Pour finir, il s’était dit : Je pars.
Alors, il était parti. Non sans mal, il était plutôt du genre de ceux
qui restent.
Et, si tout ne s’était pas résolu dans une totale simplicité, il n’y a
que dans les films que le héros claque la porte et change de vie comme on
tire une chasse d’eau, c’était allé relativement vite. Il lui avait fallu
mettre sa baraque en vente, expliquer à quelques uns ce qui se tramait, mais
sans se préoccuper de savoir si il allait être compris, trouver un boulot là où
il envisageait d’atterrir, y acheter une maison, appeler Stan pour sa
camionnette et ses biceps, donner un dernier tour de clé, faire le trajet d’une
seule traite et se dire, enfin, qu’il y était. Avec tout ça, le mois de juin
s’épuisait en soirées aussi lumineuses qu’interminables…
Les toutes premières semaines, il les avait passées à cheval sur un
nuage rose tendre entouré des volutes volages d’un bolduc bleu pâle. Il vivait
sous ce qu’il pensait être une perfusion de bien être. Il n’était pas d’un
naturel méfiant. Il était même plutôt naïf. Pour bien assurer le coup, il avait
pris le parti de ne jamais rester inactif et se jetait sur le moindre balai dès
que se pointait l’esquisse de l’ébauche d’une idée un tant soit peu
grisouillante… Ainsi, c’est en couleurs qu’il avait abordé l’été. Les gens du
coin avaient fini par le reconnaître au sourire d’imbécile heureux accroché à
son visage et au parfum de tranquillité qu’il laissait dans son sillage. Ils le
saluaient d’un geste quand il passait à l’aube, trimballant sa grimace forcée
dans tous les coins. Une fois passé, ils se disaient entre eux :
___ Té le ravi… Ça le quittera, va t’inquiète ça le quittera… en
Octobre, il l’aura épuisé son sourire… Venu Novembre, il va se le crisper son sourire…
Quand il en croisait un avec qui il échangeait quelques grognements,
il entendait souvent :
___ Alors, toujours occupé ? Toujours aussi bien par
chez nous ?
Chez Nous? Mais merde, il était chez lui, maintenant, non ? Il se demandait parfois comment il avait atterri par ici. Il lui semblait pourtant qu’il avait toujours vécu là, où mieux qu’il aurait du toujours y vivre… Qu’il avait été appelé. Il commençait à oublier.
Cet endroit, il avait laissé le hasard choisir pour lui en pointant
son doigt sur une carte des rivières. C’était en décembre d’avant, au plein
cœur d’une vilaine insomnie. Pour s’endormir, il avait jeté :
___ Plus rien à faire là, je pars.
Alors, au réveil, pâteux, il avait cherché un pays où il y ait de
l’eau, peut-être, simplement, parce que comme le sang des hommes, elle est la
même partout. Et puis où il y a de l’eau, il y a des vallées et il sentait
qu’il ne pourrait plus vivre dans un pays plat. Un temps, il avait songé à
vivre dans une péniche pour pouvoir se tirer encore plus vite. Pour n’avoir
qu’à détacher un ou deux boutes et puis cette idée l’avait quitté. Il lui
fallait du dur, de la pente, une colline, que son regard s’emporte et qu’il se
sente adossé, protégé par un flanc. Que les emmerdes ne puissent plus venir que
d’un seul endroit. Il voulait savoir d’où débarqueraient ses ennemis. Bref, sil
n’était pas encore tout a fait certain de savoir ce qu’il souhaitait le plus,
il avait quelques idées pour la suite éventuelle. Il savait en tout cas ce
qu’il voulait quitter. La ville, la ville furoncle et ses chancres banlieues,
la ville quelle qu’elle soit et tout ce qui va avec : son vacarme
étourdissant, son indifférence hystérique et l’absence d’humanité de ses
indigènes.
Il voulait laisser dans son dos ce monde contagieux d’abrutis
totaux qui galopaient en tous sens, espérant fuir la seule chose à laquelle ils
n’échapperaient jamais… eux-mêmes.
Lui, il avait renoncé à courir, il avait jeté l’éponge rougie par ses
sangs rongés, il s’était assis sur ses valises, il avait quitté le peloton,
vidé ses étagères et débarrassé le plancher.
En acceptant, enfin, d’affronter son ennemi fidèle, il avait abandonné
ce monde de chiffonniers rances qui maniaient l’invective pour un rien dans les
super marchés, ceux qui s’arrachaient les yeux pour les six mètres carrés d’une
place de parking, se marchaient dessus pour un rang dans une file d’attente,
grenouillaient pour une reconnaissance éblouie, s’échinaient pour un article
dans le journal, ou s’ulcéraient l’estomac en attendant que baisse le prix de
l’essence… Il n’était pas loin le temps où les quartiers s’organiseraient en
milices armées pour protéger des traces de pas le vert miteux d’un gazon
galeux, défendre comme un Saint Graal trois pots de fleurs anémiées, regarder
de travers puis courser en hurlant les mines étranges, aboyer sur les enfances
jouant dans les cours, quand ils ne leur tiraient pas dessus à coups
d’insultes, voire de fusils à pompes…D’ailleurs, ici ou là, on avait commencé à
dresser des chiens, piéger les maisons et partout, fleurissaient les képis de
polices municipales qui invoquaient à tout bout de champ le respect avec un
mépris sans vergogne.
À mesure qu’on avançait, il avait le sentiment de plus en plus
prenant que le monde des villes galopait à reculons. Il n’y avait jamais eu en
vente autant d’engins permettant aux gens de se parler, on allait bientôt leur
greffer un téléphone dans chaque oreille et c’est le silence qui devenait
tonitruant. La plupart des conversations se rétrécissait comme de la peau de
chagrin et les slogans se prenaient pour des idées. On n’avait jamais autant
manié l’injure, l’invective ou le cri. Quand on avait gratifié quelqu’un de
génial ou d’enculé tout était dit. Et si, certains, de plus en plus nombreux,
le méritaient bien, pour le deuxième, ils n’étaient quand même pas tous pratiquants.
À dire vrai, tout le monde parlait de tout et personne n’écoutait
personne...
S’il n’y avait jamais trop cru, il désespérait inexorablement de ses
congénères et même s’il trouvait cela injuste, il était temps pour lui d’aller
voir ailleurs en espérant seulement qu’ILS n’y soient pas déjà. Sans illusion
mais sans faiblesse… Loin de s’estomper, la barbarie gagnait chaque jour
du terrain. Face à la tempête, les marins le savent bien, il n’y a que
deux solutions : mettre à la cape ou bien foutre le camp. Il ne se sentait
pas l’âme d’un croisé, il avait choisi le sien. Il fallait songer à sauver sa
peau, éviter la contagion, se mettre en quarantaine d’imbécillité, trouver un
abri, se rayer des listes, sortir des couloirs, abandonner la course… Alors,
comme on lisait un peu partout que les campagnes se vidaient, il s’est dit que
s’il y avait un endroit, un seul où l’on puisse trouver une chance de survivre,
c’était bien celles là qu’il fallait remplir.
Et puis surtout, surtout, ELLE l’avait quitté.
Aussi, bien plus qu’avec ses quelques meubles, des caisses de livres
et ses appareils photos, c’est avec les pouces levés qu’il avait débarqué dans
le pays.
Les premiers mois, les plus longues conversations c’est avec sa
brouette qu’il les a eues. Il lui parlait en charriant les gravats qu’il
débarrassait de l’intérieur de la baraque à laquelle il s’était attelé à
redonner un coup de fouet.
Elle était posée au beau milieu d’une colline, à l’abri des pattes
feuillues d’un tilleul généreux. Il n’avait pas mis bien longtemps à pointer le
doigt sur elle. Comme il n’avait pas trop mal revendu l’autre, il s’était
offert les hectares de cailloux, de lavandes et d’oliviers qui allaient autour.
La pente menait droit sur une rivière inconsolable, large comme un galop d’âne
et ce paradis là commençait d’un pont de pierre. Tout ce qu’il avait désiré à
l’endroit où il l’avait désiré, dessiné par un architecte de génie.
Le premier village était à quelques tours de pédaliers et un peu
plus loin, une ville bourrée d’étudiants qui ne viendraient jamais vivre par
ici, leur seule ambition, pour l’instant étant de se nouer des cravates autour
du cou pour rejoindre en hurlant la horde des excités que lui avait fui.
Avant son premier hiver, il avait entrepris de descendre ici ou là
quelques cloisons, d’arracher les linos à fleurs mauves des carrelages anciens,
de virer les moquettes sales collées aux parquets de chêne, des redonner vie
aux pierres des murs épais enfouies sous des crépis hasardeux.
Il avait manié pioche, la masse, la massette et le burin avec ardeur
et à chaque coup qu’il portait, c’était un pan des deux dernières années de son
ancienne vie qui tombait. C’est avec un bonheur sans nom qu’il virait toutes
les vieilles peaux de cette maison, dans la cour avant de fourguer le tout à la
décharge.
Il y mettait tant de vaillance qu’il s’arrêtait assez souvent pour
s’éponger le front, il en profitait pour bien mesurer l’étendue des dégâts...Ce
faisant, il accordait un répit mérité à ses mains meurtries. Très vite,
celles-ci s’étaient couvertes d’ampoules, il avait même été jusqu’à enfiler
deux paires de gants de maçons sur ses pansements rougissants, il ne lui
manquait que les épines de la couronne… Il fallait le voir, le soir attraper
les queues des casseroles avec les coudes.
Heureusement, pendant toute cette période, son dos qui, avant,
n’hésitait pas à l‘abandonner pour une quinte de toux, était resté un compagnon
fidèle. Comme il n’était pas doué pour les travaux d’Hercule, il avait perdu
pas mal de temps à tout réinventer. A la fois pour se faciliter la tâche et par
goût, il avait choisi d’aller au plus simple, une seule et vaste pièce aux murs
de pierres dénudées, habillées d’elles-mêmes, il avait rendu vie à la vie et
débarrassé le tout de ce qui n’avait rien à voir avec l’ancien.
Il avait fait comme pour lui.
Sur le devant de la bâtisse, entre le tilleul et l’endroit où l’on
voyait le mieux le soleil se coucher, il avait posé des pierres larges et
plates comme des toits de dolmen. Il les avait arrachées au flanc de la colline,
là où elles affleuraient presque, puis descendues une à une, posées sur la
brouette chancelante, accrochées à lui par une corde lui rongeant les
épaules…tout ce mal pour tant de bien…ils les avait taillées au bistouri pour
qu’elles s’accordent entre elles sans qu’on s’y prenne la peau. Au taillage de
précision, il s’y mettait le soir, juste avant que la nuit débarque et c’était
déjà du repos. Certains soirs, il tombait endormi comme sa masse, auprès d’une
dalle à peine scellée et c’était le frais de la nuit qui le réveillait et le
poussait à rentrer.
Autant dire que tout ce temps il ne lui en est pas trop resté pour
penser, et ça, c’était plutôt bien. Il n’a vraiment commencé à respirer qu’en
balançant dans l’appentis la dernière bûche coupée en prévision de l’hiver.
Celui là pouvait se pointer… Comme il reprenait son vrai boulot dans une
semaine, il s’est offert quelques jours d’entier repos.
Malgré l’ampleur de la tâche, il avait pas mal avancé, il ne lui restait
plus que les petites bricoles, la dentelle des maçons… Il reconnaissait
volontiers qu’il avait été bien épaulé par toutes ses connaissances qui avaient
cru en venant le voir se payer du bon temps dans la région… Elles s’étaient
bien fait avoir. La bagnole à peine rangée sous le tilleul, la dernière gorgée,
pour se remettre du voyage avalée, elles se retrouvaient un outil dans chaque
main à danser au folklore de l’endroit… Gratter, taper, porter, raboter,
peindre, enduire, arracher, clouer, visser et… dormir. Aussi, les séjours
prévus pour durer huit jours s’étaient à chaque fois raccourcis de moitié, une
mauvaise nouvelle qui oblige à partir, tu comprends, on ne peut pas faire
autrement, on serait bien resté, mais on reviendra promis quand tout sera fini,
non, non, je t’assure on s’est régalé, et puis l’endroit est tellement
formidable… C'est si beau.
On va t’en laisser un peu tout de même… sinon, tu vas t’ennuyer… Si
fait, cela avait permis que le plus gros avance du moins pour ce qui était de
l’extérieur. Il lui resterait l’automne pour s’attaquer aux finitions.
Il a débarqué un matin d’Octobre, juste après que les hirondelles
aient remballé leurs banderoles de fin de saison, se soient assises sur leurs
valises pour les fermer et aient disparu sans qu’on ait eu le temps de faire
ouf. Un peu trop vite à son goût.
Elles avaient à peine épousseté leurs boussoles qu’un vent polaire
s’est mis à souffler quatre jours et quatre nuits durant. Il en a profité pour
vérifier la pose des fenêtres et leur résistance au glacial.
À part un ou deux joints qui laissaient à désirer, le reste tenait le
coup. S’il devait mourir, ce ne serait pas de froid.
À cette période agitée, il y a perdu trois ou quatre bonnets qu’on
retrouverait sans doute au printemps, a succédé une dizaine de jours de grand
beau. Il se levait le matin, à l’aube, des graines lumineuses d’étoiles dans le
coin des yeux. La plupart des oiseaux qui avait fermé leurs becs les jours
précédents s’étaient remis à piailler à qui mieux mieux. De la vallée
commençaient à monter les odeurs des premiers feux de cheminée qu’on avait
rallumé en catastrophe et l’on sentait bien que le pays tout entier se
préparait à l’hiver. Les gens qu’il croisait au village avaient doublé les
épaisseurs de vêtements et s’étaient mis à marcher plus vite, comme si le temps
n’était plus à perdre. La tournée des comptoirs, elle, rétrécissait comme les
jours.
Quelques temps après, un chien qu’il ne connaissait pas, l’avait suivi
depuis le village jusqu’à chez lui. Il avait mis une dizaine de jours à pouvoir
s’en approcher, puis une autre dizaine à le faire entrer dans la maison. Il
n’avait eu besoin que d’une nuit pour le faire se coucher devant la cheminée.
Pas téméraire, mais pas fou. Un endroit qui allait devenir le sien.
Comme on était en Novembre, il l’a appelé NOV et a trouvé que
c’était un beau nom pour un chien. Ils s’étaient très vite entendus comme le
vent et les blés tous les deux.
Depuis toujours il les aimait mais n’avait jamais voulu appartenir à
l’un d’eux, justement parce qu’il les aimait. Comme NOV était un étrange
mélange de tous, ils sont vite devenus inséparables.
Quand il lui arrivait de descendre en ville, NOV s’en allait de son
côté prendre des nouvelles d’une ancienne conquête, arroser toutes les
gouttières, sentir quelques culs, enfin mener sa vie de chien et ils se
retrouvaient le soir venu, l’autre couché sous la bagnole.
Là, c’était à se demander lequel avait eu le plus peur de ne pas
revoir l’autre. C’était fête avant les fêtes. Impossible de se soustraire au
rituel. Caresser, être léchouillé. Puis ils remontaient chez eux, NOV en
copilote, assis brinqueballant sur le siège avant. Durant ces premiers mois, il
avait reçu un courrier de Ministre des Postes. Ceux qui étaient restés au front
s’inquiétaient gentiment de sa solitude, de son isolement. Tout juste s’ils ne
lui envoyaient pas en recommandé des rations de survie lyophilisées. Le facteur
qui n’avait plus emprunté son chemin depuis des années lui montait son paquet
de lettres jusqu’à la maison. Très vite, elle monta même s’il n’y avait pas de
lettres…
Au début, c’était juste pour s’en dire… Elle avait la trentaine
musclée, des cheveux bouclés couleurs d’automne, qui refusaient mordicus de se
ranger sous sa casquette d’uniforme, des yeux d’un vert à s’y noyer, des
chevilles d’une finesse à se rompre, un sourire d’avril et une santé de
marathonienne. Le vélo sans doute. Quand il y en avait, elle déposait les
lettres dans les boites comme on offre une paire de jambes à un paralytique,
elle était attendue partout comme une bonne nouvelle et par lui comme un Don du
Ciel. Elle a fini par chambouler l’ordre de sa tournée pour finir par chez lui.
Comme il travaillait souvent en fin d’après midi, ils avaient toujours une
heure ou deux devant eux pour voir venir. Elle avait émis quelques fois le
souhait de venir s’installer chez lui, mais le regard qu’il lui avait lancé
quand elle en parlait l’avait découragée.
Ces deux là finissaient toujours leurs séances par un goûter qui
ravissait NOV. Ils avaient mis un moment à comprendre que ce qui plaisait le
plus à NOV, c’est qu’elle s’asseyait encore nue, les cheveux cascadant, le dos
offert au feu crépitant, en mangeant une tartine de confiture large comme une
raquette à neige… Il y en avait un morceau pour lui.
Après l’avoir engloutie, le Malin faisait semblant de dormir et de
temps à autre, après avoir levé un œil, il lassait retomber sa paupière en
lâchant un soupir à réveiller une forge assoupie. Discret quand elle
débarquait, NOV profitait de l’ouverture de la porte pour s’en aller tacher de
jaune le blanc de la neige, se dégourdir les pattes en coursant un chat malade
ou lever un merle à moitié gelé, mais il réclamait de rentrer dès qu’il sentait
qu’à l’intérieur les choses s’assagissaient, et il se boulait près du feu, la
truffe enfouie, l’œil en alerte rouge. La théière vide, la factrice se
rhabillait, puis les deux se quittaient sans se dire à demain. Jusqu’au jour où
elle a été mutée. Le goûter a été supprimé et, des deux, c’est NOV qui a le
plus souffert.
Si ce premier hiver, s’est à peu de choses près, passé comme il
l’avait rêvé, n’allez pas croire qu’il ne fut que coussins soyeux de loukoums
rosis. Il a traversé plus d’une soirée à se faire suer comme un coureur
d’extrême grand fond. Il en a profité pour écrire, lire et dormir. Ces dernières
années il avait pris du retard dans ces domaines. Avant de venir s’échouer par
ici, il en avait usé des nuits, le regard d’un Saint Pierre embrumé, pas même
fichu de venir à bout du premier chapitre d’un roman-photo, alors il s’est
attelé à surtout rattraper.
C’est avec soulagement et dans une forme éblouissante qu’il a vu
s’évanouir les dernières flaques de neige, les premiers crocus s’arracher du
sol, les arbres endosser du vert tendre et débarquer les premières vagues
d’escadrilles d’hirondelles. Il était comme la terre prêt à tout, c'est-à-dire
enfin accessible à … des malheurs nouveaux.
Vers la mi-Avril, a soufflé du Sud un vent chaud qui charriait dans
ses bras des odeurs d’outre mer et le ciel s’est offert des couleurs impensées.
Il est redevenu possible de s’allonger le soir sur la terrasse et d’y perdre
son regard dans les nuits naissantes. S’adressant aux mauves assombris qu’il
avait sous les yeux :
Enfin, je suis en paix, soulagé. Etre heureux ça ressemble à
ça ? Le vrai bonheur ne serait donc qu’un soulagement ?
Puis après un long silence :
Ayant payé, je ne dois plus rien, c’est le prix des
choses ?
Mais, au fond du fond, je... m’emmerde… Si vous saviez.
Ah ! Ah ! Quand on obtient ce qu’on désire, on n’est pas forcément vainqueur…
Au dessus de lui, en amassant des divisions de nuages noirs, le
Ciel :
CELUI LA, JE LE SENS PRÊT, VA PAS FALLOIR TARDER A ME LE RENDRE
AMOUREUX…
Là bas, assis sur le muret, surveillant la vallée, NOV balayait l’air
tiède d’une queue énervée…
Une idée de goûter, sans doute...
11 commentaires:
S'il vous plait Monsieur, un petit recadrage de texte serait le bienvenu pour goûter vraiment cette année bien remplie (la partie droite est légèrement grignotée) !
Entre autres et pour en laisser à chacun, j'adore l'idée de s'entendre comme le vent et les blés, vraiment l'image est d'une simplicité magnifique !
Quel souffle ! j'en suis toute ébouriffée !
Va falloir qu'il fasse fort, le ciel, pour rendre amoureux un type qui laisse filer sans une larme une femme aux yeux d'un vert à s'y noyer...
Décidément j'aime bien cette nouvelle! Je sais que c'est une fiction, c'est Nov qui me l'a dit.
Carré Rouge
@ M Texte recadré!
@ Tilia: Merci Parfois il peut pleurer à l'intérieur!
@ Carré Rouge Merci à vous: N'écoutez pas Nov, il parle trop.
PS Si je ne la remontre pas en début Novembre quand vais-je le faire!
Ah oui,mais ce n'était pas un reproche! J'aime sincérement cette nouvelle et je suis contente d'avoir eu l'occasion de la relire. Elle me rappelle des années de presque jeunesse encore où le coeur pouvait s'emballer .
C'est Filo qui m'a raconté ce que Nov lui avait confié.le flair...
CR
@ CR Je suis bien certain que le coeur peut s'emballer à tout âge ne serait-ce que pour devenir un joli cadeau!
Le coeur peut s'emballer n'importe quand ... évidemment !!!
@ Brigitte Et pour pas cher... Cent balles c'est rien!
Bouleversifiant, Chri !
La rage comme le dépit donnent, on le sait, des forces décuplées jusqu'à l'épuisement qui soulage. Faire sien un endroit, démolir, créer, reconstruire avec autant de pugnacité est un bon exutoire...
Etre prêt à tout, s'isoler, au risque de... "s'emmerder", plutôt que de s'exposer à... "de nouveaux malheurs". Devenir riche de cet esprit de détachement si durement acquis., ancré dans une solitude propice à cette sensibilité contemplative.
Qu'est-ce qu'être "vainqueur" ? Gagner contre l'autre ou gagner sur soi-même en paix et avancer en sérénité ? Big question ? C'est facile de croire qu'obtenir tout et exactement ce qu'on désire conduise au bonheur... (d'ailleurs, le sait-on vraiment, ce que l'on désire ?...)
La chanson dit... : "à défaut d'avoir c'que l'on aime, faut aimer c'que l'on a"...
Visiblement, novembre fait remonter des chose en surface...
NOV, quant à lui, est le type même du bon compagnon complice et silencieux... Comme dit l'autre : "plus je connais les hommes, plus j'aime mon chien !"... et de préciser a: "quand je dis 'les hommes j'embrasse les femmes..." :)
Comme lui, rêver de tartines de confiture en surveillant la vallée... ;-)
L'histoire ne dit pas, si, finalement, depuis le passage éclair de fantômette, hébergée dans la chambre d'Amy, la grande baie vitrée donnant sur la vallée a été creusée dans le mur de la grange, pour profiter du paysage en même temps que pour les voir mieux arriver, venir ou revenir... fantômette, la nouvelle factrice, ou Elle... ou encore la marathonienne matricule 11 246, enfin touchée par la petite annonce passée dans le journal... L'histoire ne dit pas, non plus, si les chaussures de course sont restées au placard...
Comme Tilia, je doute que Le Ciel soit capable se décider seul de "rendre" quelqu'un amoureux... :(
Comme M, je déguste la mise en ambiance... "les banderoles de fin de saison... ou les premières vagues d’escadrilles d’hirondelles... les mauves assombris à l'horizon... les épousailles du vent et du blé... les graines lumineuses d’étoiles dans le coin des yeux, à l'aube"... et tant d'autres images qui donnent le grand frisson.
Une belle grande page touchante d'humanité, d'énergie déchaînée mêlée de finesse poétique.
On vous l'a déjà dit : il y a du Giono là-dedans !...
PS
Profitez bien de la couleur des vignes. Ici, le muscadet est uniformément jaune. Ça et là seulement, quelques traces de rouge, en dehors des "maisons feuilles" (appellation Vincent, 6 ans) couvertes de vigne vierge, transformées en dragons qui crachent du feu.
@ Odile: Merci pour tout, Odile...
Merci aussi à Vincent pour: ces maisons feuilles...
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