31 mars 2015

Terrassé.

Pour Les impromptus littéraires de la semaine: Le bricolage.


Cette fois c’est décidé, ce week-end je m’y colle. J’ai regardé la météo, ils annoncent grand beau sans vent. Un temps idéal pour s'activer.
Il faut que j’étrenne mon diplôme tout neuf. Je viens d'obtenir un CAP suédois en montage de Gündropp. Les trois même étagères. La dernière j’ai mis deux heures de moins que les deux premières. J’étais fier. Mention bien, messieurs dames. Ça pose un bonhomme.
Le vendredi soir, je prends les mesures et je fais ma liste, le samedi matin, je fonce à l’ouverture chez Leroy Brico, je remplis la bagnole et en rentrant j’attaque. Dimanche matin, je m’y remets de bonne heure et si tout va bien le soir on peut marcher sur la nouvelle terrasse en bois. Des mois que j’y pense, des mois que je calcule,  une fortune dépensée en magazines de décoration où la simplicité minimaliste le dispute à la rigueur minimale, à douze mille euros le mètre… Celle que j’envisage devrait me coûter un avant bras mais si je me débrouille bien,  le résultat le vaudra. Comme c’est le palier d’entrée devant la maison, cela mérite d’être un peu soigné tout de même. J’ai choisi une terrasse en acacia pour éviter le teck, la déforestation et le saccage de la planète. Elle sera un peu plus chère qu’une autre mais tant pis. Une dizaine de mètres carrés à couvrir et tout ce coin là qui était plutôt vilain habillé de neuf. 
Je m’en régale à l’avance.
À l'aube, je fais le pied de grue devant l’hyper marché du bricolage, nous sommes plusieurs dans ce cas. Je me suis collé un crayon mine sur l’oreille pour faire genre. J’ai un jean troué et un sweat shirt qui a dû appartenir à Charles Quint. Je ne suis pas rasé, à peine lavé et j’ai  une trace de café noir aux coins des lèvres et des miettes de croissant dans les cheveux. Je fais bricoleur du samedi, non? La grille monte nous entrons. Je suis obligé de prendre deux caddies à cause de la longueur des planches. Je sais où je dois aller, c’est là-bas à l’extérieur au fond du rayon jardinage. Je m’approche avec mes deux caddies de compétition, je repère les planches, je les mesure avec mon Stanley trois mètres à molette tactile, flambant neuf et je commence à charger. Il fait une belle chaleur. En dix minutes, je suis en nage. Un quart d’heure, un caddie. Je pousse le premier plein dans l’allée et je commence à charger le deuxième. Le dos me brûle, les bras commencent à flageoler, j’ai du mal à respirer, je ne suis pas confort confort. Une vingtaine de minutes après le deuxième était plein comme un truck canadien du Grand Nord. Cette fois j’avais tout. Avant les planches, j’avais acheté visseuse, vis, marteau, niveau à bulle, enfin, le petit nécessaire quincailler… Je me suis essuyé le front, j’ai descendu une bouteille de gazeuse minérale que j’avais emportée et je me suis saisi du premier caddie pour l’approcher des caisses. J’en avais bien pour six ou sept cent euros de bois… Un avant bras et la main en plus.
Là, un vague malaise et une vision. Je me suis vu passer la caisse et devoir charger tout ce bois dans la voiture. Je me suis vu arriver à la maison devoir  enlever tout ce bois DE la bagnole. Plus le montage, vissage de la terrasse. C’était au-delà de mes forces. J’ai été d’un coup anéanti par les tâches à venir.  Terrassé. Alors, j’ai entendu un cri, comme un ordre : Mais fiche donc le camp d’ici, malheureux ! Tire-toi, vite.
J’ai planté là mes deux caddies pleins comme des gueules d’ogre et je suis sorti.

En passant devant le rayon détente, j’ai attrapé une chaise longue en pur teck de Malaisie. Je pouvais bien m’offrir ça et, désormais, j’avais tout le week-end  pour en profiter… J'allais pouvoir me plonger avec délice et gourmandise dans deux trois bouquins de De Luca que je venais juste de recevoir...



6 commentaires:

Brigetoun a dit…

j'étais en admiration et me demandais pour laquelle des multiples tâches possibles je pourrais vous embaucher…
bon j'en reste au salut fraternel

chri a dit…

@ Brigitte Celerier Il vaut bien mieux... pour vous!

Tilia a dit…

C'est au pied du mur...
proverbe connu ;-)

Savoir renoncer à temps à une idée folle, voilà une preuve de bon sens.

chri a dit…

@ Tilia Enfin là ce fut bien bien plus fort que lui!

odile b. a dit…

"Terrassé" ou non, ça n'empêchera pas, pour Pâques, de siester au balcon. À c'qu'on dit : "Après Noël aux tisanes, Pâques aux rabannes"... :D)
Bonnes Fêtes et... Bons zanniversaires à tous.
J'ai tout lu. Elle était craquante, la petiote, le doigt dans l'nez ! Un Papa / Opa sous le charme... Les beaux souvenirs, ça remonte en surface, comme les bulles, comme la crème au-dessus du p'tit lait...
Et, normal : ça fait de la buée sur les lunettes ;-)

chri a dit…

@ Odile Bravo pour Noël au tisanes... Oui, oui pour la buée sur les lunettes je vous recommande Still Alice... Le film.

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