20 décembre 2010

RESURGENCE.

Bon sang ! Qu’est-ce que je les ai aimées ces débuts de soirées où l’on regardait l’heure pour savoir si on pouvait raisonnablement commencer à s’en servir un ou bien s’il fallait attendre encore un peu…
Qu'ils étaient aimables, ces repas qu’on prenait après le couchant, l’intense lueur orangée qu’il mettait dans ton regard, ce qu’elle donnait à lire, la douceur du moment quand le vent s’apaise, la table joliment mise entre les deux murs de pierres, les odeurs de ce qui grille s’invitant à la table, la tendresse qui s’installe entre deux, le noir de la chienne de retour de balade qui s’en vient s’affaisser enfin apaisée, le vol et les derniers cris des martinets encore en chasse pour la ration du soir, les cris des petits dans les nids de la grange qui réclament encore et encore, les premiers passages affamés et chuintant des pipistrelles, leurs vols énervés, le rouge du vin dans les verres, l’entier du repas sur le tissu frais repassé de la nappe, les bougies tout autour allumées et dansantes, leurs flammes agitées par des caresses d’air encore tiède, des grappes de moineaux chahutant dans le massif des lilas, des cascades de rires d’enfants attendant la nuit qui jouent dans le jardin voisin, tes cheveux mouillés par la douche prise, ta robe vite enfilée sur une peau cuivrée, pas tout à fait sèche, des gouttes d'eau perlant à ton cou, tes pieds nus aux ongles rougis dans le vert de l’herbe, une odeur douce d’huile pour la peau, un gilet de coton  couvrant tes épaules nues, une musique qui nous vient de l’intérieur de la maison par les portes grandes ouvertes, les senteurs du chèvrefeuille, en vagues déferlantes, un aboiement de chien du loin de la ferme d’en bas, les traces encore vives de la journée vécue de la nage épuisante dans le sombre de l’eau du lac, l’aller et retour d’une rive à l’autre, la fatigue ressentie dans les avant bras, les jambes de la marche de trois heures avec la noire qui a gambadé autour de nous, au retour et puis, le doux de ta main qui s’attarde au passage sur ma nuque, l’air qui, d’une caresse, d’une seule, s’électrise gentiment...
Le temps vécu, là, s’étire en langueur douillette et un silence léger s'installant…
La première gorgée de rouge et l’état flottant dans lequel mettent celles qui suivent, l’enthousiasme à vivre ce qu’elles offrent et le repas qui s’avale dans la tiède douceur de la nuit, maintenant, conquérante… Des regards qui s'en disent long, une puis deux rougeurs de cigarettes, un thé, un café... l'addition de deux espérances...
Bon sang ! Que je les ai aimé ces débuts de soirs là…
Et leurs fins, aussi…


Le verre de St arbois

15 commentaires:

Brigetoun a dit…

les faire renaître ou leur trouver équivalence, à l'échelle du remps

Anonyme a dit…

Bon sang que c'est bon à lire cette musique là ! Et le voeu qu'elle puisse être jouée aussi au présent.

Slev

Tilia a dit…

Le bonheur ne s'apprécierait-il vraiment qu'au passé, quand il a pris de la bouteille ?...

Nathalie H.D. a dit…

Non Tilia, il y a forcément un avenir dans ces résurgences là. Trop belles pour se dire qu'elles ne se conjuguent qu'au passé.

Tout est juste, tout fait envie.

La photo curieusement ne colle pas, c'est surtout qu'on n'y trouve pas la lumière que j'imaginais. J'attendais des tons cuivrés, j'y trouve l'été certes, mais un trop incertain pour être convaincant...

Tilia a dit…

Ce que je voulais dire, Nathalie, c'est qu'il arrive qu'on ne prenne pas conscience d'être heureux sur le moment.

Parfois c'est bien plus tard, voire des années après, que l'on se dit que "c'était le bon temps" !

Enfin, pour moi ça n'a pas toujours fonctionné de cette manière, mais quelques fois, si.

chri a dit…

@Nathalie J'ai entendu, enfin lu... Je change...

odile b. a dit…

Bien sûr que ces petits délices proustiens on ne les vit pas, sur le moment, "POUR-se-fabriquer-des-souvenirs"... ; on les déguste, on les grignote secrètement, intensément, goulûment, sur le champ, les cinq sens en éveil, quand ça passe... on ne réfléchit pas, on savoure... Les laisser, ensuite, remonter en surface, comme la crème sur le lait qui repose, ça se fait inconsciemment, ça revient tout seul, et c'est presqu'encore meilleur.
Je vais m'amuser à compter tous les mots de cette longue et belle tirade, en vous en souhaitant plein, plein de ces petites madeleines trempées dans du thé, de ces premières gorgées de bière.
Cette photo a bien failli me faire casser les dents : ce tas de bois trop bien rangé, je l'ai vu, au départ, comme une boîte de chocolats-caramels-au-beurre-salé...
Bonne fin d'année, Chriscot, dans la douceur du cacho fio !

chri a dit…

@Odile: Merci à vous! Que ces fêtes en soient!

odile b. a dit…

Houla, Chriscot !!!
Je repassais voir s'il restait des chocolats-caramels, et je vois qu'ils ont viré de couleurs... Je lis le commentaire plus haut... mdr !!! Maintenant, c'est des caramels mous !!!
J'en prends deux :-))

Tilia a dit…

Puisque biscuits il y a, je reprendrais bien une lampée de rouge... avec une navette pour tremper dedans.
Quoi ? y'a pas que les madeleines dans la vie :D

Joyeuses fêtes Chri !

chri a dit…

@Tilia Belles belles fêtes chez vous zaussi!

chri a dit…

@Slev Ca viendra! Ou pas! Chaleureuses embrassades...

Veronique a dit…

C'est ce que je dis souvent Chriscot ....
Se souvenir des belles choses et vous le faites si bien !
Un bonheur que de vous lire aujourd'hui

Anonyme a dit…

Oulaaa, ça fait envie ;-))),
l'été, la douceur, la tendresse, un doux dîner, toussa-toussa... j'aime "trop" vous lire Chri... il fait si froid dehors, brrrrrr

Bonnes et douces... "Faîtes" comme vous les voulez ;-)

Coquelicot

chri a dit…

@Véronique
@Coq Je suis content de ça, alors!

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