07 février 2013

Le mot.

Pour les Impromptus littéraires de la semaine. Le thème était un mot sur le frigo.


Enfin, voilà une journée qui commençait bien. 
Comme si les anges commençaient à revenir voler dans mon coin de ciel. Il faut dire que depuis plusieurs mois j’avais sacrément reçu… Les anges avaient émigré ou bien ils étaient restés sur le tarmac. Le ciel s’était vidé et moi avec. D’abord elle, elle avait fait son sac. Après trois jours de vie commune, elle avait décidé que j’étais invivable. D’un côté elle n’avait pas vraiment d’endurance, de l'autre, elle avait bien fait de ne pas attendre, de ne pas s'installer. Ainsi, je n’avais pas eu le temps de trop m’attacher et me connaissant comme je me connais, je sais bien que j’aurais été incapable de lui demander de partir. Bref, fin d’une histoire d’amour égale possibilité d’une à venir. Cependant, j’ai marqué un peu le coup, elle était si joyeuse, si légère et repassait si bien… Elle avait fichu le camp juste au moment où je me faisais virer du boulot d’imbécile que j’avais pris pour payer mon loyer. Une période noire, je vous dis. Mais là tout allait changer. D’abord, je n’avais pas été réveillé par un de ces cauchemars épouvantables qui d’ordinaire, me serraient la gorge et me laissaient défait, exsangue, en nage, avant même le début de la journée. Ce matin là j’avais été  remis au monde par la musique bienveillante et joyeuse, la danse des sauvages extraite des Indes Galantes de Rameau. Avec cette belle énergie, un rai de lumière m’avait pointé du doigt au travers des persiennes. Le soleil qui nous avait abandonné toutes ces dernières semaines semblait vouloir remontrer le bout de ses rayons dans le quartier. Je m’étais déplié, levé et j’étais descendu, sans douleurs articulaires excessives,  sans me prendre les pieds dans le coin, depuis six ans, relevé, du tapis. J’avais atterri devant la porte étincelante du réfrigérateur sur laquelle était collé un post-it jaune fluo. 
Tout, tout ce matin là, se passait merveilleusement bien.
Dessus, le post-it il était écrit :

Si tu veux qu’elle soit belle, commence donc ta journée par lire ce mot.





17 commentaires:

M a dit…

J'hésite entre la méthode Coué, la teneur du mot ne regarde que moi et vous pouvez toujours courir pour que j'en dévoile le moindre indice... Pour conforter le sourire de cette journée qui commence si bien en espérant qu'il ne vire pas à la couleur du post-it : http://youtu.be/3zegtH-acXE

chri a dit…

@ M Ce n'est pas: "Ca ne regarde que moi!"
Cette musique me rend joyeux!

Brigitte a dit…

Et la journée fut belle, si elle commence si bien .

Michel Benoit a dit…

J'aime toujours autant tes photos !

chri a dit…

@ Merci Michel Ca me fait plutôt plaisir!

véronique a dit…

alors moi, je reste sur ma faim ...pourquoi ne voulez vous rien nous dire de plus ! avouez, c'est vachement frustrant cette histoire

chri a dit…

@ Véronique Il vaut mieux que le lecteur soit frustré que repu, non?

Anonyme a dit…

....Elle avait laissé le mode d'emploi du fer à repasser au dos du post it !!!
Lou, journée romantisme aigu...
;)

M a dit…

L'avantage d'être repu, c'est qu'à priori c'était bon et puis on sait qu'y revenir fera danser le plaisir d'un "encore" !
Le mystère du mot me travaille encore l'imagination...
Je retiens deux mots : belle et journée : c'est vrai qu'un jour qui nait peut faire de nous des chêvres où des agneaux... c'est selon !

chri a dit…

@ Lou Et encore, vous avez remarqué que je n'ai pas parlé de ménage!

@ M Encore... Quel joli mot...

M a dit…

Oh qu'elle est jolie la palissade à la mère Sagan !!! ok je sors... Ceci dit, DANS mon frigo il n'y a pas grand chose à part une herbe à bisons (roses les bisons !)

chri a dit…

@ M C'est ce que je pensais!!! Au congèle n'est-ce pas?
Oui, elle est bien cette phrase là, je trouve, sacré Françoise!

odile b. a dit…

"LE MOT" - invisible pour nous ! - du post-it du frigo, me ramène à celui, toujours tu, recherché, jamais écrit, jamais lu, de cette liasse de lettres jaunies, correspondance amoureuse de plusieurs années des grands-parents paternels de mon mari, découverte au fond d'une malle du grenier lorsque la maison de famille a été vendue...

Angélina et Constant se sont fréquentés pendant 5 ans avant de s'épouser en 1904, après moult tergiversations entre les familles des deux tourtereaux... Leurs rendez-vous correspondaient la plupart du temps à l'occasion bénie de la foire du canton où l'une et l'autre famille avaient des emplettes à faire, la jeune fille profitant de la voiture à cheval pour accompagner ses parents. Le fringant jeune homme disposant d'une bicyclette était, quant à lui, plus libre de ses déplacements et virées pour rejoindre celle qui hantait ses jours et ses nuits. Il s'aventurait même parfois, en rentrant de son travail aux papeteries des bords de Sèvre, à 15 km de là, à stopper son bolide pour prendre un verre au café tenu par les parents de la belle Angélina. Il pouvait espérer, par bonheur, l'apercevoir, elle, rosissante, servant timidement les clients au comptoir, et tenter alors de voir la couleur de ses yeux, de la courtiser discrètement et repartir en lui glissant un billet doux avant de quitter les lieux, oubliant parfois, "par hasard", un gant sur le comptoir ou un mouchoir brodé à ses initiales sur la table du café... Prétextes pour la revoir au plus vite.
Pendant 5 ans, les billets pliés en quatre, écrits à la plume et à l'encre violette se sont accumulés, lettres jaunies d'avoir été ouvertes et repliées, lues et relues en cachette, couvertes de baisers, mouillées de larmes... des envolées et d'un sentimentalisme éthéré ou d'un lyrisme romantisme à l'exaltation délirante. Ils comportaient souvent, collée en entête, une délicate marque d'attention : une violette, un brin de myosotis ou de muguet...

Une petite phrase revenait sans cesse sous la plume du jeune homme, impatient de voir la situation évoluer en sa faveur, n'attendant qu'un mot de la belle pour garder encore un peu d'espoir avant de se résigner... La question cent fois posée était invariablement la même :
"Quand, ma belle Angélina, allez-vous enfin prononcer "LE MOT" que j'attends de vous ?"
Le mariage eut lieu le 1904, alors, dit-on, que personne au village n'y croyait plus...

Cette correspondance constitue un pavé d'anthologie qui nous en dit long sur les retenues et le manque d'aise de ces deux-là pour sortir de l'emprise des deux familles respectives qui n'en finissaient pas à se mettre d'accord pour les épousailles de leur progéniture.
On se prend parfois, plus de cent ans après, à scruter les précieuses et trop rares photographies des grands jours, pour tenter de deviner sur ces visages impassibles et jaunis par le temps, la lueur d'expression qui pourrait nous faire lire dans les pensées secrètes et le coeur de nos ancêtres.
Ces deux-là, connus de nous seulement pendant quelques années de la petite enfance, sont restés figés dans nos mémoires, comme d'éternels très vieux grands-parents, d'une époque tellement lointaine, sans mail ni téléphone, sans post-it et sans LE MOT sur le frigo manquant...

chri a dit…

@ Odile A lui seul votre commentaire justifie ma note et même ce blog!!!
Mille et un mercis...

Anonyme a dit…

éh oh. on est lundi. oukilé le mot du dimanche soir ?

:)
Lou

chri a dit…

@ Lou Oh la la mais ça fait longtemps que vous n'êtes pas venue... Le billet du dimanche soir est momentanément suspendu!

Anonyme a dit…

nan nan. je viens toujours en début de semaine. et toujours, j'ai un pti truc neuf pour me régaler les yeux et l'âme...:)
je vous pardonne. que ça ne se reproduise pas.
:)
Lou

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