Faire du vélo, quand il ne s'agit pas d'arriver premier, quoiqu’on en dise, quelles que soit les légendes, quels que soient les dithyrambes ou les anathèmes, faire de la bicyclette est une activité de feignassou. Si on y regarde de près, ce n’est quand même rien d'autre que bouger les jambes en restant assis…
J’étais donc parti, guilleret, faire un tour de flemmard dans la chaude, sèche et vallonnée campagne des Monts du Vaucluse, j’avais en tête une note ou deux, une histoire ou deux à raconter ou mettre en forme et les deux heures de pédalage ne me seraient pas de trop pour en venir peut-être à bout. Enfin, c’est comme ça que je voyais les choses, au début. Oui, comme on est assis, on a largement le temps de penser, les jambes finissent par savoir ce qu’elles ont à faire, relâcher quand ça descend, appuyer plus fort quand ça monte ce qui, somme toute, n’est pas sorcier et ne réclame pas des compétences rares. Pendant ce temps là, le cerveau peut s’ébouillanter tranquille, il suffit de se mettre en mode vigilance restreinte.
J’étais dans le deuxième virage en épingle au pied du très pimpant village de Saumane quand j’ai eu une révélation à propos de l'importance vitale des petits bouts de rien… Celle-là d'épingle, était encore plus vrillée que la première, j’étais entre les deux murs de la falaise, les virages avaient été creusés à même la roche. A cet endroit, il fallait appuyer un peu plus fort, la pente se raidissait…
Tchhaccc un maillon de la chaîne a cassé, net.
Je me suis arrêté illico, la chaîne brisée en deux pendouillait mollement comme une nouille abandonnée, comme une… heu... A moins de savoir souder avec les dents, il n’y avait rien à faire, la balade était terminée. Du moins pour ce qui était du vélo. Maintenant, il me fallait rentrer. J’ai bu une ou deux gorgées d’eau chaude, j’ai ramassé la chaîne comme on ramasse un oiseau blessé, je l’ai mise dans un chiffon et le tout dans mon sac à dos. J’ai fait virer de bord mon engin, je suis remonté dessus et j’ai repris route en sens inverse. Quand cet incident est arrivé, j’avais roulé pendant une bonne heure c’est vous dire que je n’étais pas rentré. Tout ce qui était en descente ça irait… Pour le reste, il me faudrait marcher à côté de cette chose à deux roues devenue inutile. Pourtant, tout y était, les roues, la selle, le guidon, mes mollets, mes cuisses, la route, un bidon d'eau, de l’air dans les pneus, il ne manquait qu’une pièce de rien du tout, un truc d’environ dix grammes, et, à part dans les pentes, ce vélo ne pouvait plus avancer qu'en étant poussé. Il ne servait plus qu'à une chose: à encombrer la marche.
C'est là que je me suis dit que le TOUT ne tient que grâce à des éléments en apparence insignifiants. Est-on toujours assez prévenant avec les petites pièces de rien? Veille-t-on assez à leur confort à leur intégrité, à leur état de marche? Entretient-on assez leur bienveillance à notre égard? Ne les néglige-t-on pas, par manque d'attention, de temps, de concentration ou de prévenance? Pense-t-on toujours au détail qui, justement, tue? Si on ne le fait pas... devrait-on le faire? La vie serait-elle encore vivable s'il fallait penser à tout?
J’ai réfléchi à tout ça lors des trois longues heures que j'ai mis à rentrer à pied, mon engin docile à mes côtés, je me suis bien gardé de lui faire une réflexion désobligeante, je craignais, un peu ses représailles… Il faisait une chaleur de Mojave et, aujourd'hui, le vent ne gueulait pas. C'est dire si j'ai bien eu le temps de me pencher sur notre éprouvante condition de mortel en priant, en secret, pour qu'aucun maillon de mon organisme ne m'abandonne...
J'ai eu aussi celui de penser à MJ, aujourd'hui encore plus seul qu'avant, si seul, si raide et blanc qu'un os, désormais... sans sa perruque...
Au fait... Bonne fête... Mardi le 30 de Juin..
7 commentaires:
Ah que tu m'as fait rire!
Le vélo n'est pas un sport, on est assis et on pédale...
"On" m'avait fait la même remarque à propos de l'équitation (c'est le cheval qui bosse).
Et puis un jour, comme je vis en Beauce qui est comme beaucoup l'ignorent, faites de faux-plats et très venteuse (un faux-plat de 7 ou 8km vent debout, tu vois ce que je veux dire...), un jour , j'en ai eu marre de pédaler et j'ai changé mon vélo pour un cheval. Maintenant, je peux l'affirmer: l'équitation est un sport!
Et à part ça j'aime beaucoup ton choix musical, j'aurais pu faire le même. Comment l'as-tu importé sur ton blog?
Belle soirée
PP
@PP: Merci... Je vais y penser, dites, un cheval n'a pas de chaîne?
Pour la musique, je suis content qu'elle soit douce à l'oreille. Je vous envoie copie du mail de Clo qui m'a permis de le faire:
bonjour :)... je vais essayer d être claire... se connecter sur deezer..aller sur son profil... au prealable avoir prévu de faire une playlist pour le blog..cliquer sur la playlist concernée...en haut a gauche vont apparaitre toute vos playlists....cliquer de nouveau sur celle de votre choix afin de l' éditer...ensuite au dessus de votre liste entre "noter cette playlist" et "commentaire""..un petit onglet.."partager" c est là...vous verrez apparaitre votre lecteur...configurez le a votre gout...ensuite copier le code en bas a gauche... retourner sur votre blog et allez dans la rubrique "personnaliser"...ensuite rubrique :"htlm java script"... vous collez le code au préalable copié et ça devrait fonctionner...j espére...:)
SVP, ne me demandez pas comment, moi j'ai réussi!!! Bon courage.
Ca me rappelle ce type qui regardait, hébété, son mât couché en travers du pont, tenant dans la main un bout de goupille à 20 cents, celle qui empêche l'axe de l'étai de sortir de sa cadène.
Un peu soucieux aussi parce qu'il calculait en même temps qu'il lui restait 12 jours de traversée. Avant l'incident. Et que même à raison de 7963 coups de palmes par jour derrière son bateau, il n'était pas sûr de toucher terre avant de devenir fou.
Pour une goupille, nom de dieu !! Puis il réalisa qu'il avait le cap sur Grenade.
Il arriva, explosé de rire, 28 jours plus tard, vendit son bateau, et s'acheta un vélo.
Slev
@ Slev Joli! Tu le connais bien ce marin là?
Vous ferait pas un peu des misères vot' vélo en ce moment Chriscot ? c'est ty pas lui qui, il y a peu, avait pété deux câbles ?
S'rait p'tête temps de s'en occuper un peu, de le bichonner je veux dire... si vous voulez éviter d'autres représailles
Je suis désolée mais vos "misères" me font rire... enfin c'est surtout votre façon de nous les raconter ;-))
Merci
Coquelicot
@Coq... Tant mieux! Si on ne rit pas de la misère des autres, de quoi va-ton rire?
@Coq: En plus, vous avez raison, ce vélo là m'en veut... Peut-être parce que je m'assois dessus et qu'il le sait? Je vais lui proposer de consulter!
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