11 août 2016

Du chaos dans mon cabas.

En vrac, 

je t'en veux parce que tu es entré chez moi sans que je t'invite.  Je dis t' parce que je pense que tu étais seul à l'intérieur, mais celui ou celle qui attendait dehors c'est pareil.

Je t'en veux parce que tu es allé dans toutes les pièces, que tu as ouvert tous les tiroirs, forcé toutes les boites,  je te rappelle que je ne t'avais même pas proposé d'entrer.
Je t'en veux parce qu'une fois entré, sans que je t'invite, tu as fouillé dans tout ce qui peut se fouiller et que tu as retourné et vidé  tout ce qui peut se vider et se retourner. Je t'en veux parce que tu as cassé ma porte d'entrée et tu as  rendu, à moi-même, ma maison hostile. Je t'en veux parce que depuis trois jours ta présence farfouilleuse ne s'est pas encore dissoute et que je me demande à chaque instant si je ne vais pas me trouver nez à nez avec un type dans ton genre en sortant d'une pièce.
Je t'en veux parce que j'ai l'impression que tu as attendu que je m'absente pour faire ta sale besogne, que tu me surveillais du coin de l'oeil...
Je t'en veux de ces nuits sans sommeil au beau milieu de l'été.
Je t'en veux de ma colère et de mon abattement.
Je t'en veux parce qu'en ayant fait ce que tu as fait,  tu m'entraines vers la suspicion, la crainte, l'envie de protection, le repli, la défense, légitime, le désir de bonne leçon à distribuer, que sais-je encore, mais tu vois ce que je veux dire tous ces sentiments auxquels la grande blonde  et ses amis font appel, ces sentiments réflexes qui ne vont pas plus loin que le bout de leurs cerveaux... J'ai entendu quelqu'un me dire qu'il faudrait couper la main des voleurs. Couper une main, pour un vol? Tu te rends compte? De ce que tu suscites?
Je t'en veux parce que tu m'as pris un objet auquel je tenais, que je gardais auprès de moi depuis très longtemps, dont je me servais souvent et qui m'avait été offert. Cet objet est évidemment bien plus qu'un objet, il est une histoire et cette histoire est désormais dans une de tes poches, je t'en veux de ça. Elle n'a rien à y faire. Parce qu'elle n'est pas la tienne. On en revient toujours à ça. 
Je t'en veux parce que, bien entendu, tu te fous complètement de tout ça, c'est des conneries, j'aurais pu prendre plein d'autres trucs, j'aurais pu casser, ne trouvant aucun objet de valeur, estime-toi heureux, je n'ai pas touché à ton ordi, à tes photos, à tes souvenirs, à tes livres, à tes cd, alors s'il te plait ne fais pas chier le monde avec ton petit vol si minable, si  banal de fin d'après midi de mois d'Aout. Il va y en avoir combien dans le pays?
Je t'en veux parce que je trouvais que cambriolage est un joli mot.
Je t'en veux de ton manque de respect des règles, des lois, de l'autre.
Ce qui est à l'autre n'est pas à moi. Si je le veux, si ça me plait, je dois demander. Je ne peux pas prendre comme ça ce dont j'ai envie. C'est la base, le minimum syndical pour éviter qu'on se tape dessus, pour qu'on puisse partager le même espace, la même salle d'attente, le même comptoir. Je tiens compte de l'existence de l'autre, je ne lui prends pas des trucs dans son dos quand il s'absente.
Je t'en veux parce que la lenteur des gendarmes, la lourdeur des assurances, le prix de la franchise... Tout juste s'ils ne te soupçonnent pas toi...
Alors bien sûr, ce n'est pas la Syrie, mais je t'en veux aussi de ça: être plongé dans ce sale bain alors que rien ne m'est arrivé physiquement.
Je t'en veux. Et oui, dans un vol on y laisse des plumes...
Une question me taraude: Que vas-tu bien pouvoir faire avec mon vieux bermuda, acheté en solde que tu as embarqué dans le lot? Le porter? Le revendre? L'offrir?
J'aimerais pas être un de tes amis.




Envol d'un pique-boeuf...


6 commentaires:

Tilia a dit…

Un bon texte, reçu cinq sur cinq en ce qui me concerne.

Avoir embarqué votre bermuda, c'est aussi con que d'avoir pris la petite boîte ronde qui contenait les dents de lait de mes enfants.
Con à en pleurer. Que le cul te pèle, sale petit voleur à la manque !

chri a dit…

@ Tilia: Que le cul te pèle et que tes bras soient trop courts pour te gratter! Pas mieux. Pas mieux.

Nathalie H.D. a dit…

Comme c'est bien écrit (décrit), cette fracture, cette effraction qui fait mal.

Mais je ne sais plus si je dois commenter sur la forme (magnifique) ou sur le fond, tant ces intrusions sont violentes.

J' ai eu la chance de ne jamais être cambriolée.
Pas connu ça - pas encore ?

J'aurais aimé que tu nous le décrives, cet objet usuel auquel tu étais attaché, il aurait pris vie par ton récit, il aurait été encore un peu là. Peut-être pour un texte ultérieur ?

chri a dit…

@ Nathalie Je ne peux que souhaiter que tu ne le sois jamais, cambriolée!

Brigitte a dit…

C'est l'année ? Cambriolage chez mon fils beaucoup d'outils et du liquide (caisse des écoles et fond de caisse de ma belle fille)
Mais le hic c'est que pas d'effractions! les soupçons se portent sur les gens avec qui ils ont fait un échange de maison .
Sympa l'échange ...
Un beau stylo, ton stylo... ah le saligaud .

chri a dit…

@ Brigitte Pas mieux!

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