26 novembre 2011

Gâtés, comme des enfants.

Le cinéma nous gâte en ce moment! 
Je viens de voir un film d'une rare sensibilité, à fleur d'émotions comme on pense à fleur de peau ou de sentiment. Avec de belles scènes de cinéma dedans. Servies, les émotions par une image superbe et une photo magnifique. Portées, les émotions,  par des acteurs fins, drôles, vrais, attachants dont un petit garçon extrêmement touchant.
Un joli plaisir. Il s'appelle, le film, Les adoptés. Il est signé Mélanie Laurent, c'est son premier.
Et il nous gâte... comme des enfants.


Il existe une autre bonne raison d'aller voir Les adoptés: Télérama ne l'a pas aimé!

Et puis, comme une mignonne cerise sur un beau gâteau, je suis allé voir L'art d'aimer d'Emmanuel Mouret. C'est délicat, fin, précis, drôle mais souriant avec de vraies questions complexes dedans et des situations alambiquées juste comme il faut. 
Comme une pâtisserie douce un peu surannée...



24 novembre 2011

Un touchant couchant.

Il m'arrive, certains soir, quand le temps l'autorise et surtout quand je sens que la mayonnaise va prendre, que les blancs risquent de durcir, quand je le vois prendre couleurs... Pour ça, il suffit d'un peu de pratique ou d'expérience. Il suffit de savoir lever les yeux, d'humer l'air, d'être capable de sonder sa transparence ou sa nuagité, sa limpidité ou sa charge. En vrai, il sufit d'un peu de pratique. En s'y mettant de suite, vous verrez ça vient vite!
Donc, il m'arrive, certains soirs, quand je le sens devenir admirable, de grimper sur une hauteur et d'assister au couchant. Une fois installé, il n'y a plus rien à faire. Se poser, se caler et regarder.
C'est ce que j'ai fait, hier soir. Je suis monté au-dessus du petit village de Lagnes vers seize heures quarante cinq...
Et, là-haut, j'ai vu un couchant touchant. J'ai la naïveté, la bêtise, la folie de penser qu'assister à de telles merveilles nous rend meilleurs!
J'y grimpe aussi avec mon appareil photo, pour tenter de l'attraper afin de le partager.
Celui d'hier soir, le voilà...


Et, parfois, en regardant de plus près un des clichés que j'ai pris, il m'arrive d'être   surpris par un détail qui m'avait échappé au déclenchement. 
Comme un cadeau bonux...
Par exemple ce tout petit coeur qu'on aperçoit à droite sur cette deuxième image, juste sous le trait de l'avion de ligne...
En cliquant sur les images, elles grandissent, grandissent et le petit coeur avec...


Tiens, mon Samuel que j'ai, il est pour ta pomme ce p'tit coeur là!

23 novembre 2011

Amoureux.

Hier soir, ça m'a dégringolé sur les épaules et dans le coeur sans crier gare, sans que je puisse rien faire pour rien empêcher, hier soir, je entré dans une salle et quelques minutes après, je suis... tombé follement amoureux.
Mais d'une force...
Comme je ne fais pas dans le demi mesure, dans le riquiqui, dans le restreint, dans le petit bras,  j'ai tombé en amour avec... toute une bande de gens.
Des femmes, des hommes, des enfants et pendant que j'y étais, pour faire la rue Michel, d'une ville ou plutôt un quartier de cette ville.
Elles et ils sont beaux vous allez voir comme!
Marie-Claire... Marie-Claire... Il suffit qu'elle sourie pour que le monde sourit... Il suffit qu'elle dise: "Pas tout" pour que le monde s'éclaire... Il suffit qu'elle entre dans un bar seule et s'assoit pour le seul plaisir d'être là, pour que le bar s'illumine.
Cette rencontre avec le serveur...
C'est simple, dès qu'elle apparait tout fond, sauf la pellicule...
Michel, un condensé d'humanité bonne, bienveillante et attentive...
Raoul, un ami qu'on aimerait avoir comme ennemi, aussi, pour que la vie soit plus douce...
Denise, une douceur, une tristesse qu'on souhaiterait réparer...
Gilles et Flo des enfants qu'on pourrait aimer avoir eu...
Robinson, le commissaire qu'on choisirait si on devait en avoir besoin...
Et même Grégoire, même lui, et là, c'est une prouesse et ses choix douteux.

Un grand moment de cinéma... Merci, du fond du corps, mesdames et messieurs les Guédiguian.


... Ouvrons aux deux enfants. Nous les mêlerons tous,
Cela nous grimpera le soir, sur les genoux.

Ils vivront, ils seront frère et soeur des cinq autres.
Quand il verra qu'il faut nourrir avec les nôtres
Cette petite fille et ce petit garçon, 
Le bon Dieu nous fera prendre plus de poisson. 
Moi, je boirai de l'eau, je ferai double tâche, 
C'est dit. Va les chercher. Mais qu'as-tu ? Ça te fâche ?
D'ordinaire, tu cours plus vite que cela.
Tiens, dit-elle en ouvrant les rideaux, lès voilà!"

Victor Hugo. La légende des siècles. Les pauvres gens.

21 novembre 2011

Cadeau d'anniversaire.

Pour mon anniversaire, je me suis payé une bagnole.
On est comme ça dans le Vaucluse on fait les choses en plutôt grand. Et puis en ces temps de crise, il faut bien que quelqu'un se préoccupe de la situation des  entreprises automobiles françaises. En ces périodes de récession, il faut bien que quelqu'un se dévoue pour relancer la croissance, non? Ce n'est pas vous qui allez vous y mettre, puisque vous êtes fauchés. Tous. Ou presque. J'en connais quelques uns pour qui tout va bien, merci pour eux. Quelques uns qui s'endorment pour la nuit dans des suites au prix d'un bon salaire annuel... J'en connais quelqu'une, grande amie du précédent dont on découvre qu'elle possède  en plus de tout le reste, une île entière où nous ne pouvons même aller, pouvons pas nous payer le billet éco, qui ont de petites réserves dissimulées ici ou là... Surtout ne pas s'en faire pour elles, malgré leur grand âge... Ou alors serait-ce à cause de lui? Elle ne savait plus ou elle avait bien pu les mettre, les cassettes... Se souvenait-elle seulement qu'elle les avait planquées?
Bon, moi, je n'ai aucune boite ou alors elles sont bien vides. Pourtant, je me suis quand même payé une bagnole. Et volontiers, avec entrain en plus.
Je suis allé passer quelques jours à Annecy, quand j'écris quelques c'est deux qu'il faut lire...
Annecy est une ville magnifiquement paisible au bord d'un lac merveilleusement plat entouré de hautes montagnes d'où déboulent des torrents de fromage, des kilotonnes de tome. Sur une des hauteurs de la ville, on trouve un joli château. Pour y accéder des rampes et sur ces rampes, des gens habitent dans des maisons un peu sombres. Autrefois, quand les châteaux n'étaient pas des musées, il n'y avait que le châtelain, le gars d'la haute, qui avait droit à la lumière... Ce qui est somme toute désespérant puisque RIEN n'a changé. Au puissant la lumière, aux petits la pente... "Les escaliers de la butte sont durs aux miséreux...". Je m'égare.
Dans une de ces maisons, j'allais passer quelques jours et fêter mon anniversaire. Seulement voilà, les pauvres ont le droit de rester quelques instants dans la côte pour décharger leurs voitures, mais pas plus. Ensuite, ils doivent les remonter plus haut, les parquer, pour que les touristes ébahis puissent monter sans être gênés par leurs présences.
On a déballé nos sacs. Et je suis remonté dans la voiture pour effectuer une jolie marche arrière et la remonter sur le parc au pied du château, bien content que Mossieur le Comte ait consenti à ce que je me range à ses pieds.  J'en ai oublié les deux blocs en béton qui barraient la descente. La jante n'a pas aimé du tout, le pneu l'a copiée. L'aile arrière fut toute emboutie et le bas de caisse aussi. Et le bas de caisse aussi...
Voilà comment je me suis payé une bagnole pour mon anniversaire...
Je ne remercie pas la maison Peugeat qui a, soit disant, équipé ses véhicules d'un avertisseur de choc... Avertisseur de choc mes genoux! Il devait faire la sieste, lui. Saloperie d'électronique!

Il m'arrive tellement d'ennuis en marche arrière que c'est décidé: demain j'apprends la marche avant...



La rampe du Château...


Dachriosérum 7 cc.










Ah... Le coeur du lac... Glace avec teintes, glace sans glace, eau si limpide, clairière dans le tumulte et le roux profond des forêts profondes d'où coulent à flots continus des torrents de tomes, réserve de paisible, océan nain de calme et esse de paix... 

Avec ou sans la Martine j'ai aimé cet endroit là!

... Aimons donc, aimons donc ! de l’heure fugitive,
Hâtons-nous, jouissons !
L’homme n’a point de port, le temps n’a point de rive ;
Il coule, et nous passons ! ...

Que le vent qui gémit, le roseau qui soupire,
Que les parfums légers de ton air embaumé,
Que tout ce qu’on entend, l’on voit ou l’on respire,
Tout dise : Ils ont aimé !
Entendu cette phrase qui colle à merveille à tout ça: Quand on est heureux, il faut être content!

18 novembre 2011

Ce matin

En se levant, le soleil a foutu le feu au pare-brise à demi gelé.
Les plaines alentour étaient surprises et déjà blanches de givre,
Aux arbres, les misérables dernières feuilles, encore accrochées
Croulaient, alourdies, sous le poids lourd et cassant du gel.
L'air pinçait les joues, mordait les oreilles et serrait les poumons,
Nos mains cherchaient la chaleur dans le fin fond des poches,
Nos narines étaient enrougies par les gifles des rafales,
Nos pas s'accéléraient dru pour nous éviter l'engourd...


Pas de doute: il était, désormais là, comme chez lui,
Plus d'espoir, il s'était, ici, pour quatre mois, invité...
Que cela nous plaise ou pas, nous allions devoir vivre avec.


Alors, couvre toi bien le coeur, assieds toi sur la première marche,
Pense aux joyeuses et jolies  mesanges qui vont se cailler les plumes,
Et regardons le faire, un peu...

11 novembre 2011

Un monde amer.

Une deuxième nouvelle pour le concours de nouvelles de Vaison La Romaine...


Un monde marteau.
___Ça a commencé comme ça.  Moi, j'avais jamais rien dit. Rien. C'était très clair entre nous. J'ai jamais rien dit sur sa façon de vivre. Je la prenais comme elle était. J'essayais pas de la changer. J'étais pas fou. Pas grand monde y serait arrivé. Pas plus moi qu’un autre. Je l'aimais, c'est tout....

J’entendais cette litanie depuis deux jours. Elle finissait par me bassiner, elle m'éreintait, elle m'exténuait, elle me courait sur le haricot. Mais c’est, pour l'instant tout ce qui sortait de sa bouche de pourri. La saleté d’ordure, je ne voyais pas d’autre noms pour ce genre de type qui lève la main sur leurs femmes, ne savait que psalmodier ces quelques phrases.  Et, cette enflure, il l’avait, autre que levée, sa putain de main… Tout juste si de temps en temps, ce salopard ne se mettait pas à pleurer comme un saule. Mais sur son sort. Je l’aurais baffé. On l’avait alpagué au plein milieu du boulevard, un marteau sanglant dans une main, quand même. Le légiste en avait compté trente deux. Trente deux. Des coups. De marteau, les coups. Il l’avait démolie. On se demandait encore à quel moment et pourquoi il s’était servi du tournevis. Douze, des coups. La plupart dans le cou. Un cruciforme, mais lui, il l’avait laissé sur place. Près du corps étendu, baignant dans une mare de sang à même le carrelage glacé de la salle de bain. Va savoir ce qui se passe parfois dans leurs têtes de déglingués...
___Prends nous pour des passoires, vas-y mon gars ! Fais-toi plaisir ! Tu sais quand même qu'à ce train là, tu es parti pour trente ans de cabane. Un par coup, en somme. 
Ce virus nous servait des :
___Et j’ai trouvé ma femme dans cet état, quand je suis entré, il n’y avait plus rien à faire, j’ai ramassé le marteau machinalement, j’étais secoué et je venais vous voir quand vous m’êtes tombé sur le dos…
___Le téléphone, dis, pourriture,  c’est  que pour les papes, le téléphone ?
___ J'avais les mains pleines de son sang, j'étais bouleversé.
Un putain de bricoleur, aussi que ce gars là. On a fini par apprendre qu’il avait acheté tout son matériel (dans le lot, il y avait aussi une pince multiple, une coupante et une tenaille mais il ne s’en était pas servi de celles là, heureusement, on en tremblait…),  juste une petite semaine avant le crime chez Mr Brico. Le vendeur qu’on était allé interroger se souvenait bien de lui. Et pas dans des termes très élogieux. Un vrai casse couille avait-il témoigné familièrement. Mauvais genre, mais bien vu... Il a repris: Du solide, il voulait des outils solides, pas de ces trucs chinois qui pètent à la moindre difficulté. Il a laissé tomber la sentence apprise par coeur: un bon outil, c’est la moitié du travail fait… Putain, on lui demandait pas non plus une thèse, à çui là… C’est bon, c’est bon… On va noter tout ça…
Nom de Dieu de nom de Dieu, le monde était devenu un opéra fou et nous étions debout aux premières loges. On y assassinait les petites filles à coups de couteaux après deux verres dans le nez, on s'y déclarait la guerre pour un tuyau de gaz, on y laissait mourir de faim des peuples entiers sous prétexte qu'ils étaient loin, qu'on entendait pas leurs cris d'ici, on y frappait sur les femmes comme on dégomme des chamboule tout à la fête foraine et cette sinistre liste pourrait s'allonger encore de quelques pages sans qu'on arrive à en voir le bout. Pire, on se contentait, la plupart du temps de compter les points. On se le disait souvent ça : Nous sommes sur un paquebot ivre et on ne voit  pas les issues de secours. On avait posé nos fesses dans un train dément dont les freins avaient lâché depuis belle lurette. On ne se demandait plus si on allait s’écraser ou couler corps et biens, mais QUAND ça nous arriverait. Et malgré cette conscience froide là, il nous fallait quand même continuer nos enquêtes sur ces hordes de barbares menteurs comme des arracheurs de dents, contre des voleurs escrocs et pour certains meurtriers sans foi, ni loi, ni honte, ni remord, ni regret, ni sens moral… Nous avions dans la bouche, en permanence  une amertume. Pour nous, Le monde était amer... un torrent de fange folle… Et nous devions le stopper avec les doigts. Nous en  sommes les dernières digues, avec les urgences et les pompiers. Si nous lâchons c’est tout le système qui lâche…
___Ben dis donc t’as pas trop le moral toi, aujourd’hui ! Tu devrais te reposer un jour ou deux, filer à la campagne voir s’envoler les canards sauvages, admirer les reflets bleus sur le  miroir du lac, assister au passage silencieux des nuages sur le dos des champs, entendre le silence étendu des brumes, le chant des mésanges qui nous sauvera de tout, monter sur la colline pour prendre un peu de recul, aller regarder l'ensemble, mais d’en haut… Ça te ferait certainement du bien parce que là tu as mauvaise mine, gars…
__T’occupe de ma mine ! Elle a un rat à débusquer, ma mine !
__ De qui parles-tu ?
__ De la crapule qui a trucidé sa femme à coups de marteau et de tournevis. Il nous fait le coup de la blancheur candide ce saligaud…
__ Et vous avez quoi contre lui ?
___Bien sûr, il était un peu jaloux, comme tout le monde et lui,  il avait de quoi! Apparemment, elle, c’était une fille impossible à foutre en cage, comme un joli courant d’air, un vol de passereaux, un banc de poisson. Tous ceux qui avaient essayé de la grapiner s’en étaient mordus les doigts. Elle les avait planté là, sur le champ. Celui qui allait réussir à l’entraver n’était pas né. Lui, il s’était équipé une petite  semaine avant en outils de bricolage qui ont servi au meurtre.
___ Si on doit arrêter tous les gusses qui passent leur samedi à Casto on a pas fini…
___Ah oui, on l’a arrêté à peine deux heures après la mort présumée, une des deux armes à la main, le marteau, ensanglanté, hébété, hagard… Pas net, quoi !
Depuis, on cherche dans tous les coins, la routine. On cherche surtout à savoir où ils en étaient les deux. Douze ans de mariage, douze piges de vie commune on devrait trouver des traces de quelque chose, non ? Z’ont bien dû s’engueuler un peu avant pour en arriver là, non ? Il n’est pas passé directement du romantisme à l’âge de pierre, le lascar. Ils avaient bien un contentieux, les deux tourtereaux !
___Et il dit quoi, lui ?
___ Lui ? Qu’il l’aimait. A crane fendre! Qu’il n’avait jamais rien fait contre elle, qu’il n’avait jamais protesté contre sa façon de mener sa vie, qu’elle était libre d’elle même, qu’il savait qu’elle était comme une anguille mais qu’il avait été prévenu, qu’il savait à quoi s’en tenir, qu’il l’avait épousée en connaissance de cause et qu’il était juste heureux de l’entendre rentrer le soir, enfin certains soirs, pas tous. Mais qu’il s’en foutait qu’il préférait être avec elle comme ça que sans elle. Qu’il n’aurait jamais levé la main dessus que ça n’était pas dans sa nature, alors un marteau, vous pensez bien, encore moins…  Qu’il donnerait cher pour qu’on attrape le fêlé qui lui a fait ça et qu’il mériterait, celui-là,  d’être en cabane pour le restant de ses jours…

C’est trois jours après les obsèques qu’on a arrêté le vrai meurtrier. Un des amants de la belle qui ne supportait plus de ne pas l’avoir pour lui seul. On l’a chopé qui rôdait rongé de remords près de la tombe fraîchement refermée.
Putain d’amour ! Quand on a la chance de le connaître,  on meurt de peur de le perdre et quand il nous manque, on devient fou...
___ Belle épitaphe ! Dis, t’es sur que tu ne veux pas prendre quelques jours ? Pour décompresser?
Je te sens vraiment à cran…


06 novembre 2011

Appelez la: Pouliche.

Il y a quelques jours, je reçois un mail de Nathalie du blog Avignon in photos qui me fait part d'un concours de nouvelles organisé à Vaison la Romaine: 

8e concours de nouvelles
Du 15 octobre 2011 au 25 février 2012
Désormais manifestation biennale, Vaison-la-nouvelle aura pour thème en 2012 la fiction policière sous toutes ses formes :
Les nouvelles policières devront impérativement commencer par les premiers mots du Voyage au bout de la nuit de L.-F. Céline : ‘Ça a commencé comme ça. Moi, j’avais jamais rien dit. Rien.’… et nous entraîner dans l’univers du Polar.
Je me mets au travail. (Enfin travail, il faut l'écrire vite!). 
Et, quelques jours plus tard, voilà le plaisir, je vous propose ma pouliche du concours:


Au bout de l’ennui.

Ça a commencé comme ça. Moi, j'avais jamais rien dit. Rien. À peine bonjour. J’avais pas eu le temps, faut dire. Ils n’allaient pas me reprocher ça tout de même?
Voilà exactement ce qu’était en train de se dire le gars menotté au siège qui accueillait sans entrain particulier sa paire de fesses. Ça faisait bien un couple d’heures qu’il était assis là sans qu’aucun type qui allait et venait dans le bureau ne s’adresse à lui, ni même lui jette un œil. C’est bien simple, il avait finir par penser que pour eux, il n’existait pas. 
La vérité n’était pas loin.
Les quatre ou cinq gugusses qui bougeaient comme des carangues dans ce fatras incroyable, entraient, sortaient, téléphonaient, s’invectivaient, passaient un coup de fil, se parlaient à voix basse en le regardant bizarrement, prenaient un dossier, en extirpaient une chemise, l’ouvraient, lisaient une feuille, rangeaient la chemise en ouvraient une autre, appelaient un collègue dans le bureau d’à côté, lui posaient une question à propos d’une date ou d’un événement, tapaient la réponse après avoir demandé confirmation, ralaient contre cette bécane qui ne marche plus, refermaient violemment un tiroir, s’approchaient du  rectangle de lumière puisqu’on était sous les toits, restaient de longues minutes le regard perdu dans le bleu du jour… Bref, ils bossaient. Sous ses yeux sans s’occuper une seule demi seconde de lui.
De temps en temps, sans résultat, je demandais à un gars qui passait à portée s’il pouvait me filer un verre d’eau, il faisait une chaleur à sécher un dromadaire, forcément puisqu’on était sous les toits et qu’ils n’avaient plus droit d’ouvrir les fenêtres de toits, depuis qu’un type dans mon genre en avait profité pour tenter de filer en s'envolant. Par le haut! Il avait eu sacrément tort. Ce n’est pas tellement le fait qu’il se soit écrabouillé en bas pendant une garde à vue, qui les avait tant chagriné, c’est surtout que ce con soit tombé pile sur le toit d’une de leur bagnole garée dans la cour (En faisant ainsi, une Weegee de toute beauté!) et qu’avec les restrictions de budget dans l’air, ils n’étaient pas près de voir la peinture d’une nouvelle mégane. Ça oui ça les emmerdait gravement. Alors, ils préféraient transpirer un peu. Et puis, ils se disaient aussi que ça créait un certain climat plus chaleureux, davantage propice aux confidences. Un sauna de vérité en quelque sorte. Quand même, j’aurais bien bu un verre ou deux. Bien qu’il ne soit  que dix heures du matin. Deux heures que j’étais là, assis, sur ma chaise, comme un gland. Avant de me tirer jusqu’à l’étage, ils m’avaient fait mariner dans le coffre de leur bagnole. En rigolant comme des baleines : On a plus de place à l’arrière, tu verras, dans le fond, c'est tout confort, il y a de la moquette ! Puis ils m’avaient enfourné dans le noir comme une grosse dinde. Et sblam la porte ! Ah nom de Dieu, il y a des réveils plus agréables, je m’étais dit, une fois plongé dans le silence feutré. Mais je n’avais pas protesté, ni rien gueulé, j’avais vite compris que ça ne servirait à rien. Qu’en tous les cas, ça n’arrangerait pas mes affaires. Et puis ces deux plombes posé dans ce bureau, comme un imbécile dans une forêt de nobels. Perdu.
Je me suis revu au tout début, à l'aube claire, vers six heures, à l'heure où bleui la banlieue, au moment précis où ils ont tapé à la porte !  Ce sont leurs coups qui m'ont tiré du sommeil. Oui, par les cheveux. Quand je suis arrivé dans le couloir, ils y étaient déjà, une dizaine, des brassards rouge au bras. J’espérais qu’ils n'avaient pas ouvert la lourde à coups de pieds  parce que si oui, ils ont dû le sentir passer. Je venais à peine de faire installer une blindée, sécurité cinq points qui pouvait, selon le serrurier résister à tout et qui m’avait coûté un bras. Sauf qu’ils l’ont ouverte en moins de deux les types. Avec un bélier en acier. Ils ont tout arraché. J’ai souhaité qu’ils aient souscrit  à une bonne assurance…
C’est un hurlement qui venait du bureau d’â côté qui m’a sorti de ma porte.
Nom de Dieu ! Ou le gars était douillet ou il en recevait une bonne. Puis, très vite, je me suis dit que ce devait être du cinéma pour m’impressionner. Ça, il savent faire. De la mise en condition qu’ils disent. Comme les déglingos de la Bac. Les garçons vachers qui défouraillaient leurs pétards pour un oui et surtout pour un non. En vrai, ils font semblant, désormais, ils ne tapent plus, sur personne dans la police. Ou alors entre eux. Tout se sait, maintenant. La moindre gifle risque une palme d’or. C’est dans les vieux films noirs qu’on voyait ça, les coups d’annuaire sur le coin des museaux. Avec l’arrivée d’internet, voilà belle lurette qu’il n’y a plus d’annuaires dans les bureaux de police. S’ils devaient à chaque fois frapper avec leurs portables… Pour l’instant, ou ils cognaient vraiment fort ou le bureau d’à côté était sous C4. Ça faisait un barouf du diable. Puis, un des gars, hirsute, rougeaud est entré. Rien, pas un mot, il ne m’a même pas regardé, celui-là. Je commençais à m’ennuyer sévère. Ça devenait limite désobligeant cette façon de ne me prêter aucune attention. Je n’aurais pas été là c’était pareil. Sauf que mes poignets devenaient douloureux, une envie de pisser m’arrivait du bas ventre, j’avais soif, j’en avais marre d’être comme un vase sans fleurs sur une chaise sans âme.
J’ai tenté un : Dites vous êtes gentils, messieurs, vous pensez un peu à moi ? A celui qui déjà ressortait en marmonnant : T’inquiète, on fait que ça mon gars, on fait que ça que ça, tu vois bien !
Ensuite, il y a eu une longue très longue période de silence.
Une ambiance de fin d’été après le départ de la dernière hirondelle…
Et puis, un des agités, suivi de deux pontes, ça se sentait de suite que c’en était, ça s'est vu à leur mise, sont entrés à leur tour dans le bureau.  Ils ont donné l’ordre au sous fifre de me détacher, fissa. Comme si ça allait chauffer pour son matricule. Ils avaient l’air plutôt embarrassé… Emmerdé, même. Ils prenaient, maintenant, soin de moi comme si j’étais un moineau fragile. Je ne comprenais plus queue dalle à rien. Et ils s’excusaient à tours de bras et vous avez été bien traité au moins, et que tout ça c’était la faute à vraiment pas de chance.
Bon Sang ce qu’ils étaient ennuyés ces deux là ! Une double péniche pleine à ras bord d’ennui.
Si je n’avais pas eu si mal aux poignets j’aurais eu de la peine pour eux.
Alors, ils m’ont expliqué que leurs cons de flics (leur ton revenait à dire ça) s’étaient juste trompés d’UN étage… C’est au sixième qu’ils devaient taper, pas au cinquième. On se dit souvent, sous le manteau, qu’ils ont des lacunes en calcul, mais à ce point ! 
A partir de là, j’ai un peu profité de la situation et je dois dire que je me suis bien régalé, mettez vous à ma place… J’ai fait ma minaude : Je vais voir, avec mon avocat, la suite que vont prendre les évènements, nous allons décider si je porte plainte ou pas… 
Une vraie marinade.
Histoire de les enquiquiner… De me venger ? Oui, aussi.
Un quart d’heure après, j’étais dehors… Tout juste s’ils ne m’ont pas raccompagné. Je les ai senti à deux doigts de me payer une thalasso. En insistant, je passais la Noël aux Maldives aux frais de la Princesse...
Ils m’ont appelé un taxi. On est en train de vous réparer la porte, de repeindre le couloir et de faire un brin de ménage… Affables comme un duo d'Esope...

De cette journée passablement emmerdante, j’ai fini par écrire une nouvelle en témoignage. En cette période ou tout le monde écrit sur tout, témoigne sur tout,  ou n’importe quel pauvre diable à qui il arrive une misérable petite mésaventure de rien  se répand sans aucune vergogne dans tous les médias, pourquoi pas moi ?
Il n’est peut-être pas si difficile d’être aussi con que les autres, je me suis dit.
 
Le début faisait: « Ça a commencé comme ça. Moi, j'avais jamais rien dit. Rien. »
Ça ne sonnait pas mal, j'écrivais avec les oreilles et, sur ce coup, même si ces phrases me disaient quelque chose je n'étais pas trop mécontent de moi. 

En vrai, ce qui me faisait sourire, c’était le titre : Voyage au bout de l’ennui… 

FIN

05 novembre 2011

Les ders des ders...

On a fait les derniers deux cent kilomètres dans l’inquiétude, la tension, les rafales de vent, une pluie giflante et la bagnole.
Et, malgré ça, on était quand même heureux de rouler. On avait quitté la ville vers la fin de l’après-midi pour quatre jours de repos dans la maison, enfin le cabanon qu’on avait  fini par acheter en pleine Ardèche.  En vrai, c’était une ancienne bergerie  sacrément confortable pour les moutons, pour l'instant un peu moins pour les humains. Depuis deux trois ans, tout notre fric y passait. Ça avait commencé par le dessus, puis le dessous du toit, les tuiles et l’isolation, ainsi que l’abattage, durant l’été, de quelques murs à l'intérieur, l’ouverture de quelques fenêtres plein Ouest et le dégagement sur l’immense vue sur la vallée de l’Eyrieux qui était d'une absolue merveille. On y jetait un regard à chaque fois qu'on passait devant et ce n'était jamais la même lumière, jamais le même paysage. Demeuraient encore, au creux de cette rivière,  des souvenirs de jeunesse et notamment une amende pour une baignade à poil, dont le papier bleu a longtemps trainé dans un cadre sur tous les murs dans lesquels nous avons habité... Dans, la bergerie,  face à la vue, nous y remettions durant des heures, le soir à l’intérieur quand le temps s’en mêlait, le plus souvent possible à l’extérieur quand il le permettait. C’était du reste bien lui le Maître absolu, d’à peu près toutes nos occupations d'ici. Nous étions gouvernés par le ciel, les nuages et les collines et cela ne nous déplaisait pas. Quand il était clément nous relevions la tête, quand il était en rogne, nous la rentrions dans les épaules et cessions de faire les malins. Mais il ne se passait pas une journée où nous ne  disions pas: On est bien, ici, n’est-ce-pas?  Qu'est-ce que c'est beau! Et puis calme! Et cette vue ! En attendant mieux, on avait, aménagé dans la partie supérieure, nouvellement créée, une sorte de dortoir, alors que le bas,  lui, était une seule grande pièce à vivre avec une cheminée où l’on pourrait, si l’envie nous en prenait, y faire rôtir un bœuf. Comme on était végétariens ça n’arriverait jamais mais qui peut le plus peut le moins. A sa vue, les carottes, les courgettes et les navets faisaient profil bas. Si on s’était saigné aux trois veines pour l’acheter, il nous restait la quatrième pour faire les trajets et piller les magasins de bricolage. On y venait le plus souvent possible. C’est à dire qu’on descendait (je devrais dire on y montait puisqu’à partir de Valence ça grimpait raide…) dès qu’on avait trois jours devant nous. Il y avait encore pas mal de bricoles à terminer et on aurait aimé finir tout l’intérieur cet hiver pour s’attaquer au jardin, enfin, à l’extérieur, au Printemps pour avoir un été de repos.  Cette fois, on avait décidé de partir malgré l’annonce météo d’une fin de semaine neigeuse et très perturbée. La saleté d’anticyclone, étant allée faire un petit séjour au-dessus de l’Islande, cela  ne nous amènerait rien de bon de là-haut. Mais l’envie d’être au hameau étant bien plus forte, nous avions rempli le coffre de quoi vivre les quatre jours et nous avions pris route. Nous avions assez rapidement quitté la capitale, nous nous étions engagés sur l’autoroute comme qui rigole et nous avions traversé, sans les voir, la nuit étant déjà bien avancée,  les  apaisants paysages de l’Yonne et l’Auxois à vitesse raisonnable. Lyon était passé comme une lettre à la poste et sous Fourvière nous avions été bien à l’abri de ce qui commençait à descendre d’un ciel salement noirci. Peu après la traversée de ce tunnel souvent maudit, nous devions plus ou moins longer le Rhône et ensuite virer à droite pour monter sur les plateaux. Ça a commencé à vraiment se gâter au ventre même de cette montée. La flotte qui nous avait accompagné pratiquement depuis le départ, s’est peu à peu transformée en flocons qui à l’aide du froid ont gentiment blanchi les bords de route, puis les parties où on ne roulait pas. Ajoutez la fatigue et la  nuit et vous avez une idée assez précise de l’ambiance générale. Nous avions maintenant hâte d’y être. Ce n’était rien de le dire.

On a fait les vingt dernières bornes dans le soulagement, le froid et à travers des rideaux épais de neige épaisse. On roulait à très faible allure, dans le mitan de la route puisqu’on commençait à ne plus rien voir d’autre que du blanc dans les lumières blanches des phares blancs. Après quelques glissades, nous sommes finalement arrivés au dernier village avant notre hameau. Il n’y avait pas âme qui traîne dans le secteur et franchement on ne pouvait en vouloir à personne. Il fallait être dingue ou parisien pour rôder dehors avec cette apocalypse. Pour tomber dru, ça tombait dru. Des flocons gros comme des gaufres au sucre recouvraient les arbres la voie et le monde d’un blanc lourd et gelé. On a fini par déboucher au carrefour qui monte au hameau. Vu ce qui continuait de descendre du ciel, nous avons décidé de faire le reste du chemin à pied. Nous nous sommes chargés de l’indispensable pour passer une soirée agréable. Dès que le feu serait allumé, dans le foyer, avant de quitter l’endroit, nous préparions toujours une flambée pour l’allumer dès notre arrivée, qu’elle nous réchauffe le plus vite possible. Nous savions qu’une fois entrés, il n’y avait qu’une demi-heure à attendre pour être bien. Plus qu’il n’en faut déboucher une bouteille… Nous avons fermé la bagnole et nous nous sommes mis en route, en nous suivant de près. Du carrefour, il fallait prendre un vague chemin très peu empierré qui montait droit sous les châtaigniers. Là, au moins l’épaisseur de la neige ne nous empêchait pas trop d’avancer. 

On a fait les cent deux derniers mètres à tâtons, au jugé en se gelant et les fesses et les mains. Ça a sérieusement dégénéré quand on est arrivé au hameau, à découvert. Là, ce n’était plus une vague couche de blanc mais une bien belle hauteur. L’altitude aidant, il y en avait un bon mètre. Nous n’allions pas renoncer si près du but. En nage, fumants,  harassés, nous avons continué.

On a fait les vingt derniers mètres, nos bagages sur la tête, en levant les genoux comme de pauvres ours blancs en séjour de rééducation. Nous sommes enfin arrivés exténués, suffocants devant la porte de la maison… Nous avons un long moment cherché les clés dans le silence absolu de cette nuit neigeuse. Sans les trouver…
 Nous ne nous sommes même pas disputés, nous ne nous sommes rien dit. Nous sommes redescendus à la voiture où, là encore, pour nous donner la bonne conscience d’avoir tout tenté nous avons continué pendant une longue heure à farfouiller, jusque sous les tapis de sol dans le froid glacé de cette nuit désormais pleinement blanchie… Puis, il a fallu nous rendre à l’évidence, aucun de nous avait pris les clés avant de partir... Puisqu’on on était absents de cette maison  la plupart du temps, on  avait rudement soigné les protections... On savait donc, sans hésiter, ce qui nous restait à faire, on savait qu’à moins de passer par le toit, ce qui ce soir était impossible... On savait qu'à part le gel, PERSONNE pourrait entrer... 

Alors, comme le tire-bouchon était DANS la maison, on a passé la première nuit sans dormir, à se congeler dans une bagnole, un devant, un derrière, sous deux mètres de neige fraîche,  sans dormir à cause du froid, sans boire autre chose que de l'eau en morceaux, dans un silence empesé, comme les derniers des imbéciles à quelques mètres d’un lit douillet, près d’une cave pleine, à un cheveu d'une cheminée où on pouvait cuire un sanglier et à un doigt, trônant sur le buffet de l'entrée, d'une collection de...  tire bouchons... 


02 novembre 2011

Jamais assez.

Nom d'un petit pétard à moustaches! On ne s'émerveillera jamais assez!
En même temps, quand on se mêle vaguement de vouloir essayer d'écrire, de faire naître des histoires et de tenter de les raconter on peut être un poil en rougne contre lui. Je veux dire contre le réel. S’apercevoir que ce salaud est parfois bien plus talentueux que nos pauvres fictions est décidément une douleur...
Pour preuve cette histoire là, lue dans le journal, tout récemment.
Voilà un couple qui s'aime en Bretagne depuis des années. Qu'ils s'aiment en Bretagne n'a aucune incidence sur l'histoire. Ils auraient pu s'aimer en Alsace ou au Quatar de la même façon... Heu non, pas au Quatar…
Ils s'aiment au point d'avoir quelques enfants. Ensemble. Trois, je crois. Si ça n'est pas un fameux critère! Un enfant ce peut être le fruit d'une inattention, deux, déjà... Mais trois!
Je reprends: Robert aime Nadège, ils s'aiment et sont mariés. Ils auraient pu s’aimer sans l’être, ce n’est vraiment pas une condition indispensable, mais eux, là, le sont. De cet amour et d'au moins trois rapports sexuels sont nés trois enfants... Malgré cette apparente mièvrerie pépére, ce petit bonheur tranquille n'était pas complet. Ils avaient, comme on dit, un caillou dans les chaussures. Ouais, un rocher, tu veux dire... Un soir, Robert en mal de confidences, juste après avoir  secoué la nappe, rangé la vaisselle et donné un coup de balai dans la cuisine comme il le faisait tous les soirs pendant que Nadège s’inquiétait de la marche du monde devant le poste de télévision, lui confesse, en lui apportant son café avec un demi sucre, tout à trac qu'il se sent étranger à son corps d'homme et ce depuis bien trop longtemps, que la comédie a assez duré, je ne peux plus ni te mentir ni me mentir à moi-même, Nadège, ma Nadège que j'ai, il faut que je te dise: Au fond du fond, je me sens femme, d'ailleurs, je SUIS une femme! Nadège, un peu abasourdie, au lieu d’enfourcher les six chevaux fougueux d’une colère qu'on pourrait qualifier de justifiée ou alors je ne sais pas ce qu’il vous faut, a laissé tomber : Je me disais… Je me disais bien qu’il y avait un truc bizarre… Toutes ces robes dans tes placards, ce gout des chemises repassées, cette manière de t'asseoir aux toilettes, le temps que tu mets le matin à te maquiller…
Normalement, là tout aurait du voler en éclat, leur union se dissoudre avec son cortège de pleurs, de cris, de gifles voire de haine et de ressentiments. Les enfants auraient dû être partagés,  déchirés, contactés par des émissaires de Delarue, par des maisons d'éditions pour leur proposer d'écrire un livre thérapeutique sur leur histoire tragique, sombrer dans la délinquance, la drogue ou pire, d'adhérer à l'UMP section Jean François Copé... Or, le réel, le talentueux réel s'est chargé d'apaiser tout ce bazar naissant.
Après un long silence, le visage de Nadège s’est éclairé comme dans un de ces tableaux de De la Tour, une larme a perlé sur sa joue rougie par l’émotion, elle lui a seulement dit : Robert, mon Robert d'amour, j’ai aussi quelque chose à t’avouer : Figure-toi que je suis homosexuelle ! Et que donc ça roule vachement bien quand même qu’on se soit rencontrés ! Les bras leur en sont tombés c’est pourquoi ils ont mis un petit bout de temps à s’enlacer… Et puis, le bonheur a, dans la pièce, tonitrué… Le seul petit couac dans cette merveilleuse histoire c’est ce vilain mot de vaginoplastie qui est venu assez vite dans leur conversation….
Malgré ou à cause de lui, Robert est vite devenue Blanche... Nadège, malheureusement s'est toujours appelée Nadège... Le foyer n'a pas été éteint, le village où ils vivaient a mis un peu de temps à se faire à la nouvelle donne, à bien repérer qui était qui, mais tout le monde y a mis du sien. Il n'y a que leurs enfants qui eux s'en sont pas mal foutus: Tous ça c'est leurs histoires de grands qu'ils ont dit...
Le ciel est redevenu bleu, ce qui, dans le fin fond de la Bretagne profonde n'était pas gagné...
En finale, si tout cela n'est pas une merveilleuse leçon d’optimisme pour tous les couples claudiquant, fonctionnant à traine patte et se demandant dans quel état sont-ils encore ensemble, qu'est-ce?
Ô... S'émerveillera-t-on, jamais assez, des tortueux sentiers de traverses que l'amour, l'Amour, cet increvable pugnace, cet incroyable persévérant, cet indécrottable optimiste, sait parfois  emprunter pour finir, enfin, par arriver à ses fins...




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