14 août 2013

Fragile.


 L’instant est si fragile, puisque qu'il n'est plus dès lors qu’il... est.
 Un semblant de paix est fragile, un bouquet de fleurs des champs l'été, aussi     l'est.


Fragile, la rage agile qui nous maintient en vie. L’écume blanche d’une  une vague avant la prochaine? Fragile. Un sourire esquissé sur un visage attristé, un bruissement dans les hauteurs d'un tremble, le vol saccadé d’une mésange apeurée, le rouge d’une gorge, le clin d’un œil, un éclat tranchant de lumière à la surface d’une rivière poissonneuse, un lien soluble comme un pari dans les solitudes d'une ville capitale, l'arrogance du mitron apprenti pétri de mépris pour le pain pas pris, les sauts bruns d’un écureuil dans le vert du tilleul, l'espérance de vie d'un poil sous le passage d'un rasoir trois lames, le contre ut d'une soprane grecque dans un opéra vénitien, le dôme d’une dune devant des envies de vue, le colosse beau molosse de cent vingt kilos,  pilier de combat, puis de bar, qui, rincé par l'annonce d'un départ et quelques litres d'alcool a assasiné sans sourciller une des femmes de sa vie,  la beauté d’une clairière face à la cupidité de bâtisseurs de rien, les heures roses arrosant des horizons irisés, le visage lisse d'une vénus tapageuse de vingt ans,  le clair annonçant un jour de moins à vivre, une gorgée d’un  vieux vin devenu vent, la voix rauque et cadencée d’un humain taureau de Toulouse,  le jaune brûlé d’une feuille avant qu’elle ne tombe dans la lumière soyeuse d’une après midi d’automne, le léger d'une utopie rêveuse sous le poids du réel d'enclume, la permanence du fauve devant le rouge énervant d'une véronique meurtrière,  un souvenir inutile à une mémoire embarrassée, la sieste d'un chat sous le vert d'un charme, le blanc d’une banquise sous les bras de prédateurs armés de gourdins, le destin d’un De Staël à l’appui d’une fenêtre grande ouverte, l’émotion revécue à l’apparition d’un souvenir vivace, une rage d’ado sous la fraise de l’age, le son électrique d’une guitare saturée dans le silence religieux d’un music hall, la force d’un ours troué par la balle d’un chasseur, le rond d’une paire de cerises à une oreille accroché, la majesté d’un chêne abattu par le tranchant d'une chaîne mécanique, le dos gracieux d’un dauphin dansant près d’une dense coque d’acier, la musique d’une langue qu’on ne parle plus, la flamme vacillante d’une bougie bleue sur le noir du chocolat, une goutte d'eau près d'un thermomètre  approchant le zéro, un abdomen  d'araignée sous une pointure quarante cinq, le rouge de trois trémières avant qu’elles ne fanent, une heure et sa brassée de minutes, le mensonge trop grand pour la langue qui le colporte, une minute et sa poignée de secondes, une seconde et sa pincée de centièmes, le filet de vie du corps d’une Marie malade au départ de son éternel voyage, le vol ondulé d’un banc de passereaux dans un ciel fugitif, la merveille d’un paysage sous des désirs partagés d’aller plus vite, le doux sucré d’un fruit par une bouche croqué, les ailes d'une mouche sous une tapette bien maniée, le passage tendre d’une main sur un avant-bras dénudé, un « je t’aimerai toujours» murmuré à l'oreille pressée de l’entendre, l’équilibre d’un océan sous des envies de lotte, les mesures d’une mélodie attrapées au fond d’une ruelle, une tâche de myrtille sous un filet de citron, le souffle léger d’un baiser sur la veine battante d’un cou en attente, les pleurs d’un enfant perdu dans un square désert, cinq colonnes à la une, une truffe au chocolat oubliée sur un radiateur, une bûche blottie dans le feu ronflant de la cheminée allumée, la puissance d’une baleine sous d’industriels filets, la course d’un vol de nuages dans un ciel balayé par le souffle du mistral d'en haut, deux boules de sorbet mangue dans une après-midi torride, le plaisir évanoui à peine ressenti, la gloire factice d'un soir d'élection, les pages d’un livre que personne ne lit, les dix neuf mille trois cent quarante trois jours déjà passés sur cette terre avec le sentiment étreignant que l'écoulement du temps s’accélère jusqu'au vertige, nos certitudes, une note sur le fragile sans jamais écrire le mot éphémère... raté... une conscience pointilleuse, impérative, rigide, une phrase souriante de boulangère, notre morale, notre humanité, une parole envolée, le monde, le bleu de la planète où tous nous sommes, l’avenir, le passé ...
Fragiles.
Tout, tous  si tellement fragiles, et si tenaces à la fois... Exactement comme la vie... 






6 commentaires:

Brigitte a dit…

Un grand merci pour tous ces mots qui eux mêmes deviennent fragiles.
Fragile aussi la question d'un enfant: tu n'as pas vu mes larmes ? Ah non,!!! Pourquoi pleures-tu ? j'sais pas ...instant d'émotion et de câlin .
La vie est d'une grande fragilité.
Bonne fin de semaine Chri

Michel Benoit a dit…

Du blues...du blues...
o_O

*Terre indienne* a dit…

Très beau.
Me vient en mémoire les anges dans le film de W.Wenders "Les Ailes du Désir" lorsqu'ils sont assis dans la voiture au début du film.

chri a dit…

@ Terre indienne Oh Merci...

M a dit…

Sensible ! Moi c'est Bobby qui m'est venu sans doute en contre point...
Mon père et ses verres
Ont les pieds fragiles
Avez vous jamais vu, hein ?
Monter cristaux
Et baccara sur un
Bateau

chri a dit…

@ M Ce cher Bobby...

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