heure, la musique envahissait la pièce, elle avait bercé notre jeunesse et le repas. Elle m’avait seulement dit en posant les assiettes sur la table basse : 
___ J’ai un truc à te dire… 
___ Oui, quand tu veux. 
___ Pas maintenant. Après le repas. 
Et puis plus rien. Elle a englouti sa mousse avec des hummm et des hummm et une mine de chatte alanguie s’offrant à un doux soleil d’automne. Je la trouvais belle comme un rayon… 
___ Je voulais juste te dire… 
Comme pour retarder un peu l'échéance, repousser un poil ce que j'allais entendre, j'ai tenté un: 
___ Quoi, elle n'est pas bonne? Tu avais l'air de te régaler, pourtant? Là, je me suis mis à transpirer doucettement, j’ai senti les gouttes se former, en haut, sur mon front… J'ai commencé à trembler de la jambe gauche (celle qui tremble toujours en premier en cas de trouble)... 
Mes acouphènes se sont mis à me susurrer Ramona... Mes mains se sont enmoities, je les ai essuyées en douce sur le lin du canapé en me tordant la bouche. Elle a repris: 
___ Je voulais juste te dire... Puis, après un siècle et demi de silence... Je suis bien avec toi. J'aimerais bien que ça dure...

Alors, vous comprendrez qu'après ça, j’ai tout bien nettoyé le saladier, avec tous les doigts, un sourire un peu stupide bretellé au visage, des pépites fondues collées au coin des lèvres et une petite musique joyeuse dans la cervelle…
Elle m’a tendu les mains, appelant un blotissage…  
J’étais dans le creux de ses bras, enfoui dans son odeur, j'avais deux ans et demi, du chocolat sur le nez, j'étais repu. Je tutoyais le bonheur...

Repu ET pour un temps rassuré.



04 décembre 2011

La Mesrine des radis.

Le ciel s'était, au petit matin, dégagé. 
Vers dix heures, comme souvent, le dimanche, il avait pris le chemin du marché.
Il n'avait pas oublié d'emporter avec lui un bijou qui avait besoin d'être réparé. Ainsi, il se donnait une occasion d'aller voir la jolie bijoutière de la place. Il n'était pas fâché. Il commençait à bien la connaître, il s'arrêtait souvent devant sa boutique et pas seulement pour regarder bagues et boucles d'oreilles, colliers et bracelets. Il s'arrêtait surtout pour l'apercevoir, elle. Elle et son élégance de classe, elle et sa silhouette fine, elle et son sourire radieux, elle et son allure. Ah ça, pour en avoir, elle en avait de l'allure. Elle en possédait tellement qu'il se demandait quels évènements avaient bien pu l'amener ici, dans cette petite boutique d'une rue d'un gros village du Sud... Sans doute touristique et vaguement reconnu mais quand même assez loin de la place Vendôme. C'est là-bas qu'il l'imaginait, dans une de ces grandes maisons où y entrer vous coutait un bras et acheter... le reste. Elle se déplaçait dans sa boutique avec autant de grâce qu'un colibri dans un bouquet d'arums. Et oui, elle le rendait vaguement grandiloquent et pas mal neu neu... Elle était déshabillée d'une robe de cashmere, caramel, très près du corps, au dessus, ses cheveux étaient sagement rangés en un chignon discipliné et, en bas, des chaussures à talons. Rien à ses poignets, rien à ses doigts. Seule, une paire de perles de cultures noires ornait ses lobes et ainsi l'ovale parfait de son visage parfaitement... parfait. Juste, un trait de rose à lèvres les soulignait. Une très belle femme. Vraiment. C'est ce qu'il se disait devant la vitrine comme un peintre devant la Maya.
Comme il ne pouvait pas rester planté là toute la matinée sans attirer des questions, puis des soupçons, il a fini par entrer et lui a donné la bague à réparer. Puis, avec en poche un sourire et rendez vous pour dans quinze jours, il s'en est allé faire le tour du marché, radieux. Oui, on était dimanche et dimanche c'est jour de marché, il s'en souvenait à peine. Il a flâné dans les rues en jetant quelques yeux sur des étalages, des vendeuses, des acheteuses, aussi mais rien qui ne l'a agrippé comme l'autre, la bijoutière. Comme il passait derrière l'église, les adeptes sortaient de la messe du matin, la grand. Il les a regardé s'embrasser, se dire à la semaine prochaine, s'en raconter une bien bonne, jeter avec une vulgarité sans nom quelques pièces dans un chapeau posé à même le sol et il a repris balade. C'est en face de l'étal du poissonnier qu'il l'a revue.
Elle devait avoir quitté sa boutique pour un instant, elle marchait ou plutôt, elle flottait vers lui dans une sorte de halo de lumière blanche, elle avait simplement passé un manteau noir sur sa robe, les gens s'écartaient à son approche, quelques pigeons voletaient en tournant au dessus d'elle et l'orgue de l'église s'était, à son passage, remis à jouer et la chorale à chanter... Il l'a suivie des yeux, si elle continuait comme ça, elle allait passer à UN mètre de lui. Deux fois dans la même matinée, c'était fête. Ses genoux commençaient à le lâcher, ses jambes se mettaient à trembler, son coeur à accélérer... Elle a bifurqué vers le marchand de légumes, elle s'est approchée de son étalage. Les laitues se sont redressées, les carottes se sont orangées et pour un peu, les avocats se seraient mis à plaider... Elle a avancé sa main vers une botte de radis, le marchand ne la regardait pas, elle s'en est aperçu.

Je l'ai vue, moi, arracher UN radis d'une des bottes et se le glisser vite fait, en loucedé, dans la main...
Déjà que j'étais vaguement amoureux... Voilà qu'en plus, j'étais tombé sur une Bonnie du radis!
Non seulement elle était belle comme une paire de bottes mais en plus c'était une voyou de marché, une braqueuse d'étalage, une Arsène de la fauche, une Mesrine des radis, une Spaggiari de la cambriole...
J'ai freiné des deux pieds sur le hurlement de joie qui m'est monté de l'abdomen...


01 décembre 2011

En deux mots.


Quand la nuit descendait sur la terre, dans ce pays d’eau, souvent, les brumes montant du sol, apparaissaient.
L’homme, celui qui s’était donné de la peine tout le long du jour, posait ses outils, les rangeait, essuyait la sueur de son front  et s’en retournait, alors, chez lui. Il était éreinté.
Mais au moins, lui, ne se mourait pas d’ennui.


C’était l’heure où les hommes sont rattrapés par le jour qu’ils ont vainement tenté de fuir.
On a beau se démener comme des beaux diables, tout se paie. Tout.
Pour avoir une chance de s’en sortir, il valait mieux décider, un jour, de jeter un oeil sur le chemin parcouru.


Le jeune homme avait garé la longue berline flambant neuve devant l’entrée de l’hôtel de luxe. Il se recoiffait avant d'en descendre. Il vérifiait son image.
Dans l’étincelant de ses flancs, il n’a pu voir le reflet tremblant des grilles du palais qui n’allaient pas tarder à l’emprisonner. On l'attendait.
Désormais, il n'était plus qu'à sa merci.


Dans la cuisine un peu sombre, on avait joyeusement posé sur la table un saladier comme un soleil éclatant. 
Il ne restait plus qu’à laisser chanter les envies. Paul remontait déjà l'escalier de la cave, un sourire au coin de l'oeil et deux grappes de trois bouteilles au bout de chaque bras...
La soirée promettait de promettre.

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