02 novembre 2011

Jamais assez.

Nom d'un petit pétard à moustaches! On ne s'émerveillera jamais assez!
En même temps, quand on se mêle vaguement de vouloir essayer d'écrire, de faire naître des histoires et de tenter de les raconter on peut être un poil en rougne contre lui. Je veux dire contre le réel. S’apercevoir que ce salaud est parfois bien plus talentueux que nos pauvres fictions est décidément une douleur...
Pour preuve cette histoire là, lue dans le journal, tout récemment.
Voilà un couple qui s'aime en Bretagne depuis des années. Qu'ils s'aiment en Bretagne n'a aucune incidence sur l'histoire. Ils auraient pu s'aimer en Alsace ou au Quatar de la même façon... Heu non, pas au Quatar…
Ils s'aiment au point d'avoir quelques enfants. Ensemble. Trois, je crois. Si ça n'est pas un fameux critère! Un enfant ce peut être le fruit d'une inattention, deux, déjà... Mais trois!
Je reprends: Robert aime Nadège, ils s'aiment et sont mariés. Ils auraient pu s’aimer sans l’être, ce n’est vraiment pas une condition indispensable, mais eux, là, le sont. De cet amour et d'au moins trois rapports sexuels sont nés trois enfants... Malgré cette apparente mièvrerie pépére, ce petit bonheur tranquille n'était pas complet. Ils avaient, comme on dit, un caillou dans les chaussures. Ouais, un rocher, tu veux dire... Un soir, Robert en mal de confidences, juste après avoir  secoué la nappe, rangé la vaisselle et donné un coup de balai dans la cuisine comme il le faisait tous les soirs pendant que Nadège s’inquiétait de la marche du monde devant le poste de télévision, lui confesse, en lui apportant son café avec un demi sucre, tout à trac qu'il se sent étranger à son corps d'homme et ce depuis bien trop longtemps, que la comédie a assez duré, je ne peux plus ni te mentir ni me mentir à moi-même, Nadège, ma Nadège que j'ai, il faut que je te dise: Au fond du fond, je me sens femme, d'ailleurs, je SUIS une femme! Nadège, un peu abasourdie, au lieu d’enfourcher les six chevaux fougueux d’une colère qu'on pourrait qualifier de justifiée ou alors je ne sais pas ce qu’il vous faut, a laissé tomber : Je me disais… Je me disais bien qu’il y avait un truc bizarre… Toutes ces robes dans tes placards, ce gout des chemises repassées, cette manière de t'asseoir aux toilettes, le temps que tu mets le matin à te maquiller…
Normalement, là tout aurait du voler en éclat, leur union se dissoudre avec son cortège de pleurs, de cris, de gifles voire de haine et de ressentiments. Les enfants auraient dû être partagés,  déchirés, contactés par des émissaires de Delarue, par des maisons d'éditions pour leur proposer d'écrire un livre thérapeutique sur leur histoire tragique, sombrer dans la délinquance, la drogue ou pire, d'adhérer à l'UMP section Jean François Copé... Or, le réel, le talentueux réel s'est chargé d'apaiser tout ce bazar naissant.
Après un long silence, le visage de Nadège s’est éclairé comme dans un de ces tableaux de De la Tour, une larme a perlé sur sa joue rougie par l’émotion, elle lui a seulement dit : Robert, mon Robert d'amour, j’ai aussi quelque chose à t’avouer : Figure-toi que je suis homosexuelle ! Et que donc ça roule vachement bien quand même qu’on se soit rencontrés ! Les bras leur en sont tombés c’est pourquoi ils ont mis un petit bout de temps à s’enlacer… Et puis, le bonheur a, dans la pièce, tonitrué… Le seul petit couac dans cette merveilleuse histoire c’est ce vilain mot de vaginoplastie qui est venu assez vite dans leur conversation….
Malgré ou à cause de lui, Robert est vite devenue Blanche... Nadège, malheureusement s'est toujours appelée Nadège... Le foyer n'a pas été éteint, le village où ils vivaient a mis un peu de temps à se faire à la nouvelle donne, à bien repérer qui était qui, mais tout le monde y a mis du sien. Il n'y a que leurs enfants qui eux s'en sont pas mal foutus: Tous ça c'est leurs histoires de grands qu'ils ont dit...
Le ciel est redevenu bleu, ce qui, dans le fin fond de la Bretagne profonde n'était pas gagné...
En finale, si tout cela n'est pas une merveilleuse leçon d’optimisme pour tous les couples claudiquant, fonctionnant à traine patte et se demandant dans quel état sont-ils encore ensemble, qu'est-ce?
Ô... S'émerveillera-t-on, jamais assez, des tortueux sentiers de traverses que l'amour, l'Amour, cet increvable pugnace, cet incroyable persévérant, cet indécrottable optimiste, sait parfois  emprunter pour finir, enfin, par arriver à ses fins...




4 commentaires:

Nathalie a dit…

Oui j'ai entendu parler de cette histoire. J'aime beaucoup ta façon de la raconter.

chri a dit…

@Nathalie: Merci pour La manière de le raconter... C'est une petite vengeance sur le réel qui se vit, lui!

véronique a dit…

Ne dit on pas que la réalité dépasse bien souvent la fiction !

Mais vous auriez pu l'inventer tout aussi bien Chriscot ... je vous fais confiance

chri a dit…

@Véronique Merci de votre confiance mais pour le coup, là il est trop trop fort, la barre est haute!

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