08 mars 2016

Déjeuner en paix.

Pour Les impromptus littéraires de la semaine. Il fallait que le texte comporte certains mots ou verbes conjugués ou pas, ayant trait à la cuisine et qu'il s'y rapporte. Les mots à placer étaient: Julienne, crème, napper, barder, blanchir, assaisonner, cuire, glacer, lier, tamiser.

Julienne c’était la crème de la crème des cuisinières mais elle était accablée d'un défaut déroutant. Contrairement à la cuisine où quand elle s’attelait à un plat elle y mettait toute son énergie, sa concentration et sa rigueur, pour se vêtir c’était  exactement l’inverse. Elle s’habillait au petit bonheur la chance. Le matin, au lever, elle se nappait de ce qu’elle trouvait, de ce qui lui tombait sous la main ou sur les épaules sans y prêter plus d’attention ni d’intérêt et, ce qui arrivait lui convenait. Elle n’y revenait pas, elle n’y apportait aucune correction, elle ne se regardait même pas. Si, par bonheur, elle tombait sur un joli manteau, une étole élégante, un pull soyeux, la belle affaire. En revanche, si elle attrapait un drap housse, une vieille bâche, un plaid vieillissant, poussiéreux décoloré, elle l’endossait, pareil. Quand son homme et ses enfants voyaient ça, ça bardait tant dans la maison que son visage blêmissait, que ses joues  blanchissaient. J’aime autant vous dire qu’on ne se gênait pas pour l’assaisonner sévèrement. Ah ça, il lui en cuisait ! Alors, dès l’aurore,  l’ambiance, d’ordinaire si chaleureuse de la maison se tendait, se crispait, l’ambiance se glaçait. Tous les efforts qu’elle faisait, pour qu’entre eux, les gens restent liés, d’un coup, s’envolaient en fumet.

Il lui faudrait, le midi venu tamiser tous ces sentiments négatifs et se mettre à préparer une belle blanquette, une jolie daube, un copieux pot au feu, enfin un plat familial qu’elle cuisinerait avec amour pour que la paix revienne, enfin, dans la cuisine.
Qu'ils puissent déjeuner tranquilles.



13 commentaires:

Nathalie H.D. a dit…

Eh bien, elle n'est pas confite dans le prêt-à-porter, Madame As-de-Pique. Heureusement qu'elle se rattrape aux fourneaux pour ramener tout le monde dans l'onctuosité d'un plat en sauce !

Mais au fait, pourquoi dit-on toujours fichue comme l'as de Pique ?

chri a dit…

@ Nathalie Bonne question...
"Il faut s’intéresser à la forme du pique sur une carte de jeu pour comprendre l’origine de cette expression qui remonte au Moyen Age. Ainsi, l’as de pique fait penser à celle du croupion d’une poule, explique Delphine Gaston, dans Nos 500 expressions préférées (éd. Larousse).
Partant de cette vision du pique peu reluisante, Molière l’a popularisée au XVIIe siècle, dans sa pièce Le dépit amoureux, où il utilise «as de pique» comme une insulte synonyme d’imbécile.
Ce sont ces deux visions conjuguées de cette carte qui sont à l’origine de cette locution péjorative attestée dès le XIXe siècle, où elle signifiait «avoir l’air d’un idiot qui ne ressemble à rien».
CQFD Merci internet...

Brigitte a dit…

Déjeuner en paix c'est mieux plutôt que de se faire assaisonner !
Bon week-end

chri a dit…

@ Brigitte Quoique, un bon assaisonnement bien poivré...

Anonyme a dit…

Je présume qu'elle a les cheveux poivre et sel ?
Marie.

chri a dit…

@ Marie Bingo!

véronique a dit…

tant qu'elle ne pleure pas comme une madeleine, qu'elle ne rougisse comme une tomate, qu'elle tombe dans les pommes, parce que là ce serait la fin des haricots !

mais là je pense que vous nous racontez des salades Christian !

chri a dit…

@ Véronique Surtout qu'elle était menue, menue...

odile b. a dit…

Pauvre Julienne ! 

Dans sa jeunesse, pour la consoler de certaines petites disgrâces physiques, on lui avait inculqué, en consolation, que : "La beauté ça s' mange pas"... Elle n'avait jamais bien compris cette réflexion, mais ça ne l'avait pas, non plus, incitée à la coquetterie...

Comme, en plus et en même temps, on lui avait seriné dans les oreilles les règles de politesse dans le genre : "À table, on ne parle pas la bouche pleine"... elle avait fait son calcul et choisi de faire dans la bouffe, dans la bonne bouffe, et de leur en fournir à bloc, de quoi leur boucher le bec, à ces morveux, au moins pendant les repas. Et elle, la bouche pincée, les bras croisés,  prenait alors un malin plaisir à les regarder s'empiffrer comme des bestiaux, incapables de dire le moindre mot.

Sacrée Julienne ! Au moins pour un moment, elle avait la paix... 

chri a dit…

@ Odile Mais vous la connaissez bien ou bien?

odile b. a dit…

Très bien même. Vous n'en doutez pas ?

M a dit…

Manquerait plus qu'ils la coupent en petits morceaux... Une de mes tantes s'appelle Julienne, timide et effacée, mais excellente cuisinière , comme quoi !

chri a dit…

@ Ah je savais bien que c'était possible...

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