31 juillet 2009

Les limites...

Certains slogans révèlent leurs limites d'une façon parfois douloureuse…

Celles du “travailler plus pour gagner plus” ont éclaté de manière brûlante le 30 juillet en Corse:

NOUVELOBS.COM | 30.07.2009 | 08:57

Les deux pompiers volontaires, soupçonnés d'avoir provoqué des incendies en Corse, n'auraient agi que par motivation financière, les interventions de nuit étant rémunérées deux fois plus que celles de jour...

CQFD...

30 juillet 2009

En attendant Fabrice...

Hier soir, je suis allé entendre et voir Fabrice Luchini au Festival Pierre Cardin de Lacoste. J’y suis arrivé bonne heure puisque je devais retirer mon billet acheté l’après-midi même. En attendant le début du spectacle, comme à mon habitude, j’ai pris des notes sur un carnet. Je pensais en tirer une note, une vraie, écrite. Mais j’ai la flemme, alors je me contente d'un recopiage des notes…

La motocyclette c'est agréable, mais quel dommage qu'il n'y ait pas de carrosserie...

Je me sentais aussi proche de lui que le requin marteau l'est du clou de girofle…

Il s’était rasé avec une fourchette…

Habillée comme une deuxième dauphine de Miss Emmaüs...

Elle était ronde comme une pizza reine.

Tout ou presque ici se voulait chic. Cet espace de spectacle dans une ancienne carrière adossé à un château en réfection, les bronzages presque parfaits des vieux beaux et des vieilles belles, le blanc de leurs tenues de lin froissées, leurs mocassins sans chaussettes, glosant avec un accent très neuf deux sur le désert culturel des ces provinces éloignées, des Figaro en veux tu en voilà jetés sur les sièges, des minis d’eau minérale au prix des packs de maxi de douze bouteilles, des flutes en plastique d'un champagne de chez Maxim’s, des kilogrammes d’or aux cous d’entrepreneurs piscinistes s'encanaillant en goguette estampillée culture, vu à la télé, des pashminas caramels négligemment, mon oeil, jetés sur des épaules nues, des sous rires entendus. d'entre soi satisfaits, bref un public alliomariste de base... Se voulait… Il y a parfois des siècles lumière de la volonté au réél...

Il était aussi à l’aise qu’un cachalot dans une baignoire sabot.

Des talons hauts comme un premier étage, sur un lit de gravier, ça n'aide pas pour avoir une démarche féline...

Un premier constat sévère, mais juste c’est que, malheureusement, on ne risque rien, l’intelligence n'est pas contagieuse. Personne dans cette assemblée ne risquait de l’attraper. Quand ils l’ont compris, ils en ont été soulagés.

Mon dieu que j'aime ce pays où même ceux qui ont des mas avec piscine dans le Lubéron peuvent aller se faire soigner gratis par des infirmières sur-exploitées ET sous-payées et même rouspéter parce qu'il faut attendre...

Il paraissait aussi en forme qu’un concombre sous une rôtissoire…

Maquillée au rouleau à crépi.

C'est injuste, il n'y a que les jolies femmes pour fréquenter les salons de beauté...

Embijoutées jusqu'à l'indécence... des sapins de Noël provençaux.

Mûr comme une figue en Décembre...

Une seule vraie brune aux cheveux courts dans un océan de blondes à cheveux longs, croyez moi, ça décoiffe sévère.

Une horde de mannequins Ralph Lauren aux cheveux gominés.

Il avait autant d’allant qu’un Aï en phase terminale…

Au-dessus du mur principal de la carrière, une demi lune orangée pointait les ronds de ses cratères, le ciel avait noirci, du fond de l’univers s’amenaient déjà les premières étoiles, les cigales s’en poussaient une dernière, la nuit allait nous envelopper comme une écharpe de soie entoure une nuque frileuse, c'est alors qu'il est entré dans la lumière, la bouche légèrement tordue par le trac, une pile de livres à la main...

Sinon? Quoi d’autre? Le spectacle? Bien. Pas tout, mais dans l'ensemble, bien. Et l'endroit? Beau, très beau, même. Un peu genre, mais beau.

La flemme, je vous dis…

29 juillet 2009

Mon malaise à moi....

Elle a basculé dans un autre monde et elle s'en doute à peine. Ce qui est logique puisqu'elle est toute à sa joie, légitime, d'avoir retrouvé son amoureux pratiquement intact.
Mais, mais la bascule est faite.

Qu'elle le veuille ou pas, que ce soit grave ou pas, qu'il y ait des séquelles ou pas, elle a versé dans une autre dimension, en vingt quatre heures, elle est passée dans le monde où on vient chercher "papy" à sa sortie...
Explosé le glamour chic, ratatinée la toute puissance, rabotée l'énergie indomptable, évincé l'infatigable dynamisme, entamée la débauche activiste, hachée menue la débordante fièvre, finie, désormais, l'agitation... agitée.
Voilà venu le temps des ménagements, des précautions, des temps de repos, de la récupération active, des électrocardiogrammes, des: "Pas maintenant, Chouchou, soit, un peu, raisonnable", des: "Pense à ton p'tit coeur fragile mon hérisson d'amour, fais attention, tu n'as plus vingt ans"... Des: "Mais que va penser le médecin, mon coeurounet, il va te gronder si tu n'arrives pas à rester sage, tu le sais?"

Voici venu le temps où les grosses montres ne servent plus seulement à savoir quelle heure il est à Tokio mais à combien de minutes on est de dix huit heures et du repas du soir... Voilà la période du Droleptan, du Nozinan, de la sieste, des sucrettes, des robes de chambre, des coussins sous les pieds, des oreillers en noyaux de cerise, du gonflable pour la nuque, des pantoufles en peau de berger basque, voire...
Bientôt, un des ses fils aura un enfant et lui deviendra... grand-père... Et au grand-père, on chantera une vieille chanson de Piaf:
Tu m'fais tourner la tête,
Mon malaise à moi , c'est toi...

De cette planète là, le trajet est sans retour, on n'en revient pas.
Bienvenue dans le monde réél, m'sieur.

Du coup, je suis allé faire deux heures de bicyclette en pleine chaleur, moi. En espérant en bon papy, mon petit "malaise lypothymique d'effort soutenu". Il n'y a pas de raison.
Si vous voulez venir me chercher, ou juste faire un tour pour m'y apporter des fleurs, c'est Cavaillon l'hôpital d'ici.
Oui, oui, Cavaillon, comme les melons...






Dernier baiser.


Tenir l'orage secret jusqu'à l'éclair.

Ph. Léotard.

Depuis le matin, le Ciel qui les avait accompagnés était un de ceux qu'on ne voudrait jamais voir. Il était autant inoubliable qu'à oublier. Quelques rares touches de bleu, incomplètement résignées tentaient d'exister malgré tout le gris. C'était un ciel dense de colère rentrée, un ciel de larmes à venir. Parfois, comme pour rappeler à son ordre, il virait brusquement au noir et obligeait à allumer les phares. D'autres fois, pour laisser croire, il s'ouvrait comme un portefeuille de généreux et s'illuminait d'un bleu métallique, très vite éteint par d'énormes masses tourmentées. Voilà c'était un ciel de tourments. Mais jamais, jamais durant toute la journée il ne s'est abandonné, comme s'il avait voulu attendre, comme s'il préférait rester menaçant. C'était un ciel de menaces, un ciel de volonté, vivant, maître de ses choix, de lui-même et du monde en dessous de lui. Et si l'air avait souvent vibré de grondements sourds, d'une puissance effrayante, ils n'avaient jamais eu à balayer le pare-brise. Ils avaient roulé sous son épaule depuis l'aube et, pour une fois, la bagnole avait été raisonnable. C'est à dire qu'elle avait fait ce qu'on lui demande: rouler. Un moment il avait cru entendre un bruit bizarre mais non, rien. Il avait fait quelques kilomètres inquiet mais rien ne s’était passé. Quand on est persuadé d’une chose, il vaut mieux qu’elle soit vraie...
Ils avaient quitté la ville alors que le noir de la nuit baignait encore les sommets perdus des tours de banlieues. Les premières lueurs de l’Ouest étaient montées très lentement, le ciel s’allumait avec un variateur, quand ils avaient fendu les premiers champs surveillés par les rondes noires de corbeaux noctambules. Au loin, des brumes allongées montaient des lits des rivières, des villages encore endormis sortaient de terre en s’étirant, malgré le ciel étouffoir, la vie ne renonçait pas. Les deux dans la voiture ne s’étaient pratiquement rien dit depuis le tout début du jour. Quoi dire après un spectacle d’une telle splendeur. Pourtant, avant de se mettre en route, ils avaient parlé de tout se connaissant depuis trop peu de temps pour prendre des précautions et maintenant, ils savaient tout ou presque de l’autre. Ils savaient aussi qu’ils auraient tout à réapprendre. Ils s’étaient rencontrés quelques heures auparavant dans un restaurant, assis à deux tables côtes à côtes. Elle attendait quelqu’un qui n’était pas venu, lui n’espérait plus quelqu’une qui ne viendrait pas. C’est lui qui avait envoyé la première phrase. Elle, elle n’avait pu retenir une larme qu’un coup de fil avait fait naître.
___Je peux vous demander du feu ? (En montrant une cigarette).
___Vous pouvez, mais offrez m’en une, s’il vous plait. Quelques minutes de silence après, elle s’était assise en face de lui. Tout à leur rencontre, ils avaient mangé sans appétit des plats sans goûts. Puis ils étaient sortis juste pour n’être plus enfermés. Alors, leurs corps s’étaient mis à marcher. Bien sur, il avait proposé de la raccompagner mais elle avait dit qu’elle ne souhaitait pas rentrer, pas encore, pas de suite. Ils avaient continué en traversant la ville de part en part, de long en large en s’arrêtant parfois pour boire un verre dans des bars louches, traversant le fleuve, passant et repassant sur ses ponts, se laissant éblouir aux projecteurs des bateaux mouches, s’amusant de leurs ombres immenses projetées sur les murs des quais, s’éloignant malgré le fait de tourner en rond des leurs histoires communes. Un moment, il lui avait tenu le coude pour traverser une avenue mais il l’avait très vite relâché pour ne pas la heurter... Ils ne s’étaient pas rendu compte que le ciel se couvrait, mais dans les villes, la nuit, le ciel n’existe pas. Dans les villes, la nuit, il n’y a que la ville qui existe. Les voitures s’étaient faites plus rares, les rumeurs avaient fait place aux bruits, les silhouettes aux personnes et le noir aux lumières. L’agitation s’était dissoute et le calme imposé. Il prenait garde à garder ses distances d’elle excluant le moindre frôlement, la plus petite équivoque. A ne pas vouloir passer pour, on finit par ne plus être. Dans le doux cocon d’un square désert, sur une île à cheval sur le lit du fleuve il lui avait raconté sans chercher à la convaincre de son besoin de sud, de ses espérances d’harmonie, de ses désirs d’odeurs de terre après les averses, de virées en forêts avec à ses côtés la truffe énervée d’un chien, plongée dans les senteurs d’humus, de sérénité retrouvée. Il lui avait décrit le souhait d’avoir les pieds sur terre, son regard posé sur des toits de vraies tuiles, de son corps traversé par le chaud, l’humide ou le froid, de saisons enfin ressenties, d’heures vécues mais pas abandonnées. Il avait évoqué les brumes lentes des matins d’Octobre, les feux flambants foutus aux feuilles des forêts d’automne, les flaques de ciel sur les sentiers détrempés, les apparitions des premières hirondelles aux printemps venant, les garrigues et les buissons de thym sauvage, les traces majestueuses et dessinées des vols de migrateurs, le grouillement brouillon des insectes en été, le chant lancinant des cigales, les hameaux silencieux aux heures du repos... Et, s’il s’était contenté, pour cette fois de lui dépeindre des chromos de Provence, il s’était senti capable d’en dire autant sur la montagne et peut-être encore davantage sur l’océan. Il ne lui avait offert qu’un peu de l’Epinal qu’on s’invente quand on en a soupé de la ville et de ses ingrédients. Elle avait écouté et il l’avait sentie séduite. Elle, elle ne lui avait transmis que son besoin de paix après les années qu’elle venait de vivre. Puis ils s’étaient tus, longtemps. Et au ventre du silence, elle avait dit : « J’ai envie de voir la terre. » Il avait souri. Ils avaient fait du Sud. Maintenant, il stoppait le moteur au plus haut d’une butte ronde comme une épaule de femme dominée par les ruines d’une Abbaye en abandon. Au loin, en bas, les coqs embauchaient, plus haut, le jour encore plein d’orage, se levait. Sous la menace pesante, elle était sortie et s’était avancée vers la plaine en éveil. Il l’a suivie de près. Il s’est défait de son manteau et lui en a délicatement enveloppé les épaules en laissant un bref instant les mains sur elles. Elle ne s’est pas retournée, elle a seulement dit : « C’est un bel endroit pour se laisser embrasser. »
___ « J’en ai très envie... » Il a dit.
Alors, bravant la colère du ciel qui grondait, défiant les éclairs qui menaçaient, provoquant enfin la chute de  toute la pluie, ils se sont donnés fiévreusement leur premier baiser.
Oh, celui là n’était pas difficile à échanger, ils savaient bien, déjà  trempés par les premières gouttes, que le plus difficile serait de s’arranger pour que tous ceux qui viendraient lui ressemblent...
Mais ces deux là, ici, s’il y a une chose dont ils ne voulaient surtout pas entendre parler, c’était bien ... d’impossible.
Route royale

27 juillet 2009

Un joli raccourci.

Nous avions décidé de nous y offrir une soirée et une nuit mémorables.

C'était une crique en U, comme elles l'étaient toutes par ici. Bien abritée, protégée des vents dominants, comme dessinée au crayon par un paysagiste de génie, bref, un rêve de crique...

Elle n'était accessible qu'en bateau ou bien par un sentier tortueux qui descendait de la route et qui traversait le maquis en contorsions alambiquées. Comme nous n'avions pas de bateau, il ne nous restait que peu de solutions, mais n'en avoir qu'une évite le choix. Et, ça peut aider dans une décision à prendre. Nous nous étions chargés de tout le nécessaire pour que ce soit le moins inconfortable possible.

Nous n'avions pas regardé la météo, nous nous en foutions un peu. Et si jamais, il venait à pleuvoir, ici, en cette saison, ce serait un miracle tant tout était sec dans le coin. Même les pierres avaient soif. A la vue du ciel, tout s'annonçait pour le mieux. L'ambiance était à la robinsonnade enfantine. Nous allions dormir dehors, sur une plage, comme seule cette île et quelques milliers d'autres peuvent en proposer. Une eau limpide, transparente... un cauchemar de narcisse. Un sable doux, fin... le rêve absolu des dos malmenés. Au menu du soir ce serait grillades et blanc frais et fruits, enfin de quoi voir la nuit venir un peu apaisé et étoiles filantes. Il nous a fallu une belle heure de marche, en descente douce, plongés dans les parfums des cistes, de la myrte, des lentisques et des arbousiers, griffés aux mollets par les ronces, mais des griffures qui valaient le coup, pour une fois. Arrivés en bas, nous avons installé le campement comme des princes définitifs.

La nuit était déjà là. Nous allions nous offrir des souvenirs inachetables.

Avant d'allumer le feu, nous nous sommes trempés dans le vert de l'eau, puis nous avons mangé et bu. La nuit, maintenant était noire comme une encre de poulpe. L'un de nous a proposé encore un bain. Il n'était que dix heures du soir, nous avions deux heures d'avance mais nous nous en foutions. Nous nous sommes déshabillés et nous avons plongé et éclaboussé la plage de nos rires.

Le ciel s'était illuminé d'étoiles. En revenant du bain, sur la plage silencieuse, nous avons levé les têtes vers la coupole de diamants. C'est Paul, les pieds souillés, qui nous a fait remarquer que, sur la toute merveilleuse langue de sable phosphorescent, des vaches, aussi, venaient se vautrer… Le rosé l'avait rendu grandiloquent. Il déclama comme un shakespearien déjanté:

___ Alors, nous voilà, nus, humbles, humides, dans l'obscure clarté, la tête dans les étoiles et... les pieds dans la merde...

Un assez joli raccourci de la vie, au fond.

___ La vache, j’en ai partout entre les phalanges! C'est dégueulasse!

Nous autres, en chœur:

___ Paul chéri, tu te fais du mal! Viens donc finir ton verre...

Porquerolles 057 (Medium)

25 juillet 2009

Nous deux…

Il s’est mis à crier, d’un coup:
___Han, ça y est, j’ai compris, c'est une fuite !
___ Dis, nous deux c’est comment ?
___Quoi? Mais qu’est ce que tu me dis ? Est-ce que j'ai entendu ce que j'ai entendu? Tu choisis juste ce moment pour me poser cette question? Mais qui es-tu? De quel monde viens-tu?
Lui, à genoux sur le carrelage, baignant dans une flaque d’eau, la tête sortie de dessous le lavabo de la salle de bains, une pince multiple, comme un sceptre égyptien, à la main. Elle, assise sur le rebord de la baignoire, se rougissant les ongles:
___ Je te demande : Nous deux c’est comment ? Tu vois ce que je veux dire?
___Mon namour, tu as le chic de poser les bonnes questions au meilleur moment… Pour l'instant, nous deux, c’est juste cette putain de fuite que j’essaie de réparer…
___ Mais on s’en fout de ça, c'est de l’eau qui coule, ça sèche ! Nous deux, c’est comment ? Y mettant du poids: C’est important que tu me dises, maintenant.
___ Heu... j’sais pas… Comme… Comme... le joint et la rondelle?
___ C'est malin! Tu pourrais te fendre un peu et chercher autre chose? Non?
___Excuse-moi mais pour l'instant c'est une fuite que je cherche! Et toi qui fais ta maline tu dirais quoi ?
___ Hé bien, en te creusant un peu tu aurais pu me dire :
La montre et le poignet, le un et le deux, l’aile et la cuisse, le poulet et le képi, la rose et le réséda, Claude et Edith, le canard et l'orange, Taman et Rasset, Amélie et mélo, la plume et le sergent major, la Seine et Paris, la poire et le fromage, la cellule et le noyau, le vide et le grenier, la paille et le grain…
___Han han! La vache! C’que ça coule… Le tuyau doit être percé, ma parole!
___... Le bateau et le Somport, Vendredi et les limbes, la rue et le caniveau, l’être et le néant, Titus et Bérénice, l’esbrouffe et Nicolas, l’esprit et l’escalier, l’acide et la base, la mousse et le chocolat, la tristesse et le dimanche soir, Isidore et Ducasse… Tu en veux d’autres ou je m’arrête là ?
___ Passe-moi la serpillière, tu veux? Continue, continue moi, je colmate... Dis tu tiens une forme éblouissante, toi! C'est ma mousse qui te fait cet effet là? Attention, tu vas en manger toutes les semaines...
___ Tu es trop bête… Tiens, c'est cadeau: Le marteau et l’enclume, l’eau et le gaz, John et Fitzgerald, le bruit et l’odeur, Aix et le calisson, Le mensonge et Pasqua, la bêtise et la certitude, le festin et Babette...
Lui, ahanant:
___ Ça commence à devenir pénible, tu sais?
___... Le pouvoir et la solitude, l'omble et le chevalier, la foi et l’espérance, la colère et l’aveuglement, l’ivresse et le flacon, la faune et la flore, les rayures et le zèbre, Tarass et Boulba, l’eau et la vie, l’avenir et le connu, le dalaï et lama, Rémi et molette…
___ Ah merde! J’ai de la flotte sale plein les oreilles…
___...L’amour et la durée, la flamme et le pompier, la mer et Charles Trenet, Tanguy et Laverdure, Emma et Charles, la voile et le vent, l’Amoco et Cadiz, la pomme et les pépins, la lune et la nuit, le veuf et la poule, la musique et l’émotion, la patate et l’épluchoir, l'aube et le départ, la discorde et l’argent, Aline et j’ai crié...
___Tu saoules un peu, là...
Elle, enchaînant:
___... La pierre et le loup, la tendresse et le câlin, l’humour et Desproges, Alchor et Mizar, l’Italie et les pâtes, la rose et Led Zeppelin, le calice et la lie, la politique et le mensonge, Lisa et Bricot, la puce et le chien, la suffisance et le crétin, la femme et la parole, l'homme et le mutisme... Joe et les plombiers… la sortie et l'auberge, la belle et le clochard…
___ Heu... qui serait le clochard ? Je vais être amusé de l'apprendre, je sens...
Puis, se relevant et se tournant vers elle, il lui dit avec un regard admiratif :
___Alors là, tu m’en a vraiment bouché un coin!
Elle, en souriant :
___ C’est pas mal pour ce que tu es en train de faire, non ?
___ Passe-moi la clé de douze, steuplait.
___Tu sais parler aux femmes, toi, ça, on ne peut pas dire le contraire…

Les lavabos

24 juillet 2009

Piscine de papier.

Il avait fait très chaud.

Dans l'après midi, j'étais allé à la piscine. Je n'y étais pas allé pour l'eau, j'avais horreur de celle des piscines, l'impression de me tremper dans un bocal d'antiseptique ou une boite de conserve, toujours peur de me couper les doigts quand je m'agrippe aux bords. J'irais plus volontiers le jour où on se décidera à remplacer l'eau par du dakin. J'y allais pour lire et pour le monde. J'aime aller lire seul dans un endroit surpeuplé. En général personne ne m'y parle et comme ça je ne suis pas obligé de répondre. Ça n'a l'air de presque rien mais peu d'univers résistent à ce bazar ambiant, et peu de livres, aussi. Ce qui est un bon critère. Si le silence dans lequel vous êtes plongé en impose au bruit qui entoure, les pages que vous avez sous les yeux risquent de vous rester longtemps dans un coin de l'âme. On peut préférer l'autobus ou le métro. Le bouquin qui vous fait manquer l'arrêt... Comme j'avais laissé les deux loin derrière moi, il ne me restait plus que la piscine. Pour ce qui était du bruit, merci, il y avait la dose. L'eau fait crier les enfants. Une chose à savoir avant de songer à en creuser une dans son jardin. Il y avait autant de corps sur l'eau que dessous. Et toutes ces chairs s'aspergeaient de hurlements joyeux, d'appels tonitruants, des vagues de décibels. Pour nager, j'attendrais Les Premières Glaces, je me suis dit finement. Pourtant, à un moment, un nuage s'est offert un point fixe pile au zénith du rectangle bleu. La température est tombée très vite de quelques crans. La plupart des corps sont sortis en tremblotant et en emmitouflant le bruit dans leurs serviettes humides.

J'en ai profité pour plonger.

C'était si bon que j'ai failli imploser de bonheur quand j'ai senti de chaque côté, les bulles d'air me caresser les joues. J'aurais aimé prolonger ça davantage mais ça n'a duré que trois litres et demi d'oxygène, le tabac m'empêchait d'en inspirer plus. Il faudra bien que j'arrête un jour, j'ai pensé. Quand j'ai émergé, il y avait au-dessus de ma tête le visage d'une petite fille que je n'avais jamais vue. Elle m'a regardé un long moment reprendre mon souffle puis elle m'a demandé comment je trouvais son maillot. Deux minuscules couettes humides trébuchaient de ses oreilles et son sourire avait le goût du halva. Elle m'a expliqué que c'était un UNE pièce son maillot, qu'il était tout neuf de ce matin et qu'elle habitait pas loin. Elle m'a dit qu'elle savait plonger en tête. Elle m'a montré comment et elle a voulu qu'on fasse la course. Je lui ai répondu que je ne savais nager que sous l'eau.

__ Dessus, je ne suis pas très fort, je coule.

__ Ça fait rien, on va jusqu’à l'autre bord et le premier arrivé attend l'autre. Encore une qui est du genre à qui on ne résiste pas...

__Ok, j'ai dit et j'ai sombré dans le bleu...

Arrivé sur l'autre rive, je me suis tourné vers elle pour la regarder. Elle riait en nageant, en riant elle buvait à pleines gorgées et s'étouffait, suffoquait, hoquetait comme une sole asthmatique. Enfin, d'une main elle a attrapé le bord et m'a saisi un bras en reprenant de l'air à pleins poumons. Alors, on a ri comme deux tordus, elle et moi. Ca faisait au moins vingt ans qu'on se connaissait. Elle a voulu savoir si j'étais chatouilleux.

__ Plaisante pas avec ça, j'ai dit, je suis cardiaque.

Elle s'est éloignée d'un bon mètre pour m'examiner et elle a du se dire qu'à mon âge ça devait être vrai. Elle ne m'a pas chatouillé.

__ Bon on renage?

__Non, non, regarde j'ai la chair de poule.

__ Moi pas, on renage?

__ Non, je t'assure, je suis gelé, on remettra ça tout à l'heure, si tu veux bien.

J'ai bien vu qu'elle était déçue. Elle a fait demi-tour pour aller rejoindre ses copines qui devaient lui sembler plus drôles que moi. Et moins vieilles. Je suis sorti de l'eau, je me suis séché et j'ai replongé mais dans mon livre cette fois. Il y a comme ça des instants bénis. Dehors, il faisait vingt sept degrés deux et c'était bientôt le soir. Après vingt pages, peut-être trente, j'ai levé la tête. La piscine s'était vidée de tout son monde sans que je m'en aperçoive, c'est dire. C'est dire s'il écrivait bien... La voilà, la force des mots, s'il fallait la prouver: faire oublier le froid, le bruit, le jeu, les vacarmes du monde, même et surtout si ces mots les décrivaient. Ils n'étaient pas nombreux à jouer dans cette catégorie, ils n'étaient pas légion à pouvoir se vanter de ça. Dans tout ce bleu, j'en avais croisé un de cette trempe cette après midi là.

Pas près de le lâcher, celui là...

La coupe de champagne

23 juillet 2009

Entorses de proverbes.

Il y a beaucoup de pétole entre deux ris.
Il faut battre le fier tant qu’il est chauve
Un indien vaut mieux que Dieu, Tulle l’aura.
Tant va la ruche ado qu’à la fin elle se lasse.
Pliera bien, qui pliera le dernier.
Il ne faut pas tendre l’appeau de Lourdes avant de l’avoir hué.
Le chien boit le quart de havane se tasse.
Qui sème le Vian récolte la trompette.
A bon choix, bon doigt.
A bon crachat, bon rachat.
Tant va la bûche haro qu’à la fin elle s’embrase.
On ne nage pas contre le courant, on s’en sert.
A trop retenir ses larmes, on se noie.
Qui mène me nuise.
Ce n’est pas aux vieux linges qu’on apprend à faire la limace.
On ne parle pas avec une brouette, on la pousse.
Le monde à part, tient à ceux qui s’élèvent haut.
Qui vole un neuf, viole un dix.
Tant va l’autruche à l’eau qu’à la fin elle s’entasse.
Ce qui ne te troue pas te rectifie.
Qui aime Le Havre aime aussi la Manche.
La critique est Thésée mais l’arrêt difficile.
Le corps a ses saisons que l’oraison ne connait pas.

Ce qu’il ne faut pas faire pour se désennuyer, un peu!

Porte peinte

20 juillet 2009

Le monde s'en fiche...

Et il a bien raison.

Le 9 Aout j'ai une place pour aller écouter Térez Montcalm à Gordes dans le cadre des soirées d'été... Gordes, vous en avez entendu parler déjà? Gordes... Oui, ce Gordes là.

Térez Montcalm, mais si, c'est celle que vous entendez chanter au début, quand vous venez ici... Une canadienne qui n'est pas ma tante (hum...) et qui n'est pas non plus une de ces jeunes femmes "hurleuses", sans doute à cause des espaces immenses du Grand Canada... qu'ils savent nous envoyer...

En vrai, le répétez pas, Térez c'est pour faire genre, elle s'appelle Thérèse...
Mais sa voix, sa voix... Ecoutez son Sweet dreams, une reprise d'un titre d'Annie Lennox...

www.myspace.com/montcalmterez

Enfin bref, vous vous en moquez complètement et je vous comprends, mais moi, j'ai une place pour le 9 Aout à Gordes et je suis assez content en perspective de cette belle soirée... Et il n'y en a pas tant comme chantait l'autre...

Et le 11 ce sera Michel Jonasz... Deux belles soirées de suite? Ça va se payer!



18 juillet 2009

Petite liste de courses...

Je suis parti au grand marché du dimanche matin avec une petite liste de courses ou une liste de petites courses sur laquelle j'avais noté:
Un petit stylo en acier pour écrire d’inoxydables mots d’amour avec.
Un bouquet de fleurs des champs pour une histoire sans vase.
Un bol de riz cuit pour éviter d'être trop cru.
Huit ou neuf enthousiasmes, que le cœur, dissous, s'emballe.
Une topette de vin blanc pour la soif.
Une trinquette, une balancine et un pataras parce qu'à les prononcer on est déjà loin de l'enrade.
Un fromage à pâte molle contre les coups durs.
Une verte salade pour la couleur.
Un bol de Saint Tol pour les douleurs.
Des sachets de dix doux mots d'amour en kit pour les jours de crachin.
Un trente huit juillet pour prolonger l'été d'une semaine.
Une ou cinq poignées d'éclats de rire pour meubler joliment le silence d'une maison vide.
Un cœur en guenilles pour lui tailler un costume et l'habiller pour l'hiver.
Un sourire tous temps pour les jours sans.
Une crique sous-le-vent, comme le creux d'une main, pour un mouillage paisible.
Une boite de mouchoirs sèche larmes pour les jours sang.
Une indignation ou une colère pour ne pas perdre la main.
Un collier de douceur pour entourer sa nuque avec.
Une solitude pour qu'elle le soit moins.
Une poignée de main, juste pour la serrer.
Une verre à côté d'un autre pour qu'ils trinquent.
Dix centimètres carrés de ta peau pour pouvoir y déposer quelques uns de mes baisers.
Un oui vigoureux et fleuri plié en trois dans un sachet de pétales de roses séchés. (En cas de demande en mariage inopinée).
Une peine légère pour qu’elle soit délicatement consolée.
Deux pincées de sel de Guérande pour se les jeter derrière les épaules.
Une paire de mains baladeuses pour égayer de possibles promenades à deux.
Un kilogramme de sable blanc pour avoir toujours sa plage sur soi. (Cinq cent grammes dans chaque poche...).
Un livre qui tombe des mains, qu’il n’empêche pas de regarder le monde et les gens.
Un chagrin latent pour que le bonheur ne soit pas trop envahissant.
Des restes de ton amour, même soldé, même bradé, même au rabais.
Un paysage ouvert, large, généreux et habité pour l'humide des cils et le repos des yeux.
Une source, une fontaine, une eau qui s'écoule pour nettoyer les oreilles des trop attristantes rumeurs du monde.
Tout ce qui n’est pas encore sur cette liste et qui pourrait apaiser les vingt prochaines minutes... ou mieux, les vingt prochaines années...


Bouquet église Lucenay
Ne pas oublier:
Un soupir de rechange pour... après le dernier...

17 juillet 2009

Message très personnel…

S'il vous plait Carole B. arrêtez!

Votre insistance comme à être pesante, elle vire au harcèlement, mais que ce soit bien clair:

Je ne viendrai pas cet été, comme les années passées, à Pantelleria...
Hé oui, Carole, l'amour est comme une porcelaine de moutons de Limoges qui s'entassent sous le tapis gris du canapé de la vie...
Il ne rime ni avec chaise, ni avec médicament et encore moins avec bidon d'huile...
Il est inconstant, incertain, volatile, fragile... Bref, tout ce qu'on déteste.
Alors cet été, pour moi, ce sera la Bretagne Sud: Port Manech, ses tartinades de carpaccio de varech, ses poulpes, ses soleils, ses crachins, ses cirés jaunes, ses pulls en coton à rayures, ses robes armorlux, ses hobbie cat 16, ses tongs en shetland et ses bonnets marins en poils de Tabarly, puis le Vaucluse, ses chaleurs torrides, ses festivals, ses baignades gelées au Partage et ses cigales agaçantes, et, pour finir, le Québec d'avant les grands rouges, ses lacs d’avant les grandes neiges, ses maringouins, ses bières d’avant les grands matches de hockey et ses mariages pieds nus...


Pantelleria, c'est fini...

Bouquet  droses

04 juillet 2009

A toi.

Quoique je fasse où que je sois,

Qui que je croise, quoi que je vois,

Une cheville aperçue

Une ombre dans la rue,

Le sourire d’un enfant,

Le lent d'un pas lent,

Une robe de fille,

Une pierre qui brille,

Une perle sur un cou,

Je me souviens de tout.

Un baiser entre eux deux

Les flammes des feux

Ces mains là qui se croisent

Leurs sourires qui pavoisent

L’arrondi d’une épaule

Des doigts qui se frôlent

L'odeur d’herbe coupée

Je n’arrive à rien oublier.

Un bain dans l’eau verte

Une parole experte

Un soupir expiré

Une date périmée

Une marche en campagne

Le tombé de son pagne

Le souriant d’une réplique

Du savoir qui s’explique

La longueur d’une jambe

Une phrase qui flambe

La force d’un je veux

Ta coupe de cheveux

Un prénom sur le marbre

L’écorce d’un arbre

La chaleur d’un été

Ton parfum entêté

Le bronze d’une peau

Une colline par là-haut

Une bride de chaussure

Le dessin d’une écriture

Un début de soirée

Une gorgée avalée

La naissance d’un sein

L’étiquette d’un vin

Le titre d'un livre

Se sentir un peu ivre

L’espérance d’un quand

Le regret d’un pourtant

La promesse d’un mais

Le tranchant d’un jamais

Ce que je vois, ce que j’entends

Ce que je sais, ce que je sens,

Ce que je lis, ce que j’apprends

Ce que j’espère et j'entreprends

Sans que je sache, pourtant

Le pourquoi du comment

Tout me ramène là-bas,

Où que j’aille, où que tu sois

Tout, tout me ramène… à toi…


Rte de la Collégiale

03 juillet 2009

J’ai souri.

Hier, la journée a été joliment généreuse, puisque j'ai souri...

Quand je suis allé acheter mon journal favori, mais énervant, le vendeur en lisant le titre (Lula, mon plan pour la planète) a lancé: Ferait mieux de s'occuper des bidonvilles de son pays au lieu de s'occuper de la planète... Derrière moi, une toute petite très vieille voix a juste répondu, dans sa barbe, avec un accent inimitable: Encore un qui ne lit pas Deleuze... Je me suis retourné vers elle, elle m'a alors dit: On ne peut pas vendre les journaux et les lire, il faut choisir, tout est une question de choix... Je rencontrai une panseuse, là, ce matin, là, à cet endroit là, à cette heure là. Le moins qu'on puisse dire, c'est que ça débarbouille !

Quand j'ai croisé sur ma route un gigantesque car bondé de touristes du troisième âge, anglais. Le car, noir laqué, flambant neuf, était barré en lettres rouges du nom du voyagiste: Fuckers Travel...

Quand j'ai vu la toute belle Avignon se maquiller pour se préparer à la fête avec toutes ces affiches l'annonçant. La vie, le talent, l'émotion, le partage, l'intelligence allaient entrer en ville.

Quand j'ai vu cet homme, en short, sur les bords du Rhône avec une jambe artificielle qu'il ne cachait pas. Il était tiré par un très vieux chien qui n'avait que trois pattes. Ils faisaient une belle paire, ces deux là.

Quand j'ai appelé Ninon pour avoir de ses nouvelles qui de sa petite voix m'a répondu: "Je vais bien, la greffe de mœlle s'est bien passée, il me tarde de rentrer chez moi, je me languis de ma maison. Je vais passer un bel été". Passe un bel été, ma belle... On peut voir un sourire au téléphone.

Quand j'ai vu sur la plage cette petite fille se débattre avec une serviette plus grande qu'elle. Elle imitait sa mère et souhaitait se débarrasser du sable, mais le vent ne voulait pas qu'elle soit pliée cette serviette: "Arrête, le vent, arrête..." elle lui disait. Une petite fille, c'est bien connu, ça ordonne au vent.

Quand j'ai vu cet oiseau prédateur marquer l'arrêt au-dessus de sa cible puis plonger au tout bord de la plage. Le temps qu'il a mis à sortir de l'eau, puis le vol étrange qui a suivi. Visiblement, il avait mal calculé la quantité d'eau...

Quand j'ai vu ces trois mamies, architectes, maçonnes bâtisseuses, venir sur le sable humide du bord de l'eau, des couteaux, des truelles, des langues de chat en mains. Deux heures plus tard, une Babylone à trois pyramides était bâtie, là, au bord de l'eau. Une Babylone avec des escaliers, des statues, des jardins d'algues, des terrasses de coquillages. Une Babylone éphémère. Puis, leur oeuvre accomplie, elles sont reparties sans se retourner, sans même se baigner.

Quand j'ai vu ce petit garçon manquer d'être emporté par son cerf-volant poussé par un mistral à décoiffer les pajots. Son sourire à lui quand il a tout lâché.

Quand j'ai lu cet article de Marcel Rufo et cette phrase: "Guérir ce n'est pas toujours facile. Etre malade est parfois bien plus confortable", j'ai repensé à Manon, une jeune fille qui nous avait donné plein d'inquiétudes sombres, que j'avais vu la veille et qui m'avait annoncé sa grossesse... La vie l'avait enfin choisie.

Quand j'ai lu ces phrases, allongé comme une méduse molle:"On a l'impression qu'au fond les hommes ne savent pas très exactement ce qu'ils font. Ils bâtissent avec des pierres et ils ne voient pas que chacun de leurs gestes pour poser la pierre dans le mortier est accompagné d'une ombre de geste qui pose une ombre de pierre dans une ombre de mortier. Et c'est la bâtisse d'ombre qui compte". J'ai souri, encore en repensant au titre du livre: Que ma joie demeure.

Quand j'ai vu les manœuvres de cette petite fille pour obtenir de son père qu'il lui achète une glace. Un refus, net, absolu, catégorique, définitif... Ses arguments, ceux dont on se sert toujours: ce n'est pas l'heure, tu ne vas plus rien manger après, elles ne sont pas bonnes ici, ce n'est même pas un marchand de glace... Leurs deux sourires avec leurs cornets à trois boules en mains dix minutes plus tard.

Quand j'ai vu dans la glace de ce magasin de Camargue, l'allure absolument ridicule que me faisaient ces santiags à bouts pointus que j'avais essayé pour voir. J'ai vu.

Quand j'ai aperçu en vitrine cette serviette sur laquelle était imprimée la gueule grimaçante d'un pitbull. On vendait ça? On pouvait avoir envie de s'allonger sur ça? Sans avoir peur de se faire mordre les fesses?

Quand le tout jeune serveur du restaurant, hésitant m'a proposé, au moment du plateau de fromage: "Là, un petit crottin de cheval"...

Quand, alors que le soleil baissait, j’ai posé mes lèvres sur le rebord de ce verre ballon rempli d’un liquide frais, clair et quand il est passé dans ma bouche que je l’ai arrêté, là pour y goûter. J’en ai souri des yeux…

Quand je me suis couché et que j'ai revu tous ces sourires accumulés qu'une seule journée m'avait offert...


Plage Hossegor

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